Dexter, la série dont le méchant est le gentil. On rigole. Un bien joli slogan pour une série parmi les meilleures du moment, aucun doute là-dessus. Mais un slogan un peu mensonger, dont la formulation exacte aurait dû être : Dexter, la série dont le méchant est gentil. Normal : Dexter, c'est quand même une crème d'homme. Certes un peu monolithique dans la première saison, mais de plus en plus humain, aimable et sympathique sur le long terme. Un vrai brave gars qui veille sur sa famille, fait mumuse avec ses gosses et roulera probablement en Picasso dans la prochaine saison. Pas de quoi effrayer un Jim Profit.
Qui ça ? Jim Profit. Son plus digne ancêtre télévisuel, un pur psychopathe à côté de qui Dexter passe pour ce qu'il est en réalité : un super-héros de bande-dessinées tuant certes pour assouvir ses pulsions... mais respectant un code éthique digne du Serment d'Hypocrate. Profit, lui, non seulement n'éprouve pas le moindre sentiment pour quiconque... mais en plus ne sert-il que son propre intérêt, sa propre mégalomanie, manipulant les plus faibles et exterminant sans pitié les plus forts - innocents ou coupables peu lui importe. Ça vous rappelle quelqu'un ? Eh oui : Profit, de l'aveu même de ses créateurs, est largement inspiré de Richard III. Rien que ça. Non que Dexter Morgan soit une version Canada Dry de Jim Profit (quoique l'influence soit prégnante1), simplement le fait est que si vous aimez le second vous avez de grandes chances de vous enthousiasmer pour son ancêtre et les huit épisodes de ses aventures... huit seulement, car le moins qu'on puisse dire est que Profit n'a pas reçu en son temps le même accueil public que Dexter - loin de là. Coupable sans doute d'être trop en avance sur son époque, avec son héros psycho-sociopathe et profondément antipathique (lui), sa réflexion à peine voilée sur la violence de la société américaine et sa satire féroce du libéralisme. Lorsque le pilote est diffusé sur la Fox le 8 avril 1996, il déchaîne les passions et entraine l'implosion du service courrier de la chaine : c'est quoi ce type odieux et sans scrupules, qui manipule les gens comme des pions sur son immense jeu vidéo représentant l'organigramme de l'entreprise, n'hésite pas à tuer pour arriver à ses fins et couche avec sa belle-mère ??? L'implacable machine de la censure se met en branle ; d'un côté, dès le second épisode les audiences chutent considérablement, de l'autre, les lettres de spectateurs indignés se multiplient. Au bout de trois semaines, la Fox cède : Profit est purement et simplement déprogrammée. A ce jour, le public américain n'a toujours pas vu les quatre derniers épisodes (à part évidemment en dévédé), contrairement au public français qui eut la primeur de découvrir la fin de la série en exclusivité mondiale. Un des plus énormes succès de Jimmy à ce jour, Profit ayant été précédée d'une aura de soufre incomparable... et de critiques dithyrambiques.
Car les aventures de ce jeune yuppie prêt à tout et même plus pour arriver à la tête de l'entreprise Graysen & Graysen ne sont pas uniquement provocatrices et choquantes... elles comptent aussi accessoirement parmi ce que la télévision a produit de meilleur en la matière, véritables précurseuses tant de Dexter que de Nip/Tuck (le côté violemment sexe de l'affaire) ou de The Shield (chronologiquement parlant, Jim est l'un des tous premiers héros-pourris de l'histoire de la télévision). Portées par un acteur exceptionnel (Adrian Pasdar - le futur Homme Qui Vole de Heroes), elles constituent une plongée effarante dans l'univers sans pitié des chefs d'entreprises et autres conseils d'administration, comme si les auteurs avaient décidé de faire exploser Dallas en vol. Il faut dire qu'il y a du J.R. en Jim Profit, du J.R. et aussi pas mal de Patrick Bateman et de Parker Lewis. Un mélange détonnant qui file le vertige. Huit épisodes durant on passe son temps à se demander jusqu'où ils vont oser aller... et ils vont aller très loin ! Rien que dans le pilote Profit tue deux personnes, en fait chanter deux ou trois, séduit deux femmes dont sa belle-mère (et encore : les scénaristes voulaient au départ que ce soit sa propre mère mais ont été censurés par la chaîne)... et tout ça mes amis, c'est du pipi de chat comparé à ce qui suit. Profit n'a aucune morale ni limite, à côté de lui Christian Troy est un bon père de famille et Vic Mackey un compagnon d'Emmaüs. Et tout ça pourquoi ? Même pas pour la vengeance (le public aurait compris), même pas pour l'argent (ce serait trop excusable)... juste pour le pouvoir, encore le pouvoir et toujours le pouvoir - et aussi bien sûr parce qu'il est un cas d'école en matière de psychopathologie. Bizarrement on en vient d'ailleurs à se dire que l'arrêt prématuré de la série n'était peut-être pas plus mal : un tel rythme multiplié pas trois saisons eût été intenable, et les auteurs auraient probablement cédé à la surenchère. En l'état, Profit demeure une mini-série incontournable qui, ironie du sort, risquera de ne plus choquer grand-monde en 2009.
