...
En toute honnêteté, je n’avais pas très envie de relire les Lettres à Milena. Dans mon souvenir, ça n’avait aucun intérêt (enfin : c’était une correspondance, quoi).
D’où une certaine surprise… car je crois que les Lettres à Félice, que j’ai déjà évoquées plus tôt, ont légèrement brouillé ma mémoire. Une correspondance reste certes une correspondance, mais les lettres de Kafka à Milena Jesenska sont quasiment l’inverse de celles à Felice Bauer. Bien évidemment, Kafka dragouille un peu, mais quand même beaucoup moins. Tout simplement parce que Milena, elle n’est pas là pour ça. Dans l’imaginaire collectif (collectif est un terme un peu poussé, disons : dans l’imaginaire de beaucoup de lecteurs de Kafka) Milena est un genre de femme fantasmée par l’auteur, certains la présentent même dans les biographies comme sa maîtresse.
C’est tout simplement faux : il n’y a jamais rien eu entre eux (et il est d’ailleurs très clair à la lecture de leur correspondance qu’aucun sentiment ne les lie qui puisse être qualifié d’amoureux au sens strict du terme), et avant toute autre chose Milena Jesenska était sa traductrice. Elle traduisait les œuvres de Kafka en tchèque (rappelons que l’auteur écrivait en allemand, ce qui le marginalisait totalement dans la Tchéquie de l’époque – qui ne s’appelait d’ailleurs pas encore Tchéquie), ce qui explique qu’elle en ait eu tellement sous le coude au moment d’exécuter des publications posthumes.
Bien entendu, il faudrait être particulièrement naïf pour croire que c’est par altruisme et amour de l’art que Jesenska autorista la publication outre de ce livre, du journal de l’auteur et de Préparatif de noces à la campagne (deux ouvrages qu'on oubliera volontiers). Cependant, on peut aussi bien considérer qu’à l’instar de Max Brod, elle était tenue par une promesse de confidentialité qu’elle ne rompit que plus tard que le poète – après tout pourquoi pas ?
De fait, au fil des années, Milena est devenue un peu plus que la traductrice de Kafka : l’amie, la confidente, et la conseillère technique de ses écrits. En lisant toutes ces lettres, on en apprend énormément sur le rôle que cette femme pour le moins mystérieuse a joué auprès de l’auteur, notamment dans la genèse de ce qui aurait dû devenir L’Amérique si Kafka ne l’avait pas planté en chemin.
Évidemment (mais sinon ce ne serait pas drôle), Kafka en lettres, de même que Kafka en essai, ça reste toujours un peu abscons par moment, quitte à frôler le comique involontaire. Je ne suis pas certain que cette correspondance-ci ait plus de raison d’être que celle avec Felice Bauer, dans la mesure où de toute façon les correspondances resteront toujours pour moi la même chose – à savoir du bonus et rien de fondamental dans l’œuvre (aussi brillant soit l’auteur dont il est question). Mais en tout cas, celle-ci est autrement plus intéressante.
En toute honnêteté, je n’avais pas très envie de relire les Lettres à Milena. Dans mon souvenir, ça n’avait aucun intérêt (enfin : c’était une correspondance, quoi).
D’où une certaine surprise… car je crois que les Lettres à Félice, que j’ai déjà évoquées plus tôt, ont légèrement brouillé ma mémoire. Une correspondance reste certes une correspondance, mais les lettres de Kafka à Milena Jesenska sont quasiment l’inverse de celles à Felice Bauer. Bien évidemment, Kafka dragouille un peu, mais quand même beaucoup moins. Tout simplement parce que Milena, elle n’est pas là pour ça. Dans l’imaginaire collectif (collectif est un terme un peu poussé, disons : dans l’imaginaire de beaucoup de lecteurs de Kafka) Milena est un genre de femme fantasmée par l’auteur, certains la présentent même dans les biographies comme sa maîtresse.
C’est tout simplement faux : il n’y a jamais rien eu entre eux (et il est d’ailleurs très clair à la lecture de leur correspondance qu’aucun sentiment ne les lie qui puisse être qualifié d’amoureux au sens strict du terme), et avant toute autre chose Milena Jesenska était sa traductrice. Elle traduisait les œuvres de Kafka en tchèque (rappelons que l’auteur écrivait en allemand, ce qui le marginalisait totalement dans la Tchéquie de l’époque – qui ne s’appelait d’ailleurs pas encore Tchéquie), ce qui explique qu’elle en ait eu tellement sous le coude au moment d’exécuter des publications posthumes.
Bien entendu, il faudrait être particulièrement naïf pour croire que c’est par altruisme et amour de l’art que Jesenska autorista la publication outre de ce livre, du journal de l’auteur et de Préparatif de noces à la campagne (deux ouvrages qu'on oubliera volontiers). Cependant, on peut aussi bien considérer qu’à l’instar de Max Brod, elle était tenue par une promesse de confidentialité qu’elle ne rompit que plus tard que le poète – après tout pourquoi pas ?
De fait, au fil des années, Milena est devenue un peu plus que la traductrice de Kafka : l’amie, la confidente, et la conseillère technique de ses écrits. En lisant toutes ces lettres, on en apprend énormément sur le rôle que cette femme pour le moins mystérieuse a joué auprès de l’auteur, notamment dans la genèse de ce qui aurait dû devenir L’Amérique si Kafka ne l’avait pas planté en chemin.
Évidemment (mais sinon ce ne serait pas drôle), Kafka en lettres, de même que Kafka en essai, ça reste toujours un peu abscons par moment, quitte à frôler le comique involontaire. Je ne suis pas certain que cette correspondance-ci ait plus de raison d’être que celle avec Felice Bauer, dans la mesure où de toute façon les correspondances resteront toujours pour moi la même chose – à savoir du bonus et rien de fondamental dans l’œuvre (aussi brillant soit l’auteur dont il est question). Mais en tout cas, celle-ci est autrement plus intéressante.
👍 Lettres à Milena
Franz Kafka | Gallimard "L'Imaginaire", 1988