Il n'y a jamais que deux types de rééditions : le premier type, nous l'avons évoqué la semaine dernière à propos de Radiohead - c'est l'exploitation commerciale pure et simple (de qualité ou non, peu importe) ; le second type, qui nous intéresse aujourd'hui, c'est le travail presque archéologique, l'exhumation de pièces enfouies, méconnues ou mésestimées (voire les deux à la fois), comme par un exemple ce premier album de Nick Cave & The Bad Seeds publié en 1984 sous le titre sarcastique de From Her to Eternity.
From Her (pour les intimes) méritait bien une nouvelle édition tant la précédente, au début des années quatre-vingt-dix, avait saccagé le travail de production de Cave et Harvey. Aucune aspérité, un son totalement étouffé (il fallait sacrément monter le son pour entendre Avalanche)... incompréhensible qu'il ait fallu attendre 2009 pour entendre cet album fondateur avec un son correct - expression d'ailleurs toute relative : on est encore loin du son du vinyle. Mais on s'en rapproche, et si l'on considère l'impact que ce disque aura eu sur la poignée de gens l'ayant entendu à l'époque et s'ébrouant aujourd'hui, impossible de ne pas se féliciter de le voir à nouveau disponible.
From Her (pour les intimes) méritait bien une nouvelle édition tant la précédente, au début des années quatre-vingt-dix, avait saccagé le travail de production de Cave et Harvey. Aucune aspérité, un son totalement étouffé (il fallait sacrément monter le son pour entendre Avalanche)... incompréhensible qu'il ait fallu attendre 2009 pour entendre cet album fondateur avec un son correct - expression d'ailleurs toute relative : on est encore loin du son du vinyle. Mais on s'en rapproche, et si l'on considère l'impact que ce disque aura eu sur la poignée de gens l'ayant entendu à l'époque et s'ébrouant aujourd'hui, impossible de ne pas se féliciter de le voir à nouveau disponible.
Publié quelques mois seulement après la dislocation de Birthday Party, From Her est la suite plus ou moins logique de Junkyard, soit donc un album enregistré en Angleterre mais aux accents pour le moins germaniques, porté par un groupe au line-up fluctuant (ce sont en fait deux versions différentes des Bad Seeds - baptisées à l'époque Nick Cave, Man or Myth? - qui l'ont couché sur bande, toutes deux assemblées autour du trio Cave / Harvey / Adamson avec des nuances de choix nommées Blixa Bargeld, Hugo Race ou Tracy Pew), et tentant d'aérer le chaos musical de l'ultime opus de la fête d'anniversaire. Aération réelle, pour une accessibilité toute relative tant le moindre élément de cet album semble avoir été pensé pour déplaire. Nick Cave beugle du début à la fin, Adams transforme sa basse en quasi instrument à percussions, Harvey cogne sur tout ce qui bouge... et le trio (car c'en est plus ou moins à l'époque - les autres ont encore le statut de guests) d'accoucher de titres aussi improbables qu'excitants ('Cabin Fever!', 'Well of Misery'...), pour la plupart martiaux et presque tous hantés par une atsmophère joyeusement décadente (germanique, on vous dit).
Les titres ressemblent plus souvent à des collages poétiques morbides qu’à des chansons, mais quelques-uns sortent du lot, comme le morceau éponyme, rageur et tendu à l’extrême... seul grand classique figurant sur l'album, mais premier d'une très longue série. Plus fort (dans tous les sens du terme), le groupe le fera dès l'album suivant, The First Born is Dead. From Her to Eternity, pour sa part, remplit parfaitement son rôle de debut-album : il est une carte-visite bruyante et ténébreuse, un trait d'union entre le passé et l'avenir de Cave, louchant d'un côté (finalement, le meilleur titre pour résumer Birthday Party... c'est 'Saint Huck'!, sur le premier Bad Seeds) pour mieux zyeuter de l'autre (la reprise d' 'In the Ghetto' porte déjà la touche typique des ballades caviennes). L'album culte par excellence, ici présenté dans une version enfin raccord avec l'originale de 84 (les faces B. 'The Moon is in the Gutter' et 'In the Ghetto', toutes excellentes qu'elles soient, avaient été intercalées de manière incompréhensible entre les titres "normaux") et enrichi de bonus audio (versions alternatives suffocantes de qualité) ET vidéo ('In the Ghetto' et un mini-film : 'Do You Love Me Like I Love You, part I').
A noter qu'une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, les trois Bad Seeds suivants ont subi le même remarquable lifting (chacun proposant en bonus la suite de 'Do You Love Me...'). Inutile de dire que si toutes les rééditions étaient de cette qualité, le fan n'aurait jamais l'impression qu'on le prend pour une vache à lait (même pas quand ce serait le cas).
👍👍 From Her to Eternity
Nick Cave & The Bad Seeds | Mute, 1984