C'est que cette série, si elle est parfaitement en phase avec les thématiques contemporaines et se boit comme du petit lait en période de crise financière, n'en a pas moins pris un petit coup de vieux, principalement à cause d'un style narratif un peu daté (petits jingles lourdauds entre les scènes, personnages secondaires assez peu fouillés). Profit vaut avant-tout pour son personnage devenu culte (à juste titre), dont Dexter, loin d'être le fils spirituel, apparait plutôt comme la version aboutie : le psychopathe devenu une figure si banalisée qu'il peut désormais être sympathique, là où Jim n'inspire que l'antipathie au spectateur et s'avère finalement bien plus angoissant, en cela qu'il n'a pas de double-vie et avance le plus souvent à visage découvert... ce que la société autour de lui semble presque tolérer. Comparer les deux souligne en creux combien la violence à l'écran s'est institutionnalisée depuis treize ans : Dexter est bien plus gore, mais tout le monde trouve ça très chouette.
Qui a dit que les mœurs n'évoluaient plus ?
(1) Si vous ne le croyez pas comparez la séquence où Dexter provoque Doakes au bureau dans la saison 2 avec celle du second épisode de Profit, où celui-ci provoque Jack... c'est exactement la même.
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Qui ça ? Jim Profit. Son plus digne ancêtre télévisuel, un pur psychopathe à côté de qui Dexter passe pour ce qu'il est en réalité : un super-héros de bande-dessinées tuant certes pour assouvir ses pulsions... mais respectant un code éthique digne du Serment d'Hypocrate. Profit, lui, non seulement n'éprouve pas le moindre sentiment pour quiconque... mais en plus ne sert-il que son propre intérêt, sa propre mégalomanie, manipulant les plus faibles et exterminant sans pitié les plus forts - innocents ou coupables peu lui importe. Ça vous rappelle quelqu'un ? Eh oui : Profit, de l'aveu même de ses créateurs, est largement inspiré de Richard III. Rien que ça. Non que Dexter Morgan soit une version Canada Dry de Jim Profit (quoique l'influence soit prégnante1), simplement le fait est que si vous aimez le second vous avez de grandes chances de vous enthousiasmer pour son ancêtre et les huit épisodes de ses aventures... huit seulement, car le moins qu'on puisse dire est que Profit n'a pas reçu en son temps le même accueil public que Dexter - loin de là. Coupable sans doute d'être trop en avance sur son époque, avec son héros psycho-sociopathe et profondément antipathique (lui), sa réflexion à peine voilée sur la violence de la société américaine et sa satire féroce du libéralisme. Lorsque le pilote est diffusé sur la Fox le 8 avril 1996, il déchaîne les passions et entraine l'implosion du service courrier de la chaine : c'est quoi ce type odieux et sans scrupules, qui manipule les gens comme des pions sur son immense jeu vidéo représentant l'organigramme de l'entreprise, n'hésite pas à tuer pour arriver à ses fins et couche avec sa belle-mère ??? L'implacable machine de la censure se met en branle ; d'un côté, dès le second épisode les audiences chutent considérablement, de l'autre, les lettres de spectateurs indignés se multiplient. Au bout de trois semaines, la Fox cède : Profit est purement et simplement déprogrammée. A ce jour, le public américain n'a toujours pas vu les quatre derniers épisodes (à part évidemment en dévédé), contrairement au public français qui eut la primeur de découvrir la fin de la série en exclusivité mondiale. Un des plus énormes succès de Jimmy à ce jour, Profit ayant été précédée d'une aura de soufre incomparable... et de critiques dithyrambiques.
