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Empire Falls est une ville. En ce sens, le titre français (Le Déclin de l’Empire Whiting) est infiniment moins fin que le titre original. Car Empire Falls est une ville morte, une de ces villes qui ne ressemblent plus à grand chose une fois que l’industrie les a désertées, une ville comme il y en a tant en occident. La seule chose qui reste ou presque, outre les habitants bien sûr, c’est le restaurant qui porte le nom très original (et tragiquement crédible) d’Empire Grill. Il est tenu par Miles, antihéros parfait de cette chronique de la non-vie ordinaire d’une ville ordinaire…
A force de lire tout et son contraire sur ce livre, j’avais presque fini par en être dégoûté. Il semble que Empire Falls ne laisse pas de place à la demi-mesure : c’est un chef-d’œuvre ou une daube, point barre. En commençant la lecture, je me suis dit en souriant que merde, il allait bientot falloir choisir mon camp…
Et puis j’ai totalement oublié tout ce que j’ai pu lire ou entendre ici ou là, car j’avoue m’être laissé emporté assez facilement par l’écriture de Russo. Une écriture qui n’a pas été sans me rappeler celle de Russell Banks – mais ça m’étonnerait bien que je sois le premier à m’être fait la réflexion. A l’instar de l’auteur de Cloudsplitter, Russo n’est pas un immense styliste, mais c’est ce qui fait son charme. Il ne tape pas sur les nerfs avec des grandes sentences cassent-gueule (et cassent…) et se concentre sur un récit qu’il amène tranquillement, presque nonchalamment, s’attachant à un personnage, puis à un autre, et lentement le roman s’installe. Ce sera d'ailleurs mon premier reproche : c’est quand même assez lent. D’un autre côté j’ai bien conscience que cela fait partie d’un schéma narratif précis, et que le livre perdrait en saveur ce qu’il gagnerait en concision… n’empêche : que c’est lent !
Autre bémol, plus ennuyeux celui-ci, c’est l’histoire. La trame de base est archi-éculée, mais cela n’empêche pas de se montrer un peu inventif. J’ai guetté en vain le rebondissement, le moment où tout allait basculer… en fait ça ne bascule jamais vraiment. Dommage, car il y avait sûrement moyen de rendre tout cela encore plus prenant… Le plaisir est en partie gâché par le fait qu’on attend en vain un événement ou quelconque retournement qui ne vient finalement pas.
Pour autant, Empire Falls ne me semble pas mériter d’être cloué au pilori. Car ce livre exerce réellement un pouvoir sur le lecteur. Sans quoi je n’aurais pas terminé un tel pavé, ou je l’aurais massacré dans ma critique, ce que je ne fais pas. Comment expliquer alors qu’un roman lent, plutôt bien écrit mais pas non plus de manière renversante, et à l’histoire assez convenue, m’ait plu malgré tout ? Aucune idée… c’est peut-être aussi ça la magie de la littérature : des fois vous aimez un livre, et vous êtes incapable de dire pourquoi.
Alors en attendant ma prochaine rencontre avec Russo pour me faire un point de vue plus précis sur son œuvre, je ne peux pas nier le réel intérêt qu’a suscité chez moi ce livre.
Ni un chef-d’œuvre, ni une daube. Un bon livre.
Comme quoi parfois, la demi-mesure, c’est pas mal non plus…
Empire Falls est une ville. En ce sens, le titre français (Le Déclin de l’Empire Whiting) est infiniment moins fin que le titre original. Car Empire Falls est une ville morte, une de ces villes qui ne ressemblent plus à grand chose une fois que l’industrie les a désertées, une ville comme il y en a tant en occident. La seule chose qui reste ou presque, outre les habitants bien sûr, c’est le restaurant qui porte le nom très original (et tragiquement crédible) d’Empire Grill. Il est tenu par Miles, antihéros parfait de cette chronique de la non-vie ordinaire d’une ville ordinaire…
A force de lire tout et son contraire sur ce livre, j’avais presque fini par en être dégoûté. Il semble que Empire Falls ne laisse pas de place à la demi-mesure : c’est un chef-d’œuvre ou une daube, point barre. En commençant la lecture, je me suis dit en souriant que merde, il allait bientot falloir choisir mon camp…
Et puis j’ai totalement oublié tout ce que j’ai pu lire ou entendre ici ou là, car j’avoue m’être laissé emporté assez facilement par l’écriture de Russo. Une écriture qui n’a pas été sans me rappeler celle de Russell Banks – mais ça m’étonnerait bien que je sois le premier à m’être fait la réflexion. A l’instar de l’auteur de Cloudsplitter, Russo n’est pas un immense styliste, mais c’est ce qui fait son charme. Il ne tape pas sur les nerfs avec des grandes sentences cassent-gueule (et cassent…) et se concentre sur un récit qu’il amène tranquillement, presque nonchalamment, s’attachant à un personnage, puis à un autre, et lentement le roman s’installe. Ce sera d'ailleurs mon premier reproche : c’est quand même assez lent. D’un autre côté j’ai bien conscience que cela fait partie d’un schéma narratif précis, et que le livre perdrait en saveur ce qu’il gagnerait en concision… n’empêche : que c’est lent !
Autre bémol, plus ennuyeux celui-ci, c’est l’histoire. La trame de base est archi-éculée, mais cela n’empêche pas de se montrer un peu inventif. J’ai guetté en vain le rebondissement, le moment où tout allait basculer… en fait ça ne bascule jamais vraiment. Dommage, car il y avait sûrement moyen de rendre tout cela encore plus prenant… Le plaisir est en partie gâché par le fait qu’on attend en vain un événement ou quelconque retournement qui ne vient finalement pas.
Pour autant, Empire Falls ne me semble pas mériter d’être cloué au pilori. Car ce livre exerce réellement un pouvoir sur le lecteur. Sans quoi je n’aurais pas terminé un tel pavé, ou je l’aurais massacré dans ma critique, ce que je ne fais pas. Comment expliquer alors qu’un roman lent, plutôt bien écrit mais pas non plus de manière renversante, et à l’histoire assez convenue, m’ait plu malgré tout ? Aucune idée… c’est peut-être aussi ça la magie de la littérature : des fois vous aimez un livre, et vous êtes incapable de dire pourquoi.
Alors en attendant ma prochaine rencontre avec Russo pour me faire un point de vue plus précis sur son œuvre, je ne peux pas nier le réel intérêt qu’a suscité chez moi ce livre.
Ni un chef-d’œuvre, ni une daube. Un bon livre.
Comme quoi parfois, la demi-mesure, c’est pas mal non plus…
👍 Empire Falls
Richard Russo | Alfred A. Knopf, 2001