jeudi 23 avril 2009

PJ Harvey & John Parish - Les Premières fois sont rarement les meilleures...

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Je me suis posé la question en ces termes durant plusieurs semaines : fallait-il ou non parler du nouvel album de PJ Harvey & John Parish, alors que tant d'autres (Arbobo et The Civil Servant en tête) s'en sont parfaitement acquittés ? N'y a-t-il pas eu plus essentiel ces dernières semaines ?... Sans doute. Pour la première fois depuis très longtemps, un disque de la Déesse de la blogosphère déçoit franchement. Mais n'est-ce pas un évènement en soi ?

Alors autant débuter par les griefs, à commencer par celui - évident - du manque d'homogénéité. Ce qui ne manque d'ailleurs pas de piquant : conçu dans le plus grand secret, enveloppé d'une aura de mystère jusque dans les semaines précédant sa publication, le dernier album de l'icône a la particularité de sembler tout aussi mystérieux après des dizaines d'écoutes. Comme s'il refusait de se révéler, de s'abandonner complètement à l'auditeur. On y entre douloureusement, plus perplexe qu'enthousiaste, excité par tel passage et rebuté par d'autres. On se demande où elle va, notre Polly. Après presque un mois à chercher la cohérence, on n'a toujours pas le moindre début de réponse. Pour la première fois en dix-sept années et dix albums, PJ Harvey vient de publier un opus n'ayant pas de couleur propre. Rien de dramatique en soi : des milliers d'artistes publient chaque année des albums n'ayant pas de couleur particulière, d'habiles collections de chansons qu'on ne juge pas pour autant sévèrement (sans quoi on se priverait de l'essentiel de la production contemporaine). Sauf que voilà : PJ Harvey, justement, nous a habitués à ce que chacun de ses disques développe une démarche esthétique précise (et parfois totalement inédite), les cas les plus évidents étant la pop racée de Stories from the City, Stories from the Sea ou le piano psychédélique du précédent White Chalk. Au risque de sembler parfois antinomiques les uns par rapport aux autres (seul et unique reproche qu'on ait jamais trouvé à lui faire jusqu'ici). Un album de PJ Harvey, c'est la garantie d'être surpris, et c'est très bien comme ça. Le fan de PJ Harvey sectaire, de fait, n'existe pas.

Tout le problème soulevé par A Woman, A Man, Walked By étant justement que la seule bonne raison pour laquelle il surprend c'est parce qu'il n'est en rien surprenant. Oh bien sûr, sur les premiers morceaux, l'idole des blogueurs expérimente un chant dissonant tout à fait singulier. Mais on est ici dans le strict domaine du paquet cadeau (et encore : plutôt du bolduc, puisque ce n'est le cas que le temps d'une poignée de chansons - même pas les meilleures). Pour le reste, chaque titre sans exception aurait parfaitement pu trouver sa place sur l'un ou l'autre des deux opus précédents (White Chalk, donc, et Uh Huh Her). A part peut-être "Sixteen, Fifteen, Fourteen", titre country-folk assez inhabituel, le reste semble avoir été conçu (sciemment ? C'est toute la question...) comme un genre de "best of sonique", retraçant par l'abondance des styles abordés la carrières sinueuse d'une des artistes majeures de notre temps. Pop atmosphérique et baroque ("Leaving California"), electro marécageuse ("The Chair" et "April" suivent l'axe Is This Desire? / White Chalk), heavy-rock plantureux et rageur (Polly n'a probablement jamais autant sonné Nick Cave que sur le titre éponyme), noise braillarde ("Pig Will Not")... toutes les précédentes incarnations de la songwriteuse défilent dans nos oreilles sans qu'aucune prenne jamais le pas sur l'autre, au point qu'on peine à adhérer parfaitement et qu'on s'interroge ; car de deux choses l'une :

- soit la démarche est trop alambiquée pour qu'on la pénètre, auquel cas c'est un album difficile... et partiellement raté.

- soit la démarche était : pas de démarche, auquel cas c'est un brin facile, et ni plus ni moins raté que dans l'hypothèse précédente.

Dans les deux cas on reste un peu sur sa faim, et on s'inquiète de la présence de John Parish en co-heading, presque mensongère en fait : ce n'est pas un album de PJ Harvey & John Parish (en tout cas pas au même titre que le génial et mésestimé Dancehall at Louse Point de 1996), c'est un album de PJ Harvey featuring John Paris. Impossible de dire ce que ce disque aurait été sans lui... mais impossible aussi de ne se pas se demander dans quelle mesure Polly n'aurait pas pu enregistrer cet album toute seule.