Car les aventures de ce jeune yuppie prêt à tout et même plus pour arriver à la tête de l'entreprise Graysen & Graysen ne sont pas uniquement provocatrices et choquantes... elles comptent aussi accessoirement parmi ce que la télévision a produit de meilleur en la matière, véritables précurseuses tant de Dexter que de Nip/Tuck (le côté violemment sexe de l'affaire) ou de The Shield (chronologiquement parlant, Jim est l'un des tous premiers héros-pourris de l'histoire de la télévision). Portées par un acteur exceptionnel (Adrian Pasdar - le futur Homme Qui Vole de Heroes), elles constituent une plongée effarante dans l'univers sans pitié des chefs d'entreprises et autres conseils d'administration, comme si les auteurs avaient décidé de faire exploser Dallas en vol. Il faut dire qu'il y a du J.R. en Jim Profit, du J.R. et aussi pas mal de Patrick Bateman et de Parker Lewis. Un mélange détonnant qui file le vertige. Huit épisodes durant on passe son temps à se demander jusqu'où ils vont oser aller... et ils vont aller très loin ! Rien que dans le pilote Profit tue deux personnes, en fait chanter deux ou trois, séduit deux femmes dont sa belle-mère (et encore : les scénaristes voulaient au départ que ce soit sa propre mère mais ont été censurés par la chaîne)... et tout ça mes amis, c'est du pipi de chat comparé à ce qui suit. Profit n'a aucune morale ni limite, à côté de lui Christian Troy est un bon père de famille et Vic Mackey un compagnon d'Emmaüs. Et tout ça pourquoi ? Même pas pour la vengeance (le public aurait compris), même pas pour l'argent (ce serait trop excusable)... juste pour le pouvoir, encore le pouvoir et toujours le pouvoir - et aussi bien sûr parce qu'il est un cas d'école en matière de psychopathologie. Bizarrement on en vient d'ailleurs à se dire que l'arrêt prématuré de la série n'était peut-être pas plus mal : un tel rythme multiplié pas trois saisons eût été intenable, et les auteurs auraient probablement cédé à la surenchère. En l'état, Profit demeure une mini-série incontournable qui, ironie du sort, risquera de ne plus choquer grand-monde en 2009.
C'est que cette série, si elle est parfaitement en phase avec les thématiques contemporaines et se boit comme du petit lait en période de crise financière, n'en a pas moins pris un petit coup de vieux, principalement à cause d'un style narratif un peu daté (petits jingles lourdauds entre les scènes, personnages secondaires assez peu fouillés). Profit vaut avant-tout pour son personnage devenu culte (à juste titre), dont Dexter, loin d'être le fils spirituel, apparait plutôt comme la version aboutie : le psychopathe devenu une figure si banalisée qu'il peut désormais être sympathique, là où Jim n'inspire que l'antipathie au spectateur et s'avère finalement bien plus angoissant, en cela qu'il n'a pas de double-vie et avance le plus souvent à visage découvert... ce que la société autour de lui semble presque tolérer. Comparer les deux souligne en creux combien la violence à l'écran s'est institutionnalisée depuis treize ans : Dexter est bien plus gore, mais tout le monde trouve ça très chouette.
Qui a dit que les mœurs n'évoluaient plus ?
👍👍👍 Profit
créée par John McNamara & David Greenwalt
FOX, 1996
(1) Si vous ne le croyez pas comparez la séquence où Dexter provoque Doakes au bureau dans la saison 2 avec celle du second épisode de Profit, où celui-ci provoque Jack... c'est exactement la même.
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Excellente série que Profit. Inégale, trop courte, mais vraiment excellente. Je l'ai revue l'an passé - lorsqu'ils l'ont rééditée en dvd - et j'ai été impressionné de voir à quel point elle avait marqué son temps. Il est tout à fait exact que, sans Profit, nous n'aurions sans doute jamais vu The Shield ni Nip/Tuck, et Dexter, probablement pas non plus. Mais même les Soprano, en fait, ont été en grande partie rendus "possibles" par cette série...
