...
Évidemment, c’est un peu chiant. Même carrément lourdingue par moment. Et à coup sûr ce n’était pas ce que l’auteur voulait. N’empêche que voilà, c’est comme ça et on y peut grand-chose – à part bien sûr râler de bout en bout comme je l’ai fait durant cette lecture. Quoi ? Pardon ? Bah… pourquoi vous faites cette tête-là ?
Ok, je vois : on vous a dit que Shutter Island était un livre exceptionnel. Du coup quand je dis que c’est un livre chiant vous pensez que j’essaie de vous jouer un vilain tour, ou bien alors de me distinguer de la cohorte de fans convertis au Lehanisme au terme de ce roman. Mais pas du tout, rassurez-vous : Shutter Island est bel et bien l’un des romans les plus prodigieux que j’ai lus ces dernières années (et vous êtes bien placés pour savoir que j’en ai lu beaucoup, c’est dire si je pèse mes mots). De ce point de vue là je suis totalement d’accord avec les dix mille personnes à l’avoir chroniqué depuis sa sortie. A ceci près que je suis saisi depuis deux jours d’une irrépressible envie de toutes les tuer mais bon… on a tous un côté obscur, pas vrai ?
Le fait est que voilà : à trop lire que la fin de Shutter Island est sensationnelle et inattendue, elle finit par être un poil moins sensationnelle et absolument plus inattendue. Ça pour le coup, je l’ai attendue cette fin ! Avec impatience, et en prenant bien soin de me méfier des apparences, et en guettant le moindre détail, etc. Du coup ça n’a pas manqué : j’ai fini par la deviner. Ce qui ne me serait sans doute pas arrivé si quarante personnes ne m’avaient pas expliqué au préalable que je ne trouverai jamais, que c’était impossible de s’y attendre – alors là je m’inscris en faux : c’est totalement possible de s’y attendre, c’est même un retournement final qui a déjà été utilisé auparavant, sauf que c'était au cinoche (mais ne comptez pas sur moi pour vous dire dans quel film, quoique je serais soulagé de savoir que j’ai ruiné le suspens à au moins une autre personne – histoire de me venger).
Bref ! Nous voilà typiquement en face de ce que nous appellerons la Jurisprudence Psychose (ou Jurisprudence Chambre Jaune, si vous préférez). Ce cas d’énigmes tellement incroyables qu’elles finissent pas se casser la gueule, pour la simple et bonne raison que justement elles sont incroyables et que du coup tout le monde trouve vital de vous dire qu’elles sont incroyables. Là où au final, elles ne sont pas forcément si fabuleuses que ça : l’art de Lehane ici, comme celui de Hitchcock ou de Leroux dans les deux classiques suscités, est moins celui du suspens que celui de la digression, de la décoration, de l’atmosphère qui étouffe vos neurones en même temps que les personnages. Un art qui passe fatalement par une écriture somptueuse à changer les plus grands maîtres du roman noir en Harlan Coben. Et ça, ça vaut toutes les fins du monde… parce qu’entre nous, le mieux, dans Shutter Island, ce n’est pas le rebondissement de la page 370… c’est tout ce qu’il y avait avant. Cette ambiance prenante, ces personnages torturés et tous ces couloirs sombres… voici par quoi tient le livre, bien plus que par son intrigue et même si l'auteur essaie (c'est le jeu) de nous faire croire le contraire.
Vous noterez qu’au final je ne vous ai quasiment rien dit sur ce chef-d’œuvre. Une fois de plus vous pourrez dire que je suis sympa : on ne me reprochera pas, à moi, de foutre en l’air le suspens. Idéalement, il faudrait même tout simplement interdire aux gens de parler de Shutter Island. Telle sera donc ma position : lisez-le. Et ne lisez plus les critiques sur le sujet (enfin : après celle-ci, il va sans dire que pour votre serviteur il y aura toujours dérogation).
