[ALERTE : Nos services de sécurités ont évalué le taux de spoil de cet article à 10 %] Certaines césures sont tout à fait artificielles, et celle que j'ai appliquée à Scrubs dans mon précédent article sur le sujet (qui s'arrêtait à la saison cinq) en est un bon exemple. On m'avait pourtant bien dit (et plusieurs fois) que la rupture de ton au sein de la série de Bill Lawrence survenait après le quatrième chapitre - en gros à partir du moment où nos héros n'étaient plus internes et commençaient à voler de leurs propres ailes. Pourtant au terme de la saison 2005-06 (*) cette évidence ne m'a pas sauté au yeux, une non-remarque principalement due au fait qu'elle relevait sacrément le niveau après une saison 2004-05 un peu terne d'une part, et que j'avais sans doute besoin de voir la suite pour le constater d'autre part.
Ce qui est amusant dans le fait que je n'ai pas tout de suite repéré cette césure, c'est que sur le papier faire du moment où nos internes n'en étaient plus le passage symbolique à l'âge adulte... c'était quand même une évidence à la limite de l'enfonçage de porte ouverte. Seulement voilà : si la saison cinq enclenche le processus, on ne devient pas adulte du jour au lendemain ; il existe d'abord tout un chemin de croix à franchir, ce que l'on soit un être humain ordinaire, un personnage de série ou un scénariste de Scrubs. C'est d'ailleurs en grande partie la morale de la septième saison (dont le tournage fut chaotique à cause de nombreuses tensions internes et le résultat, qui plus est saccagé par la grève des scénaristes, plus ou moins raté), résumée assez finement par J.D. : "Moi, je croyais que grandir, ça se faisait automatiquement en vieillissant. Mais en fait non : c'est un choix."
Or cette phrase, toute sage et habile soit-elle, résonne malgré tout comme un authentique aveu d'impuissance de la part des auteurs. Si les trois dernières saisons de Scrubs sont toujours aussi efficaces et si la dernière en date (la huit) s'avère d'excellente facture, elles ont quelque chose de totalement lacunaire en cela qu'un évènement considérable y est passé sous silence : la paternité de J.D., survenue de manière assez abrupte et très (trop) peu exploitée par la suite. Certes, son fils vit avec sa mère. Comme c'est commode ! On aimerait croire que ce gouffre dans le script ait été volontaire, que les scénaristes avaient anticipés un genre de refus de grandir chez J.D... mais le plus probable est surtout qu'ils aient peinés durant deux ans à faire réellement évoluer leur personnage principal, de peur sans doute de faire vaciller l'équilibre d'une série relativement ronronnante durant cette période.
La saison huit, der des ders pour une bonne part du casting, n'en est que plus remarquable. Dans cette dernière ligne droite presqu'impromptue (Zach Braff et Bill Lawrence avaient initialement prévu de mettre la clé sous la porte en 2008), Scrubs prend une ampleur rarement atteinte par un programme à vocation comique (ce qu'elle est du reste de moins en moins), plus sombre, beaucoup plus tendre et si régulièrement émouvante qu'on en éprouverait presque de la culpabilité (mais arrête de pleurer, chéri - ce sont juste des personnages !). Non qu'elle soit infinement supérieure aux deux précédentes : depuis ses débuts en 2001 Scrubs a témoigné d'une constance ne faisant qu'accentuer ses différences par rapport au tout venant des sitcoms, et les saisons six et sept quoiqu'imparfaites sont loin d'être déshonorantes. Mais ce final annoncé de longue date et craint par la plupart des fans se révèle si touchant et si réussi qu'on ne peut s'empêcher d'être submergé par la tristesse...
... et surtout de se demander comment Diable ces foutus scénaristes vont parvenir à poursuivre la série, puisque tel est leur but. A en juger par la qualité globale de ces huit saisons c'est loin d'être impossible, et les nouveaux internes sont plutôt convaincants. Reste que le départ de Zach Braff pose trop de problèmes narratifs pour qu'il ne soit pas évident que quoiqu'il arrive, réussie ou pas, Scrubs ne sera plus jamais comme avant - et qu'on le regrettera à coup sûr.