Bien entendu il n'est pas question de jeter cet album à la poubelle pour autant. Le côté spontané de l'affaire, s'il est moins fascinant sur le long terme, n'est pas moins dénué de charme. Et bien entendu, plusieurs chansons exceptionnelles ("A Woman, A Man..." est monumentale, "The Chair", un diamant brut) sont venues se glisser dans le lot. Il n'empêche qu'après des semaines d'écoutes attentives et répétées, impossible de se départir d'une impression d'inachevé à laquelle PJ Harvey ne nous avait pas habitués (ni John Parish du reste). Comme pour l'In Rainbows de Radiohead il y a deux ans, A Woman, A Man, Walked By rappelle avec une pointe d'amertume qu'aucune série ne dure, et qu'il fallait bien un jour que le nouvel album de Harvey ne soit pas dans le trio de tête à la fin de l'année.


A Woman, A Man, Walked By 
PJ Harvey & John Parish | Island, 2009

22 commentaires:

  1. Eh bien, voici qui résume assez bien mon impression... Aucun morceau ne m'a durablement marqué... Je trouve le disque bien, mais, au niveau d'excellence de PJ habituellement, il est un peu en-deça des autres... Il donne l'impression d'un album un peu trop "arty", un peu trop réfléchi...
    Donc disque un poil décevant, oui... À ceci près que, contrairement au reste de l'univers, je suis assez peu fan de White Chalk, album, qui, lui, m'avait bel et bien déçu (ce qui n'enlève rien à son ambition et à son originalité).

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  2. Ah put*ù^ déçu je suis, mais à un point...il a tourné deux fois dans les enceintes et frounch, poubelle !!

    PJ Harvey devrait penser à une sorte de retraite anticipée, histoire de ne pas nous pondre des "trucs" comme ça jusqu'à la fin.

    En ce qui me concerne White Chalk me met toujours autant sur le cul (à part les dernières mesures de "the mountain"...), enfin une prise de risque et un bon gros virage à 180°. C'est un peu le son "Kid A" en fait.

    Bref, passer d'une prise de risque réussie et originale à "ça", que de pas en arrière.


    Dom

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  3. Il semble que nous soyons tous plus ou moins d'accord. J'aime beaucoup PJ, mais je vous trouve presque indulgent, avec elle. Comme Dominique, je trouve que cet opus relève du pas en arrière. Il manque, de plus, cruellement, de bonnes chansons. Les deux premiers titres sont vraiment ternes, et les meilleurs moments ressemblent plus à du bricolage sonore, qu'à de la pop ou du rock. Or, PJ Harvey nous a habitué à écrire des chansons prodigieuses, même lorsqu'elle expérimentait par ailleurs (voir "White Chalk", ou "Is this desire ?", son meilleur album).

    BBB.

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  4. Un album mineur qui ne vaut sans doute pas le dernier Lady Gaga LOL
    Sérieusement, c'est vrai qu'on se demande ce que fout Parish dans cette affaire (galère?), il est juste spectateur.
    Bon maintenant, on va arrêter de jouer à l'enfant gâté, ça reste tout de même extrêmement correct (d'où ton 4/6) ;-)
    Attendons le prochain album pour commencer à donner les derniers sacrements XD

    En ce qui concerne In Rainbows, je dois concéder qu'après deux ans d'écoute, j'ai révisé mon jugement. M'enfin, en ce qui concerne ce disque de PJ, contrairement au Radiohead, je ne pense pas en changer par contre.

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  5. Complètement d'accord... Quelques passages vraiment sympa (j'adore la fin de Black hearted love par exemple) mais rien de véritablemetn transcendant...

    Quand je pense que c'est suite à cet album que je vais la voir sur scène pour la première fois... :-/

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  6. Est-ce qu'on peut attaquer pour plagiat un type qui vient extraire au mot près de votre tête ce que vous pensez d'un album ?
    Parce que tout ce que tu as écrit, c'est exactement ce que je me suis dit en écoutant ce PJ...
    La propriété intellectuelle, c'est bien "ce que je pense m'appartient", non ?^^

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  7. Guic the Old, pour te rassurer, sache que PJ Harvey sur scène, ce n'est pas tout à fait comme sur ses albums, qu'elle ne délaisse pas son répertoire au profit du tout dernier disque... Au Grand Rex, pour White Chalk, elle avait ainsi attaqué avec To Bring You My Love, seule à la guitare, et rassurait d'emblée : elle ne passerait pas la soirée derrière un piano... :-)
    Ouais, vivement le Bataclan !

