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La tête contre les murs ?... En tout cas : bien vissée sur les épaules. Voici venir la Deluxe Edition de The Head on the Door, sixième album de The Cure portant une double casquette : un des meilleurs opus des vieux corbeaux, et son plus gros «coup » commercial.
Un album charnière, puisque c’est le premier sur lequel Robert Smith amorce un virage nettement plus pop et mélodique, mais pas encore celui du désaveu pour les fans. Pourquoi ? Tout simplement parce The Head on the Door, aussi pop (voire commercial) soit-il, est un disque d’une qualité, d’une puissance et d’une originalité rarement atteintes par les autres groupes new-wave.
Il est vrai qu’en 1985, Robert Smith a sans doute besoin d’aérer un peu ses neurones : après la Trilogie Glacée de 1980-82 (Seventeen Seconds / Faith / Pornography), après le presque flippant The Top, après un stage de deux ans chez Siouxsie & The Banshees (pour le live Nocturne et l’album Hyaena) et une évasion pas beaucoup plus joyeuse au sein du supergroupe The Glove (avec Steve Severin, des goths susmentionnés), il est temps de sourire un petit peu… et dans le genre The Head on the Door (qui n’est certes pas non plus le disque le plus fun de tous les temps) fait office de respiration nécessaire dans une œuvre devenue de plus en plus plombante au fil des années. Si l’atmosphère générale reste relativement mélancolique (« A Night Like This » fut certes un tube, mais un tube plutôt triste), c’est plutôt la manière de faire qui a changé… en bien ou en mal, difficile de le dire. Il est certain que quand on voit l’évolution de la carrière de Cure après ce disque on n’a pas envie de louer la Tentation De La Mélodie. D’un autre côté ce disque en lui-même est irréprochable.
D’abord il y a le son, nettement moins vaporeux que sur les disques précédents. De là à mettre ça sur le compte d’une tentative marketing il y a un pas que nous nous abstiendrons de franchir : du strict de point de vue la production, Cure vient de publier en 1985 quatre albums très similaires. Une telle volonté de changement n’est-elle pas plutôt louable ? Bien sûr les morceaux ne sont plus aussi longs et tortueux (aucun n’excède les cinq minutes), les mélodies sont plus évidentes, la voix plus en avant… pour autant il serait stupide de considérer que sur The Head on the Door Robert Smith fait de la pop pour la pop. Il y a une authentique recherche créative et une remarquable profondeur dans des titres comme « Push », délicieusement aérien, ou « The Blood » (avec sa tentative flamenco). D’une manière générale, The Cure s’amuse à bricoler des trucs dont on ne le croyait pas capable, à l’image de cette «Kyoto Song » orientalisante et absolument inattendue, de l’insouciance adolescente de « Close to Me » (qui avant d’être un hit interplanétaire, la chanson la plus connue du groupe, est un petit chef-d’œuvre), du rock lourd et sinueux de « Screw »… ce n’est pas parce qu’un album est relativement facile d’accès qu’il n’est pas profond. Tel semble être le message envoyé à ses fans par un Robert Smith qui, d’une certaine manière, annonce ici l’évolution de la quasi totalité de la scène « cold/new-wave » : dès l’année suivante les collègues de Cure vont lui emboîter le pas dans cette direction plus joviale et plus mélodique, qu’il s’agisse des Banshees avec Tinderbox ou de New Order avec Brotherhood. Même Depeche Mode va violemment aérer sa musique à cette époque sur Black Celebration, publié, je vous le donne en mile… un an pile poil après le carton du single « Close to Me ».
Côté réédition, difficile de faire la fine bouche lorsqu’un album passe de dix à vingt-neuf titres et récupère au vol un son à décorner les bœufs. Les fans, il est vrai, possèdent déjà les quelques inédits (sept en tout dont le fabuleux « The Exploding Boy » et l’éternellement bizarroïde « Mansolidgold ») via le coffret Join the Dots publié il y a trois ans. Ici cependant on les retrouve pour la première fois replacés dans le contexte de l’album, ce qui permettra de constater que le groupe n’a pas subitement cessé de composer des morceaux prog et poisseux – ils ont simplement tous échoué en faces B des maxis. Les versions instrumentales sont moins passionnantes, principalement parce qu’elles donnent l’impression de ne jamais avoir été envisagées comme telles et d’être des rajouts de dernière minute… mais bon : c’est le principe de la réédition. Dans le genre on on aurait difficilement pu faire mieux.
