Mad Men - Le meilleur soap de toute l'histoire de la télévision

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Faut-il que les commentateurs de tout crin soient aigris et blasés pour écrire des choses aussi consternantes que ce qu'on a pu lire ici ou là ces derniers mois à propos d'un des chouchous du Golb, à savoir que Ouais bof, la saison 2 de Mad Men c'est nul, ça vire soap (avec la moue de dégoût qui va bien). Vous m'en direz tant ? Ainsi donc dès que les sentiments de personnages sont placés au cœur de l'intrigue on nagerait en plein soap ? Au moins ce type de réflexion est-il rassurant : ceux (nombreux) qui l'ont énoncée n'ont jamais regardé un soap plus de cinq minutes dans toute leur vie (ce dont on ne peut les blâmer). Sans quoi ils sauraient que le genre est régit par bien d'autres codes que le concept plaçant l'amour au centre des débats.

Que tout le monde se rassure donc : Mad Men, meilleure série de 2007, n'est pas devenu un ersatz d'Amour, Gloire & Beauté en 2008. En revanche, elle s'inscrit c'est certain dans l'héritage des prime time soap à la Dallas (une très bonne série, soit dit en passant), dans sa première comme dans sa seconde saison. Ce qui ne l'empêche nullement de conserver toute sa force de frappe satirique, n'hésitant pas par moments à aller encore plus loin que l'année précédente et pour cause : désormais, les femmes sont clairement au centre du jeu - le moins qu'on puisse dire c'est que le trio Peggy - Betty - Joan (renforcé par la nouvelle venue Jayne) ne manque pas de panache. Et les scénaristes de radiographier leur condition avec la même virtuosité qu'ils exploraient autrefois la psyché torturée de Don Draper.

Draper, justement... c'est le gros point noir de cette seconde saison, puisqu'il se retrouve fatalement en retrait désormais que son secret a été révélé et son mystère dissout. On pouvait s'y attendre : initialement prévue pour être un simple feuilleton d'été, la saison 1 de Mad Men se devait de répondre dans le final à toutes les questions formulées au départ. Du coup notre brave Don erre désormais comme une âme en peine, et inévitablement la série y a perdu de son pouvoir de fascination. Tant pis alors : DD passera progressivement au second plan, dépassé sur sa droite par une Peggy qui se révèle de plus en plus et, sur sa gauche par Jimmy, comique triste et provocateur né détonnant complètement dans l'univers volontairement lisse du programme.

Lisse, mais pour combien de temps encore ? C'est la question qu'on se pose au terme de cette seconde saison tout à fait remarquable. Car afin de respecter la bonne marche de toute bonne série, les scénaristes sont contraints de faire évoluer leur personnages... qui du coup ressemblent de moins en moins à des gens de leur époque, plutôt à des archétypes de marginaux dans les sixties ; qui parce qu'elle est devenue mère célibataire, qui parce qu'il refuse de fonder la parfaite petite famille américaine, qui parce qu'il peine de plus en plus à masquer son homosexualité... etc. A ce tarif-là d'ici deux séquences les caractères auront gagné en aventures et en nuances ce qu'ils auront perdu en représentativité, et la série ne présentera plus que des personnages tout à fait en avance sur le temps.

Reste que pour l'heure, en dépit de ces bémols inhérents au format plus qu'ils ne résultent de la responsabilité des auteurs, l'édifice reste encore largement supérieur à ce que peut proposer la concurrence en matière de séries. Entre la satire sociale plus féroce que jamais, le couple Don / Betty qui continue de s'effondrer pour notre plus grand plaisir , et la reconstitution toujours aussi brillante... il y a là bien assez pour combler le spectateur le plus exigeant. Pour une seconde saison, c'est bien plus qu'honorable !

👍👍 Mad Men (saison 2)

créée par Matthew Weiner

AMC, 2008