(*) Vous noterez mes efforts pour ne pas répéter dix fois "saison 5"... ah merde, je viens de le faire !
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Ce qui est amusant dans le fait que je n'ai pas tout de suite repéré cette césure, c'est que sur le papier faire du moment où nos internes n'en étaient plus le passage symbolique à l'âge adulte... c'était quand même une évidence à la limite de l'enfonçage de porte ouverte. Seulement voilà : si la saison cinq enclenche le processus, on ne devient pas adulte du jour au lendemain ; il existe d'abord tout un chemin de croix à franchir, ce que l'on soit un être humain ordinaire, un personnage de série ou un scénariste de Scrubs. C'est d'ailleurs en grande partie la morale de la septième saison (dont le tournage fut chaotique à cause de nombreuses tensions internes et le résultat, qui plus est saccagé par la grève des scénaristes, plus ou moins raté), résumée assez finement par J.D. : "Moi, je croyais que grandir, ça se faisait automatiquement en vieillissant. Mais en fait non : c'est un choix."
Or cette phrase, toute sage et habile soit-elle, résonne malgré tout comme un authentique aveu d'impuissance de la part des auteurs. Si les trois dernières saisons de Scrubs sont toujours aussi efficaces et si la dernière en date (la huit) s'avère d'excellente facture, elles ont quelque chose de totalement lacunaire en cela qu'un évènement considérable y est passé sous silence : la paternité de J.D., survenue de manière assez abrupte et très (trop) peu exploitée par la suite. Certes, son fils vit avec sa mère. Comme c'est commode ! On aimerait croire que ce gouffre dans le script ait été volontaire, que les scénaristes avaient anticipés un genre de refus de grandir chez J.D... mais le plus probable est surtout qu'ils aient peinés durant deux ans à faire réellement évoluer leur personnage principal, de peur sans doute de faire vaciller l'équilibre d'une série relativement ronronnante durant cette période.
La saison huit, der des ders pour une bonne part du casting, n'en est que plus remarquable. Dans cette dernière ligne droite presqu'impromptue (Zach Braff et Bill Lawrence avaient initialement prévu de mettre la clé sous la porte en 2008), Scrubs prend une ampleur rarement atteinte par un programme à vocation comique (ce qu'elle est du reste de moins en moins), plus sombre, beaucoup plus tendre et si régulièrement émouvante qu'on en éprouverait presque de la culpabilité (mais arrête de pleurer, chéri - ce sont juste des personnages !). Non qu'elle soit infinement supérieure aux deux précédentes : depuis ses débuts en 2001 Scrubs a témoigné d'une constance ne faisant qu'accentuer ses différences par rapport au tout venant des sitcoms, et les saisons six et sept quoiqu'imparfaites sont loin d'être déshonorantes. Mais ce final annoncé de longue date et craint par la plupart des fans se révèle si touchant et si réussi qu'on ne peut s'empêcher d'être submergé par la tristesse...
... et surtout de se demander comment Diable ces foutus scénaristes vont parvenir à poursuivre la série, puisque tel est leur but. A en juger par la qualité globale de ces huit saisons c'est loin d'être impossible, et les nouveaux internes sont plutôt convaincants. Reste que le départ de Zach Braff pose trop de problèmes narratifs pour qu'il ne soit pas évident que quoiqu'il arrive, réussie ou pas, Scrubs ne sera plus jamais comme avant - et qu'on le regrettera à coup sûr.
Scrubs
👍 Saisons 6 & 7 (NBC)
👍👍 Saison 8 (ABC)
👍👍 Saison 8 (ABC)
créée par Bill Lawrence | 2006-09
(*) Vous noterez mes efforts pour ne pas répéter dix fois "saison 5"... ah merde, je viens de le faire !
