...
« Dans leur hystérie collective, persuadés d'exorciser leurs démons à travers ceux du succube, d'aucuns ne se rendent pas compte que le corps criblé de partout ne répond plus aux agressions, que la femme immolée gît sans vie, à moitié ensevelie, tel un sac d'horreur jeté aux vautours. »
Dès le premier chapitre le ton est donné : en plein Kaboul d'avant la « chute » des talibans, l'auteur métamorphose le lecteur en spectateur d'un lynchage public. Ouverture étrange et déroutante : alors qu'on s'attendrait à être retourné par l'horreur d'une telle scène, on ne ressent quasiment rien. Mais que se passe t'il donc ? L'écriture puissante de Yasmina Khadra serait-elle devenue complètement terne ?
L'on suit alors les destins croisés de deux couples que tout oppose, deux couples tout autant condamnés à plus ou moins court terme au cœur de cette ville dévastée, chaotique, que l'amour semble avoir depuis longtemps déserté. Croisés au sens littéral du terme : qui vont chacun dans une direction opposée.
Moshen, impavide, pourtant si enthousiaste et si courageux de prime abord... avance irrémédiablement vers l'Enfer et la tragédie. De l'autre côté, Aqit le désolé court en dépit de lui-même vers cet espoir dont il n'osait plus rêver. Le contraste est saisissant ; leur destinées respectives, bouleversantes.
👍👍 Les Hirondelles de Kaboul
Yasmina Khadra | Julliard, 2002