Le second roman (culte) de Russell Banks a de quoi ravir tant il se situe à un carrefour d'influences pour le moins... alléchantes. Jugez plutôt : un point de départ évoquant tout à la fois le Brautigan de Tokyo Montana Express et le Lewis (on en parlait justement il y a deux jours) de Main Street d'une part ; une construction gigogne rappelant immanquablement le Faulkner (révolutionnaire) de Go Down, Moses d'autre part. Soit donc, en décodé : une histoire en forme de séquences au sein d'un trailerpak (c'est à dire, littéralement, d'un terrain de caravaning « habitable »), successions de vignettes à croquer tenant tout autant du roman que du recueil de nouvelles. De quoi saliver en soi, et plus encore lorsqu'on sait que Banks excelle dans le registre de la nouvelle - ses quatre « vrais » recueils (notamment Searching for Survivors & The Angel on the Roof ) comptant parmi ce qu'il a fait de tout meilleur.
Douze mobile-homes constituant un petit village (youpi) qui ne dit pas son nom, une étrange éleveuse de cochons dindes venant s'installer au numéro onze et éveillant (comme de juste) la méfiance de la communauté... tous les ingrédients sont réunis pour déboucher sur :
- une œuvre tragicomique réjouissante ;
... ou dans le doute sur :
- une satire au vitriol de le société américaine.
Pourtant, curieusement, Russell Banks semble refuser de choisir entre les deux, sautant de l'un à l'autre avec une évidente délectation et brouillant les pistes à loisir. C'est seulement en cours de lecture que l'on comprend vraiment l'idée : l'auteur a soigneusement « casté » les habitants du trailerpark de Granite State, recréant un étrange échantillon représentatif des classes américaines les plus défavorisées... pour un résultat évidemment un brin superficiel, et que je te prends du blanc et du noir, et que si je mets un vieux je dois mettre aussi un jeune... etc.
En résulte un roman à la fois touchant et agaçant, très représentatif des obsessions banksiennes (le côté voice of the voiceless, les chroniques de la solitude ordinaire...) et en même temps assez éloigné, dans ce ton très bon-enfant, du Russell Banks qu'on aime tant (celui très héroïque de Clousplitter ou bien celui - plus acide - de Rule of Bone). Notre homme est-il un grand humaniste ou bien un supergentil superconsensuel ? Evidemment quand on connaît les ouvrages suivant la question ne se pose pas vraiment. Mais face au seul Trailerpark, le lecteur de passage sera autorisé à s'interroger (faudra juste qu'il révise d'urgence l'a priori). Indicateur somme toute révélateur de ce que j'ai ressenti à cette lecture 1 : « Trailerpark », dans son univers et dans son rapport très (trop ?) compassionnel, est probablement le roman de Banks qui a le plus influencé Richard Russo (c'est vraiment troublant quand on connaît ses ouvrages et qu'on lit ou relit Trailerpark après coup).
Reste donc, outre un concept tout à fait pertinent, l'écriture de Banks - a priori majestueuse dès ses tous débuts. C'est amplement suffisant.
Douze mobile-homes constituant un petit village (youpi) qui ne dit pas son nom, une étrange éleveuse de cochons dindes venant s'installer au numéro onze et éveillant (comme de juste) la méfiance de la communauté... tous les ingrédients sont réunis pour déboucher sur :
- une œuvre tragicomique réjouissante ;
... ou dans le doute sur :
- une satire au vitriol de le société américaine.
Pourtant, curieusement, Russell Banks semble refuser de choisir entre les deux, sautant de l'un à l'autre avec une évidente délectation et brouillant les pistes à loisir. C'est seulement en cours de lecture que l'on comprend vraiment l'idée : l'auteur a soigneusement « casté » les habitants du trailerpark de Granite State, recréant un étrange échantillon représentatif des classes américaines les plus défavorisées... pour un résultat évidemment un brin superficiel, et que je te prends du blanc et du noir, et que si je mets un vieux je dois mettre aussi un jeune... etc.
En résulte un roman à la fois touchant et agaçant, très représentatif des obsessions banksiennes (le côté voice of the voiceless, les chroniques de la solitude ordinaire...) et en même temps assez éloigné, dans ce ton très bon-enfant, du Russell Banks qu'on aime tant (celui très héroïque de Clousplitter ou bien celui - plus acide - de Rule of Bone). Notre homme est-il un grand humaniste ou bien un supergentil superconsensuel ? Evidemment quand on connaît les ouvrages suivant la question ne se pose pas vraiment. Mais face au seul Trailerpark, le lecteur de passage sera autorisé à s'interroger (faudra juste qu'il révise d'urgence l'a priori). Indicateur somme toute révélateur de ce que j'ai ressenti à cette lecture 1 : « Trailerpark », dans son univers et dans son rapport très (trop ?) compassionnel, est probablement le roman de Banks qui a le plus influencé Richard Russo (c'est vraiment troublant quand on connaît ses ouvrages et qu'on lit ou relit Trailerpark après coup).
Reste donc, outre un concept tout à fait pertinent, l'écriture de Banks - a priori majestueuse dès ses tous débuts. C'est amplement suffisant.
👍 Trailerpark
Russell Banks | Harper Perennial, 1981
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