...
À ce stade, l’injustice confine à la poésie. Pour une fois que Tue-Loup passait près de chez nous… pour une fois qu’on le savait suffisamment à l’avance pour en faire la promo… il fallait que les choses ne se passent pas comme espéré, et que le plus grand groupe français en activité1 se retrouve à jouer devant une assemblée disons… « clairsemée »2. Lecteurs, j’ai beau avoir une certaine sympathie pour vous, et même un semblant de respect pour certains… je ne vous félicite pas. Je comprends parfaitement le pourquoi du comment de votre absence : vous vous dites que comme tout bon fana de musique, j’aime avoir mon petit groupe à moi tout seul, que je ne partage guère qu’avec quelques copains à qui je refile ses disques tels quelques coupes du Saint Graal, et que je fusillerai sans état d’âme le jour où il sera connu. Certes, ce n’est pas forcément déplaisant. Mais en fait je l’avais déjà, et il encore bien moins connu que Tue-Loup : il s’agit de VIOL, artiste remarquable que je vous invite à découvrir au passage – mais je ne suis plus sûr que ce soit une bonne idée.
Ce concert, donc. Relativement bien introduit par les performances conjuguées de Mylène Lauzon et de Lê Quan Ninh, qui me laissèrent je dois le dire un peu sur ma faim. Non que le parti-pris – associer John Cage à la poésie de la jeune femme – soit inintéressant, au contraire. Mais le sentiment dominant fut toutefois que les deux s’aggloméraient assez mal, comme si chacun faisait un peu son truc dans son coin en ne rencontrant l’autre que ponctuellement. C’est dommage, d’autant que Mylène Lauzon révèle une présence étonnante, une scansion assez envoûtante… qui aurait peut-être gagné à un traitement moins « concret ».
Quant à Tue-Loup… j’avoue que j’hésite. Est-ce que vraiment vous avez mérité que je vous chronique le concert ? Non parce que si vous voulez, je peux m’arrêter là – et à la limite j’envoie la chronique à ceux qui me la demanderont en privé. Hein ? Quoi ?
Bon. On me fait signe que je suis contractuellement obligé de faire cette chronique, ne fût-ce que par respect pour l’organisation des Rencontres Musique et Littérature qui m’a chaleureusement accueilli3. Je le fais donc, mais sachez que ce n’est pas de gaieté de cœur (d’ailleurs pour me motiver je vais imaginer qu’en fait, si vous n’étiez pas là vendredi, c’est parce que vous habitez tous à cinq cents kilomètres de Paris).
Ce concert de Tue-Loup était donc excellent4. D’autant plus excellent que le groupe sut tirer profit de l’ambiance conviviale5 comme de l’absence de Rom Liteau (qui rendait évidemment un peu délicate la transposition du Goût du bonbon6), faisant de fait la part belle aux morceaux de… leur excellent prochain album7. Ce qui du coup la fout un peu mal pour la set-list (décidément tout le monde était contre moi, ce soir8) mais peu importe : chacun de ses titres, pour la plupart franchement rock, était un régal n’ayant pas à rougir de figurer aux côtés d’un Merlin.
Partis pour assister à une prestation sombre et envoûtante, c’est donc à un concert plutôt lumineux que nous avons assisté, intimiste et souvent touchant (j’ai même entrevu une dame versant une larme sur "En terre inconnue", il est vrai encore plus belle qu’à l’accoutumée). Les titres les plus tendus ("Mon vin de garde", "Gorki") n’en semblèrent que plus incisifs, et l’alternance entre grâce et tension exacerbée donna… une excellente introduction à l’univers de Tue-Loup, en fait. Qui j’en suis sûr ne manqua pas d’en convertir quelques uns – pour avoir été peu fournie l’assistance n’en fut pas moins conquise et les applaudissements, nourris. Comment eut-il pu en être autrement ? Entre une "Cabale" aérienne en ouverture et une reprise de "Mr Bojangles" toute en émotion contenue en fermeture… entre une anecdote pour le moins poilante sur le pourquoi du comment de "Gorki"9 et un petit détour par les "Carpathes"… la séduction ne pouvait opérer qu’à plein régime. Tant mieux pour ceux qui y étaient ; tant pis pour les autres. Les absents ont toujours tort, même s’ils nous lisent10. En espérant que nous serons plus nombreux pour la suite du festival…
1. J’arrêterai de le répéter le jour où Tue-Loup entrera dans le Top 200… vous noterez que je reste modeste dans mes ambitions…