Bon, je suis donc pas seul à avoir versé une larme devant le final...
RépondreSupprimerCa me rassure.
Et en toute sincérité, j'ai même pas envie de jeter un oeil sur cette saison 9 qui s'annonce.
Tout simplement la meilleure série comique du moment (avec How I met, quand même).
RépondreSupprimerD'ailleurs, avec le recul, on sent que How I met est une sitcom post Scrubs...
RépondreSupprimerParce que, bizarrement, les délires de JD ont quand même eu une certaine influence, je trouve.
Dans Friends, on voyait le passé des personnages au cours d'épisodes un peu spéciaux, mais pas en continu, contrairement à certains passages de Scrubs ou aux nombreuses scènes du type de How IMet... qui s'offre à l'occasion de certains passages (au hasard, le CV de Barney) des délires visuels (ou conceptuels) qui a mon avis doivent quand même un peu à Scrubs. En fait, je me dis que Scrubs à donné envie aux scénaristes de sitcoms de s'offrir les moyens de faire quelque chose qui soit un peu plus qu'un sitcom conventionnel...
Un truc qui m'a fait marrer, aussi: je me refais 70's show en ce moment, et entre les saisons 4 et 5 (qui correspondent à l'emmergence de Scrubs, la saison 4 c'est 2001 - 2002 je crois), on observe un léger changement: les réveries de Fez ou Kelso, qui sont l'occasion de certains trips (chorégraphies, spectacles, parodies...) se multiplient, bizarrement. Juste apres le succes des reveries de JD. Ca me fait marrer.
C'est carrément bien vu !
RépondreSupprimerEffectivement c'est plutôt bien vu, je me faisais d'ailleurs la même réflexion l'autre jour en regardant HIMYM. Notamment le pilote de la saison 2, quand Marshall imagine l'été de Lily à partir de ses relevés bancaires - ce qui entraîne une apparition mémorable de George Clinton. L'influence scrubsienne est vraiment marquée dans ce passage... et ce n'est pas le seul. En fait Scrubs a libéré les sitcom en étant l'une des premières (peut-être même "la", j'ai un doute) à ne pas être tournée en public, ce qui a considérablement modifié l'approche des scénaristes (qu'il s'agisse de HIMYM ou même de séries en apparence moins marquées sitcom, comme bien sûr Californication)
RépondreSupprimerC'est pas en public How I Met?
RépondreSupprimerY'a pas un peu trop de montage pour ça ^^
RépondreSupprimerNon, c'est enregistré sans public et ledit public voit l'épisode terminé, c'est là que les rires sont enregistrés et recollés selon ce vieux procédé ringard dont l'origine s'est perdu dans les limbes du temps...
C'est cool de revenir menfin si c'est pour parler de Scrubs... ;)
RépondreSupprimerLeur système de calage de rire, c'est quand même mieux que d'utiliser tout le temps la même bande de rires composés au Synthé (procédé (c) AB Productions...), non ;-) ?
RépondreSupprimerNon mais attends, le tiers-monde ne compte pas dans l'équation ;-)
RépondreSupprimerJ'ai pas lu (peur du spoiler = peur du gendarme?). Mais ça ne me fait marrer comment tu te prends la tête à élaborer des degrés de spoil :-)
RépondreSupprimerCertaines césures sont tout à fait artificielles, peut-être. Mais en l'occurrence pas tellement je trouve, car il m'a paru qu'il y avait vraiment une grosse baisse de niveau à partir de la saison 6 (la 7 encore pire, je n'ai d'ailleurs pas eu envie de voir la 8).
RépondreSupprimerEL-JAM >>> rassure-toi je ne me prends pas la tête, ça se fait beaucoup au feeling ;-)
RépondreSupprimerLil' >>> je ne suis pas vraiment d'accord. Après c'est vrai que j'ai regarder toute la série d'une traite, je ne situe que difficilement quel épisode appartient à quelle saison...