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Une fois par an environ je tombe sur un livre dont je ne sais pas quoi dire. Ca ne signifie pas qu’il ne m’inspire rien, bien entendu. Plutôt qu’il m’inspire beaucoup de choses que je n’arrive pas forcément à formuler, que je ne sais pas trop par quel bout le prendre mais qu’il faut bien que j’en parle – les livres me déstabilisant étant sans doute paradoxalement ceux qui me parlent le plus.
Il y a un an ce fut La Route des Flandres, de Claude Simon. Cette fois-ci il s’agit du Don, de Vladimir Nabokov, dans un registre totalement différent et pour être honnête : nettement plus agréable à explorer.
Tardivement publié en France, Le Don est le dernier roman de Nabokov rédigé dans sa langue maternelle – je suppute que ç’ait sa petite importance. Mais en fait de roman, je devrais plutôt parler de patchwork. A la fois biographie d’un personnage fictif (au nom à rallonge, comme dans tout grand livre russe qui respecte !), hommage à la littérature russe, parodie de littérature russe, et fable burlesque sur le monde littéraire… ça pourrait faire beaucoup pour un seul roman, mais en fait, non. La preuve : Nabokov trouve malgré tout le temps et l’espace pour se livrer à des divagations poétiques souvent charmantes – et parfois il faut bien le reconnaître un poil ennuyeuses.
C’est que si la diversité du roman fait sa force, la manière dont cette diversité est employée me semble constituer sa faiblesse. Je veux dire par-là que l’intrigue est un peu diluée par la longueur de l’ensemble (pas loin de six cents pages), l’auteur alternant de fait moment captivants (par leur finesse, leur drôlerie) et passages plus contemplatifs un peu longuets... que l’on savoure néanmoins, comme des respirations dans le récit. Bizarre, vraiment, tellement bizarre en fait que je suis incapable de donner une ligne directrice à ce commentaire (allons allons, pas la peine de mentir, je vous assure que ça se voit).
L’on savoure, donc, peut-être parce qu’on se dit que c’est volontaire. Le fait est qu’un vrai beau roman russe ne peut être qu’un pavé, ce n’est pas Tonton Léon qui me contredira. Or Nabokov a visiblement décidé, pour en finir avec la littérature russe (car c’est bien de cela qu’il s’agit : tuer cette première période de son œuvre) de rédiger un livre massif cristallisant à la fois toutes les obsessions et tous clichés de ces œuvres qui bercèrent sa jeunesse. Afin de saluer non pas un don – un héritage.
Pari tenu : si vous avez un jour rêvé de voir Tolstoï, Tchekov, Tourgueniev, Gogol et Pouchkine concentrés en un seul volume, Le Don sera assurément l’objet de vos fantasmes. En ce qui me concerne j’adore ces auteurs… la manière dont Nabokov les salue, comme celle dont il les tourne en dérision, ne pouvait que me toucher.
Une fois par an environ je tombe sur un livre dont je ne sais pas quoi dire. Ca ne signifie pas qu’il ne m’inspire rien, bien entendu. Plutôt qu’il m’inspire beaucoup de choses que je n’arrive pas forcément à formuler, que je ne sais pas trop par quel bout le prendre mais qu’il faut bien que j’en parle – les livres me déstabilisant étant sans doute paradoxalement ceux qui me parlent le plus.
Il y a un an ce fut La Route des Flandres, de Claude Simon. Cette fois-ci il s’agit du Don, de Vladimir Nabokov, dans un registre totalement différent et pour être honnête : nettement plus agréable à explorer.
Tardivement publié en France, Le Don est le dernier roman de Nabokov rédigé dans sa langue maternelle – je suppute que ç’ait sa petite importance. Mais en fait de roman, je devrais plutôt parler de patchwork. A la fois biographie d’un personnage fictif (au nom à rallonge, comme dans tout grand livre russe qui respecte !), hommage à la littérature russe, parodie de littérature russe, et fable burlesque sur le monde littéraire… ça pourrait faire beaucoup pour un seul roman, mais en fait, non. La preuve : Nabokov trouve malgré tout le temps et l’espace pour se livrer à des divagations poétiques souvent charmantes – et parfois il faut bien le reconnaître un poil ennuyeuses.
C’est que si la diversité du roman fait sa force, la manière dont cette diversité est employée me semble constituer sa faiblesse. Je veux dire par-là que l’intrigue est un peu diluée par la longueur de l’ensemble (pas loin de six cents pages), l’auteur alternant de fait moment captivants (par leur finesse, leur drôlerie) et passages plus contemplatifs un peu longuets... que l’on savoure néanmoins, comme des respirations dans le récit. Bizarre, vraiment, tellement bizarre en fait que je suis incapable de donner une ligne directrice à ce commentaire (allons allons, pas la peine de mentir, je vous assure que ça se voit).
L’on savoure, donc, peut-être parce qu’on se dit que c’est volontaire. Le fait est qu’un vrai beau roman russe ne peut être qu’un pavé, ce n’est pas Tonton Léon qui me contredira. Or Nabokov a visiblement décidé, pour en finir avec la littérature russe (car c’est bien de cela qu’il s’agit : tuer cette première période de son œuvre) de rédiger un livre massif cristallisant à la fois toutes les obsessions et tous clichés de ces œuvres qui bercèrent sa jeunesse. Afin de saluer non pas un don – un héritage.
Pari tenu : si vous avez un jour rêvé de voir Tolstoï, Tchekov, Tourgueniev, Gogol et Pouchkine concentrés en un seul volume, Le Don sera assurément l’objet de vos fantasmes. En ce qui me concerne j’adore ces auteurs… la manière dont Nabokov les salue, comme celle dont il les tourne en dérision, ne pouvait que me toucher.
👍 Le Don
Vladimir Nabokov | Folio, 1938