...
Minuit est un livre difficile à résumer, car bien que constitué de trois parties distinctes il forme en fait deux romans en un seul, bâtis avec un talent de concision tout à fait remarquables. Si je vous résume le premier, vous n’aurez pas vraiment envie de le lire. Si je vous résume les deux, vous aurez envie de le faire, mais n’y trouverez plus de plaisir.
Minuit commence presque comme Cendrillon : une petite fille, Elisabeth, apprend la mort brutale de sa mère – un suicide. Elle est confiée à ses tantes, qui n’ont cure de s’occuper d’elle et l’envoient de foyer en foyer. Humiliation, violence, Elisabeth connaît tout ou presque, lorsqu’elle rencontre un homme qui décide sans raison apparente de l’adopter (plus ou moins). Cet homme, ce n’est autre que l’amant de sa mère, celui-là même qui la repoussa et l’accula au suicide. Qui est réellement ce curieux ce personnage ? Souhaite-t-il réellement racheter son péché, ou bien son désir est-il bien moins pur ? En tout cas, il règne en petit maître blanc sur son entourage. Un tyran au visage d’ange, un monstre caché derrière l'apparence d’un homme bon et désintéressé, qui va peu à peu réduire Elisabeth à la servitude la plus totale…
Julien Green est décidément non seulement un auteur singulier, mais surtout un auteur d’une modernité incroyable. Après avoir lu Le Malfaiteur il y a quelques mois, c’était le premier point qui m’était venu à l’esprit, et il en va de même pour Minuit, livre étrange et fascinant dont on peinera à croire qu’il a été publié dans les années 30. Il y a un tel décalage entre la production littéraire de l’époque et ce texte-ci que c’est à se demander si la date de sortie n’a pas carrément été falsifiée sur les exemplaires !
Minuit, donc, parce que c’est tout simplement un roman essentiellement nocturne, ce qui ne fait que renforcer le climat de mystère entourant ses protagonistes au moins autant que ses lieux. Des lieux qui possèdent des noms, mais que du fait de la pénombre on ne voit jamais réellement. Des lieux qui, peut-être, n’existent que dans l’imaginaire de leurs habitants, comme le laisse entendre ironiquement l’un d’eux vers les derniers chapitres.
Ce roman-là pourrait presque se lire d’une traite tant il est haletant : dans ces lieux évanescents évolue toute une galerie de personnages aussi curieux que criants de vérités, qui entourent une Elisabeth symbolisant l’âme pure que l’on essaie de corrompre… et que l’on réussit à corrompre ! Nulle question de manichéisme ici : la manière dont Green amène les choses est simple, subtile, délicate… peu à peu, la jeune femme se prend à aimer ses bourreaux et s’éprend de sa servitude…Dans les dernières pages, un frisson parcourra immanquablement le lecteur… jusqu’à la révélation finale, aussi terrible et poignante qu’inattendue.
Un grand livre.
Minuit est un livre difficile à résumer, car bien que constitué de trois parties distinctes il forme en fait deux romans en un seul, bâtis avec un talent de concision tout à fait remarquables. Si je vous résume le premier, vous n’aurez pas vraiment envie de le lire. Si je vous résume les deux, vous aurez envie de le faire, mais n’y trouverez plus de plaisir.
Minuit commence presque comme Cendrillon : une petite fille, Elisabeth, apprend la mort brutale de sa mère – un suicide. Elle est confiée à ses tantes, qui n’ont cure de s’occuper d’elle et l’envoient de foyer en foyer. Humiliation, violence, Elisabeth connaît tout ou presque, lorsqu’elle rencontre un homme qui décide sans raison apparente de l’adopter (plus ou moins). Cet homme, ce n’est autre que l’amant de sa mère, celui-là même qui la repoussa et l’accula au suicide. Qui est réellement ce curieux ce personnage ? Souhaite-t-il réellement racheter son péché, ou bien son désir est-il bien moins pur ? En tout cas, il règne en petit maître blanc sur son entourage. Un tyran au visage d’ange, un monstre caché derrière l'apparence d’un homme bon et désintéressé, qui va peu à peu réduire Elisabeth à la servitude la plus totale…
Julien Green est décidément non seulement un auteur singulier, mais surtout un auteur d’une modernité incroyable. Après avoir lu Le Malfaiteur il y a quelques mois, c’était le premier point qui m’était venu à l’esprit, et il en va de même pour Minuit, livre étrange et fascinant dont on peinera à croire qu’il a été publié dans les années 30. Il y a un tel décalage entre la production littéraire de l’époque et ce texte-ci que c’est à se demander si la date de sortie n’a pas carrément été falsifiée sur les exemplaires !
Minuit, donc, parce que c’est tout simplement un roman essentiellement nocturne, ce qui ne fait que renforcer le climat de mystère entourant ses protagonistes au moins autant que ses lieux. Des lieux qui possèdent des noms, mais que du fait de la pénombre on ne voit jamais réellement. Des lieux qui, peut-être, n’existent que dans l’imaginaire de leurs habitants, comme le laisse entendre ironiquement l’un d’eux vers les derniers chapitres.
Ce roman-là pourrait presque se lire d’une traite tant il est haletant : dans ces lieux évanescents évolue toute une galerie de personnages aussi curieux que criants de vérités, qui entourent une Elisabeth symbolisant l’âme pure que l’on essaie de corrompre… et que l’on réussit à corrompre ! Nulle question de manichéisme ici : la manière dont Green amène les choses est simple, subtile, délicate… peu à peu, la jeune femme se prend à aimer ses bourreaux et s’éprend de sa servitude…Dans les dernières pages, un frisson parcourra immanquablement le lecteur… jusqu’à la révélation finale, aussi terrible et poignante qu’inattendue.
Un grand livre.
👍👍👍 Minuit
Julien Green | Points, 1936