Évidemment, c’est un peu chiant. Même carrément lourdingue par moment. Et à coup sûr ce n’était pas ce que l’auteur voulait. N’empêche que voilà, c’est comme ça et on y peut grand-chose – à part bien sûr râler de bout en bout comme je l’ai fait durant cette lecture. Quoi ? Pardon ? Bah… pourquoi vous faites cette tête-là ?
Ok, je vois : on vous a dit que Shutter Island était un livre exceptionnel. Du coup quand je dis que c’est un livre chiant vous pensez que j’essaie de vous jouer un vilain tour, ou bien alors de me distinguer de la cohorte de fans convertis au Lehanisme au terme de ce roman. Mais pas du tout, rassurez-vous : Shutter Island est bel et bien l’un des romans les plus prodigieux que j’ai lus ces dernières années (et vous êtes bien placés pour savoir que j’en ai lu beaucoup, c’est dire si je pèse mes mots). De ce point de vue là je suis totalement d’accord avec les dix mille personnes à l’avoir chroniqué depuis sa sortie. A ceci près que je suis saisi depuis deux jours d’une irrépressible envie de toutes les tuer mais bon… on a tous un côté obscur, pas vrai ?
Le fait est que voilà : à trop lire que la fin de Shutter Island est sensationnelle et inattendue, elle finit par être un poil moins sensationnelle et absolument plus inattendue. Ça pour le coup, je l’ai attendue cette fin ! Avec impatience, et en prenant bien soin de me méfier des apparences, et en guettant le moindre détail, etc. Du coup ça n’a pas manqué : j’ai fini par la deviner. Ce qui ne me serait sans doute pas arrivé si quarante personnes ne m’avaient pas expliqué au préalable que je ne trouverai jamais, que c’était impossible de s’y attendre – alors là je m’inscris en faux : c’est totalement possible de s’y attendre, c’est même un retournement final qui a déjà été utilisé auparavant, sauf que c'était au cinoche (mais ne comptez pas sur moi pour vous dire dans quel film, quoique je serais soulagé de savoir que j’ai ruiné le suspens à au moins une autre personne – histoire de me venger).
Bref ! Nous voilà typiquement en face de ce que nous appellerons la Jurisprudence Psychose (ou Jurisprudence Chambre Jaune, si vous préférez). Ce cas d’énigmes tellement incroyables qu’elles finissent pas se casser la gueule, pour la simple et bonne raison que justement elles sont incroyables et que du coup tout le monde trouve vital de vous dire qu’elles sont incroyables. Là où au final, elles ne sont pas forcément si fabuleuses que ça : l’art de Lehane ici, comme celui de Hitchcock ou de Leroux dans les deux classiques suscités, est moins celui du suspens que celui de la digression, de la décoration, de l’atmosphère qui étouffe vos neurones en même temps que les personnages. Un art qui passe fatalement par une écriture somptueuse à changer les plus grands maîtres du roman noir en Harlan Coben. Et ça, ça vaut toutes les fins du monde… parce qu’entre nous, le mieux, dans Shutter Island, ce n’est pas le rebondissement de la page 370… c’est tout ce qu’il y avait avant. Cette ambiance prenante, ces personnages torturés et tous ces couloirs sombres… voici par quoi tient le livre, bien plus que par son intrigue et même si l'auteur essaie (c'est le jeu) de nous faire croire le contraire.
Vous noterez qu’au final je ne vous ai quasiment rien dit sur ce chef-d’œuvre. Une fois de plus vous pourrez dire que je suis sympa : on ne me reprochera pas, à moi, de foutre en l’air le suspens. Idéalement, il faudrait même tout simplement interdire aux gens de parler de Shutter Island. Telle sera donc ma position : lisez-le. Et ne lisez plus les critiques sur le sujet (enfin : après celle-ci, il va sans dire que pour votre serviteur il y aura toujours dérogation).
👑 Shutter Island
Dennis Lehane | Bantam Books, 2003