RépondreSupprimerCordialement.
J'ai effectivement oublié de citer les Soprano, mais je pense que la phrase "Jim est le premier héros-pourri de l'histoire de la télévision" parle d'elle-même...
RépondreSupprimerOui. Moi, je serais carrément monté à la note maximum. Si on considère comme dit Bloom (et toi dans l'article) tout ce que Profit a apporté aux séries télé, et ce sans l'essoufflement d'autres séries mythiques (et pour cause), pour moi ça mérite 6/6 (4 points dans l'odyssée des séries!) :)
RépondreSupprimerJe connaissais pas du tout!
RépondreSupprimerIntéressant! Merci les gars!
SysTo
Je ne connaissais pas profit mais ça fait envie d'autant que Dexter, j'ai un gros faible... un psychopathe avec le sens de l'honneur, ça fait trop super-héros et j'aime les super héros( au fait il en est où ton article sur batman brother (non pas taper))
RépondreSupprimerSerious Moon >>> 6/6 me paraîtrait excessif... tout ce qui a eu de l'influence n'est pas automatiquement un chef-d'oeuvre absolu. Profit n'est pas une série parfaite (comme je l'ai expliquée). 6/6, cela reviendrait à dire que ça se place au niveau de Twin Peaks, des Soprano, de Six Feet Under... ce qui n'est tout de même pas le cas.
RépondreSupprimerSysT >>> de rien ;-)
yueyin >>> oui... bah avec Profit, niveau super-héros, tu ne seras sans doute pas gâtée (mais les génies du mal sont sympas aussi, non ? :-D) (un article sur qui ? Batquoi ? Homme chauve-souris ? mais qu'est-ce qu'elle raconte ?...)
Sans doute, mais à ce moment-là, on ne met quasiment jamais la note max...
RépondreSupprimerHeu. Réflexion inutile du jour non ?
RépondreSupprimerC'est déjà bien de t'en rendre compte tout seul ;-)
RépondreSupprimerProfit a surtout un épisode pilote absolument extraordinaire. Violent, sulfureux, super dérangeant. Celui-ci et les deux, trois suivants sont terribles. La seconde moitié de la saison est moins passionnante, je trouve.
RépondreSupprimerCe n'est pas totalement faux, mais je crois que c'est principalement parce qu'elle devait introduire une suite de saison qui n'a jamais pu être tournée. Un ralentissement narratif pour "poser le système" avant de le faire voler en éclat...
RépondreSupprimerouais je connais de nom cette série.
RépondreSupprimerEn fait (attention je préviens tout de suite), ce que j'avais surtout retenu dans les articles (n'ayant pas encore vu à ce jour la série) c'est le fait que le personnage principal dorme nu... dans un carton.
Élément tout sauf secondaire s'il en est et qui le rends tout de suite fortement sympathique à mes yeux. (encore que agrémenter le carton de litière pour chat aurait été plus judicieux, m'enfin bon... encore que la litière pourrait risquer de gratter les fesses de Jim...)
Oui... en fait je l'avais pas dit parce que je voulais ménager le suspens (vu que c'est l'image finale du pilote, et que quand elle survient tout le monde tombe de sa chaise, en général).
RépondreSupprimer(mince, pour une fois que tu fais un commentaire en rapport avec l'article, ah ah ah)
(sinon on t'attend toujours sur les 90's ;-)
ah ah ah mais j'ai jusqu'au 9 juin il me semble, non?
RépondreSupprimerJ'ai besoin de temps, voilà tout... :P
Nan mais sinon à quoi ça servirait les deadlines? :D
C'est juste, c'est juste. C'est vrai que d'ici le 9 tu as, par exemple, largement le temps de voir les huit épisodes de Profit ;-)
RépondreSupprimerJe suis trop nulle en séries, télé, films... je ne connais pas ce Dexter, même si comme tout le monde j'ai vu les affiches partout...
RépondreSupprimerJe suis en train de découvrir ça. En effet c'est terrible (et vive les conseils du golb!!)
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