La tête contre les murs ?... En tout cas : bien vissée sur les épaules. Voici venir la Deluxe Edition de The Head on the Door, sixième album de The Cure portant une double casquette : un des meilleurs opus des vieux corbeaux, et son plus gros «coup » commercial.
Un album charnière, puisque c’est le premier sur lequel Robert Smith amorce un virage nettement plus pop et mélodique, mais pas encore celui du désaveu pour les fans. Pourquoi ? Tout simplement parce The Head on the Door, aussi pop (voire commercial) soit-il, est un disque d’une qualité, d’une puissance et d’une originalité rarement atteintes par les autres groupes new-wave.
Il est vrai qu’en 1985, Robert Smith a sans doute besoin d’aérer un peu ses neurones : après la Trilogie Glacée de 1980-82 (Seventeen Seconds / Faith / Pornography), après le presque flippant The Top, après un stage de deux ans chez Siouxsie & The Banshees (pour le live Nocturne et l’album Hyaena) et une évasion pas beaucoup plus joyeuse au sein du supergroupe The Glove (avec Steve Severin, des goths susmentionnés), il est temps de sourire un petit peu… et dans le genre The Head on the Door (qui n’est certes pas non plus le disque le plus fun de tous les temps) fait office de respiration nécessaire dans une œuvre devenue de plus en plus plombante au fil des années. Si l’atmosphère générale reste relativement mélancolique (« A Night Like This » fut certes un tube, mais un tube plutôt triste), c’est plutôt la manière de faire qui a changé… en bien ou en mal, difficile de le dire. Il est certain que quand on voit l’évolution de la carrière de Cure après ce disque on n’a pas envie de louer la Tentation De La Mélodie. D’un autre côté ce disque en lui-même est irréprochable.
D’abord il y a le son, nettement moins vaporeux que sur les disques précédents. De là à mettre ça sur le compte d’une tentative marketing il y a un pas que nous nous abstiendrons de franchir : du strict de point de vue la production, Cure vient de publier en 1985 quatre albums très similaires. Une telle volonté de changement n’est-elle pas plutôt louable ? Bien sûr les morceaux ne sont plus aussi longs et tortueux (aucun n’excède les cinq minutes), les mélodies sont plus évidentes, la voix plus en avant… pour autant il serait stupide de considérer que sur The Head on the Door Robert Smith fait de la pop pour la pop. Il y a une authentique recherche créative et une remarquable profondeur dans des titres comme « Push », délicieusement aérien, ou « The Blood » (avec sa tentative flamenco). D’une manière générale, The Cure s’amuse à bricoler des trucs dont on ne le croyait pas capable, à l’image de cette «Kyoto Song » orientalisante et absolument inattendue, de l’insouciance adolescente de « Close to Me » (qui avant d’être un hit interplanétaire, la chanson la plus connue du groupe, est un petit chef-d’œuvre), du rock lourd et sinueux de « Screw »… ce n’est pas parce qu’un album est relativement facile d’accès qu’il n’est pas profond. Tel semble être le message envoyé à ses fans par un Robert Smith qui, d’une certaine manière, annonce ici l’évolution de la quasi totalité de la scène « cold/new-wave » : dès l’année suivante les collègues de Cure vont lui emboîter le pas dans cette direction plus joviale et plus mélodique, qu’il s’agisse des Banshees avec Tinderbox ou de New Order avec Brotherhood. Même Depeche Mode va violemment aérer sa musique à cette époque sur Black Celebration, publié, je vous le donne en mile… un an pile poil après le carton du single « Close to Me ».
Côté réédition, difficile de faire la fine bouche lorsqu’un album passe de dix à vingt-neuf titres et récupère au vol un son à décorner les bœufs. Les fans, il est vrai, possèdent déjà les quelques inédits (sept en tout dont le fabuleux « The Exploding Boy » et l’éternellement bizarroïde « Mansolidgold ») via le coffret Join the Dots publié il y a trois ans. Ici cependant on les retrouve pour la première fois replacés dans le contexte de l’album, ce qui permettra de constater que le groupe n’a pas subitement cessé de composer des morceaux prog et poisseux – ils ont simplement tous échoué en faces B des maxis. Les versions instrumentales sont moins passionnantes, principalement parce qu’elles donnent l’impression de ne jamais avoir été envisagées comme telles et d’être des rajouts de dernière minute… mais bon : c’est le principe de la réédition. Dans le genre on on aurait difficilement pu faire mieux.
👑 The Head on the Door
The Cure | Elektra, 1985