vendredi 12 juin 2009

Siouxsie & The Banshees - Inabouti mais fascinant

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C'est l'histoire d'un album bizarre, souvent incompris, inabouti mais tout à fait fascinant.

Son histoire est évidemment connue : c'est celle de deux groupes, The Cure et Siouxsie & The Banshees, aux trajectoires parallèles et à l'art bien souvent consanguin, qui l'espace d'une brève période (deux ans) se retrouveront à forniquer outrancieusement pour donner naissance à une poignées d'albums cultes... et sacrifiés sur l'autel de leurs classiques. Dès 1979, bien sûr, Robert Smith est très proche des Banshees (The Cure dans sa toute première incarnation assura l'ouverture de la tournée Join Hands), assurant un bref intérim' au sein des dix-mille line-up siouxsiens à précéder l'arrivée de Budgie et John McGeogh (déjà à l'époque les Banshees sont en passe de devenir les James Bond du rock'n'roll : les guitaristes et compositeurs se succèdent, laissant à chaque fois une trace plus ou moins importante dans leur musique, mais surtout sans que jamais la démarche artistique en soit réellement affectée - ce qui n'est pas le moindre des paradoxes). A partir de là, il ne quittera jamais complètement l'entourage du groupe, sincèrement fasciné par lui, et il n'est pas inintéressant de noter que Smith n'était jamais très loin durant l'enregistrement du chef-d'œuvre A Kiss in the Dreamhouse... album qui eut un impact considérable sur son jeu et, plus étonnamment, sur son chant (aussi bizarre que cela puisse sembler lorsqu'on l'écrit, oui, Smith chante un peu comme Siouxsie à cette époque, avec qui elle partage cette scansion à bout de souffle qui en a tant irrité...). Lorsqu'il rejoint les Banshees pour remplacer au pied-levé un McGeogh qui ne reviendra finalement jamais, fin 82, la surprise n'est donc pas considérable... c'est surtout le fait qu'il devienne officiellement guitariste du groupe et qu'il reste un an et demi qui demeure aujourd'hui encore étonnant, quoique moins que ce qu'il fit avec.

Car si Hyaena, unique album studio auquel il participa (*), est un excellent album, il ressemble surtout à une séquelle totalement ratée de The Top, chef-d'œuvre de Cure et quasi album solo de Smith paru quelques mois plus tôt et enregistré à peu près en même temps. C'eut pu être grandiose ; c'est surtout bizarre. Consanguin au sens strict du terme : un brin dégénéré. Smith ayant en grande partie puisé l'inspiration psychédélique de The Top dans A Kiss in the Dreamhouse, la manière dont les Banshees s'inspirent à travers lui du même The Top donne le tournis, aboutissant à un album bancal oscillant en permanence entre le génie ('Belladona', 'Bring me the Head of The Preacher Man') et l'auto-parodie ('We Hunger', 'Blow the House Down'...), le passé ('Poiting Bone') et un avenir qui se tournera vers une pop nettement plus catchy ('Take Me Back', morceau très moyen qui n'effleure d'ailleurs pas la qualité du plus mauvais moment de Tinderbox). Le leader de Cure expliquera plus tard qu'il aurait eu du mal à imposer ses vues (sous entendu : au sein d'un groupe principalement peuplé de caractères pourris), ce qui laisse un peu pantois lorsqu'on connaît sa mégalomanie et son côté tyran... tout en semblant probable lorsqu'on sait que Siouxsie est encore plus carabinée que lui dans le genre (amusant d'ailleurs de noter que l'un et l'autre finirent peu ou prou de la même manière, c'est-à-dire nulle part et assez mal entourés).

Pourtant l'inspiration ne semble pas être le problème majeur de l'album, qui pèche bien plus par manque de nerf que par manque d'idées. 'Dazzle', par ailleurs l'un des meilleurs titres une fois passée une intro assez horripilante, en est un bon exemple, dont les cinq minutes de torpeur ne rappellent le rock psyché que dans son versant stone et rarement dans sa face baroque et colorée. L'orientalisante 'Swimming Horses' est en ce sens plus efficace (et même très bonne, en fait) mais globalement cet aspect se retrouve sur chacun des neuf titres d'un disque manquant énormément de groove et qui a d'ailleurs - mais est-ce vraiment un hasard ? - bien plus vieilli que tous les précédents. Ce en quoi la présente édition ne change pas vraiment la donne, pas plus qu'elle ne propose la mise à niveau qui, parfois, illumine les rééditions de qualité. Excellente idée en revanche que d'avoir recollé à la fin le redoutable single 'Dear Prudence' (une reprise de ce groupe, là, vous savez... les quatre anglais...), tout comme les deux 'Baby Piano', excellentes ébauches de ce qui deviendra plus tard 'Dazzle'.


👍👍 Hyaena [Deluxe]
Siouxsie & The Banshees | Polydor, 1984 [2009 pour la présente édition]


(*) Il joue en revanche sur le mythique Nocturne, mais était-il nécessaire de le préciser ?