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  8. Je n'arrive pas à avoir un avis fixe sur cet album. Il va falloir encore qques écoutes.
    Je n avais pas aimé la PJ des années 2000 et "white chalk" m'avait réconcilié avec elle. Même si cet album a peu de chance de faire date, je le préfère tout de même à "stories..."

    Concernant Radiohead et "in rainbows", je trouve qu'il se bonifie avec le temps et il fait aujourd'hui d'un de mes préférés du groupe

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  9. Ce qui est cool avec Polly, c'est qu'elle fera toujours l'unanimité dans la blogosphère... même si ce n'est pas dans des termes positifs :-)

    Nyko >>> moi In Rainbows j'avoue que je l'écoute de plus en plus rarement en entier...

    G.T. >>> c'est tout simplement du... plagiat psychique !!! ;-)

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  10. sur scène elle avait été .......................
    (c'est indescriptiblement bon ^^)

    tu es tellement déçu que tu lui mets 4/6, thom, quelle virulence ;-)
    c'est bien la première fois qu'on se dit qu'on gagne ra à écouter PJ harvey en écoute fractionnée, avec une playlist resserrée.
    Car il y a plus d'un morceaux (à commencer par 16, 15, 14) qui relèvera le niveau de presque n'importe quelle playlist rock.

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  11. Eh ouais : parfois la note relativise le texte, parfois le texte relativise la note...

    L'album est décevant, c'est un fait. Maintenant c'est quand même loin d'être la bouze de l'année, c'est même plutôt agréable à écouter, parfois même excitant... mais pas dans le Top 20 du Golb (ni, à mon avis, dans le Top 20 du CDB...).

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  12. ouais ben attends d'en trouver 20 meilleurs, parce pour l'instant la moisson 2009 est pas non plus la meileure qu'on ait connue ;-)

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  13. Euh... n'empeche 2009 démarre plus fort que 2008! Quand même... Non?

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  14. Je suis bien d'accord avec toi, mon Guic'.

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  15. Je te trouve quand même très sévère. Bon, ok, peut-être pas "très" sévère, mais sévère. Comme le dit Arbobo, il y a quelques morceaux grandioses, ou moins cinq ou six. Ce qui fait déjà plus que sur beaucoup d'albums de l'année.

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  16. On n'a pas dû écouter les mêmes albums, alors !

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  17. Dahu Clipperton24 avril 2009 à 10:28

    Ben, je dirais, sans vouloir faire dans la provoc (c'est pas mon genre), que vous faites les enfants gâtés, tout de même.
    A en lire certains (je ne parle pas que pour toi, Thom, hein^^), j'ai l'impresiion que vous l'avez écouté avec trop d'a priori, d'attentes, et on dirait que ça vous a un peu fait passer à côté de l'album... Le côté calculé, trop "réfléchi" ne serait-il pas chez les auditeurs sur ce coup-ci ? ;-)
    Pour ma part, je souscris totalement aux propos de The Civil Servant !

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  18. Je ne sais pas si on la reçu de manière trop "réfléchie", en revanche je ne trouve pas cet album si "réfléchi", au contraire, je le trouve plutôt spontané...

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  19. bon, j'ai fait un bilan d'éape et y'a quand même de quoi écuoter sans trop se faire mal ^^

    même si je vois mal, pour l'instant, qui pourrait contester la 1e place à julie doiron

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  20. Je n'ai pas encore écouté le Doiron... mais Akron/Family s'apprête à publier un chef-d'oeuvre absolu le mois prochain (j'en parlerai la semaine prochaine sur Culturo).

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  21. N'oubliez pas qu'à la sortie de leur album "dance...." était expérimental à l'époque, donc pour cette album, ils poussent plus loin leur expérimentation sonore.
    Je pense pour le prochain album personnel, on retrouvera les bons airs de PJ, pour l'instant, elle se défoule musicalement parlant et de façon inconscient.
    Surtout pour mieux repartir, c'est mon avis.

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  22. Ce que vous dites de Dance est tout à fait exact... mais en revanche, je ne trouve pas du tout A Woman, A Man expérimental, à quelques petites dissonnances vocales près. Niveau expérimentation, il fait même assez pâle figure à côté d'un White Chalk ou d'un Is This Desire?...

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