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Evidemment on a toujours vite fait de s’écrier la main sur le cœur que les genres littéraires n’existent pas, qu’on n'aime pas les étiquettes, qu’on ne range pas un auteur dans une case. Belles promesses que tout cela, puisque finalement on passe la moitié de notre vie à le faire, ne fût-ce que par commodité lorsqu’il s’agit de présenter un livre à quelqu’un ne le connaissant pas.
C’est seulement lorsqu’on se retrouve face à un roman comme celui-ci qu’on prend réellement conscience de ce que c’est qu’une classification ne servant à rien. The Book of Ash n’appartient à aucun genre. Ou bien à tous à la fois. Pour vous en donner idée, mieux vaut encore essayer de vous faire imaginer un personnage à la Irving catapulté dans un univers à la Houellebecq. C’est bon ? Oui ? Ok, alors maintenant vous pouvez recommencer, parce que ça ne désigne en fait que les cent premières pages…
Le héros de The Book of Ash ne s’appelle pas Ash. Il s’appelle Cooper James. Ash, c’est le nom qu’il portait quand il était gosse. Il en a changé quand son père l’a abandonné. Et ça ne l’a pas traumatisé outre mesure. A présent il a une trentaine d’années, et comme tout adulte digne ce nom il a bâti une vie aux antipodes de celle de ses parents : alors qu’il a passé la moitié de son enfance dans une communauté hippie, il est devenu programmeur informatique dans un complexe militaire. Il ne peut pas trop en dire plus sur ce point, pas tellement qu’il voudrait pas – c’est juste qu’à cause du secret défense lui-même ne sait pas exactement quel est son travail.
Un jour il y a une alerte et toute la boite est évacuée. Ca ne le traumatise pas outre mesure, car Cooper James est un jeune homme nonchalant qui n’a pas grand-chose à foutre de grand-chose. Faut dire aussi que c’est une vraie grosse larve, aussi lâche que grande gueule, du genre qui jette des boulettes de papier dans le dos de son chef de section mais préfèrerait mourir plutôt que de lui dire Non. Déjà qu’il n’est même pas capable de dire à sa jolie collègue Liz qu’il en pince pour elle… qu’il n’est pas capable de quoique ce soit, d’ailleurs. Enfin jusqu’à maintenant. Parce que la vie lui réserve une drôle de mise à l’épreuve : la raison pour laquelle tout le monde a été évacué, c’est qu’on a envoyé à la base un colis bizarre adressé à Monsieur Cooper James. Une boite à café pleine d’une poudre n’ayant pas grand-chose à voir avec la torréfaction : il s’agit des cendres de ce fameux père qu’il n’a plus vu depuis vingt ans, ordure avérée doublée d’un sculpteur génialement frapadingue…
… et c’est ici que nous cueillons Cooper James, étonnant personnage sur les frêles épaules duquel tiennent une demi-douzaines d’intrigues aussi burlesques les unes que les autres. De la satire sociale à l’étude de caractères, de la comédie romantique au thriller barré, James Flint touche à tout et ne foire rien. Virtuose de l’humour à froid, il croque ses personnages avec un mélange d’ironie et de tendresse qui fait mouche presqu’à tous les coups, détourne les codes du roman initiatique et change ce qui aurait pu n’être qu’une banale quête du père en une odyssée délirante qui ne manquera pas d’évoquer Will Self au sommet de son art.
Que de compliments ! me direz-vous. Eh bien oui, mais que voulez-vous que j’y fasse ? The Book of Ash est un livre absolument réjouissant, remarquablement écrit et rythmé en dépit d’une ou deux longueurs dont nous ne tiendrons absolument pas rigueur à Flint : procurer un tel plaisir de lecture n’est pas donné au premier venu, et finalement c’est ça qui compte.
Evidemment on a toujours vite fait de s’écrier la main sur le cœur que les genres littéraires n’existent pas, qu’on n'aime pas les étiquettes, qu’on ne range pas un auteur dans une case. Belles promesses que tout cela, puisque finalement on passe la moitié de notre vie à le faire, ne fût-ce que par commodité lorsqu’il s’agit de présenter un livre à quelqu’un ne le connaissant pas.
C’est seulement lorsqu’on se retrouve face à un roman comme celui-ci qu’on prend réellement conscience de ce que c’est qu’une classification ne servant à rien. The Book of Ash n’appartient à aucun genre. Ou bien à tous à la fois. Pour vous en donner idée, mieux vaut encore essayer de vous faire imaginer un personnage à la Irving catapulté dans un univers à la Houellebecq. C’est bon ? Oui ? Ok, alors maintenant vous pouvez recommencer, parce que ça ne désigne en fait que les cent premières pages…
Le héros de The Book of Ash ne s’appelle pas Ash. Il s’appelle Cooper James. Ash, c’est le nom qu’il portait quand il était gosse. Il en a changé quand son père l’a abandonné. Et ça ne l’a pas traumatisé outre mesure. A présent il a une trentaine d’années, et comme tout adulte digne ce nom il a bâti une vie aux antipodes de celle de ses parents : alors qu’il a passé la moitié de son enfance dans une communauté hippie, il est devenu programmeur informatique dans un complexe militaire. Il ne peut pas trop en dire plus sur ce point, pas tellement qu’il voudrait pas – c’est juste qu’à cause du secret défense lui-même ne sait pas exactement quel est son travail.
Un jour il y a une alerte et toute la boite est évacuée. Ca ne le traumatise pas outre mesure, car Cooper James est un jeune homme nonchalant qui n’a pas grand-chose à foutre de grand-chose. Faut dire aussi que c’est une vraie grosse larve, aussi lâche que grande gueule, du genre qui jette des boulettes de papier dans le dos de son chef de section mais préfèrerait mourir plutôt que de lui dire Non. Déjà qu’il n’est même pas capable de dire à sa jolie collègue Liz qu’il en pince pour elle… qu’il n’est pas capable de quoique ce soit, d’ailleurs. Enfin jusqu’à maintenant. Parce que la vie lui réserve une drôle de mise à l’épreuve : la raison pour laquelle tout le monde a été évacué, c’est qu’on a envoyé à la base un colis bizarre adressé à Monsieur Cooper James. Une boite à café pleine d’une poudre n’ayant pas grand-chose à voir avec la torréfaction : il s’agit des cendres de ce fameux père qu’il n’a plus vu depuis vingt ans, ordure avérée doublée d’un sculpteur génialement frapadingue…
… et c’est ici que nous cueillons Cooper James, étonnant personnage sur les frêles épaules duquel tiennent une demi-douzaines d’intrigues aussi burlesques les unes que les autres. De la satire sociale à l’étude de caractères, de la comédie romantique au thriller barré, James Flint touche à tout et ne foire rien. Virtuose de l’humour à froid, il croque ses personnages avec un mélange d’ironie et de tendresse qui fait mouche presqu’à tous les coups, détourne les codes du roman initiatique et change ce qui aurait pu n’être qu’une banale quête du père en une odyssée délirante qui ne manquera pas d’évoquer Will Self au sommet de son art.
Que de compliments ! me direz-vous. Eh bien oui, mais que voulez-vous que j’y fasse ? The Book of Ash est un livre absolument réjouissant, remarquablement écrit et rythmé en dépit d’une ou deux longueurs dont nous ne tiendrons absolument pas rigueur à Flint : procurer un tel plaisir de lecture n’est pas donné au premier venu, et finalement c’est ça qui compte.
👍👍👍 The Book of Ash [Électrons libres]
James Flint | Penguin, 2004