2. Manière polie de dire que je pouvais quasiment compter les spectateurs de là où j’étais.
3. Oui, je sais : on en dit des choses dans un simple signe.
4. Comment ça vous saviez que j’allais écrire ça ? Comme si c’était de ma faute si Tue-Loup n’a publié que de bons albums et très peu de mauvaises chansons – oui parce que je pourrais tout de même en trouver une ou deux pas terribles en cherchant bien…
5. J’ai hésité avec « intimiste », comme litote.
6. Je fais comme si vous voyiez de quoi je parle, quoiqu’à ce stade je ne sois même plus sûr que vous ayez pris la peine de lire ma chronique.
7. Quitte à ce que vous doutiez de mon objectivité autant y aller franco, non ?
8. En effet tout avait commencé quelques heures plus tôt lorsque ma femme, dans une de ces inspirations justifiant notre vie commune, embarqua l’appareil photo sans me le dire…
9. Je ne vous la raconte pas, le mystère entourant les textes de Xavier Plumas étant, comme tout mystère qui se respecte, bien plus intéressant que sa solution.
10. Non, mais… je vous aime bien quand même, hein, les lecteurs… faut pas non plus prendre tout au pied de la lettre.
À ce stade, l’injustice confine à la poésie. Pour une fois que Tue-Loup passait près de chez nous… pour une fois qu’on le savait suffisamment à l’avance pour en faire la promo… il fallait que les choses ne se passent pas comme espéré, et que le plus grand groupe français en activité1 se retrouve à jouer devant une assemblée disons… « clairsemée »2. Lecteurs, j’ai beau avoir une certaine sympathie pour vous, et même un semblant de respect pour certains… je ne vous félicite pas. Je comprends parfaitement le pourquoi du comment de votre absence : vous vous dites que comme tout bon fana de musique, j’aime avoir mon petit groupe à moi tout seul, que je ne partage guère qu’avec quelques copains à qui je refile ses disques tels quelques coupes du Saint Graal, et que je fusillerai sans état d’âme le jour où il sera connu. Certes, ce n’est pas forcément déplaisant. Mais en fait je l’avais déjà, et il encore bien moins connu que Tue-Loup : il s’agit de VIOL, artiste remarquable que je vous invite à découvrir au passage – mais je ne suis plus sûr que ce soit une bonne idée.
Ce concert, donc. Relativement bien introduit par les performances conjuguées de Mylène Lauzon et de Lê Quan Ninh, qui me laissèrent je dois le dire un peu sur ma faim. Non que le parti-pris – associer John Cage à la poésie de la jeune femme – soit inintéressant, au contraire. Mais le sentiment dominant fut toutefois que les deux s’aggloméraient assez mal, comme si chacun faisait un peu son truc dans son coin en ne rencontrant l’autre que ponctuellement. C’est dommage, d’autant que Mylène Lauzon révèle une présence étonnante, une scansion assez envoûtante… qui aurait peut-être gagné à un traitement moins « concret ».
Quant à Tue-Loup… j’avoue que j’hésite. Est-ce que vraiment vous avez mérité que je vous chronique le concert ? Non parce que si vous voulez, je peux m’arrêter là – et à la limite j’envoie la chronique à ceux qui me la demanderont en privé. Hein ? Quoi ?
Bon. On me fait signe que je suis contractuellement obligé de faire cette chronique, ne fût-ce que par respect pour l’organisation des Rencontres Musique et Littérature qui m’a chaleureusement accueilli3. Je le fais donc, mais sachez que ce n’est pas de gaieté de cœur (d’ailleurs pour me motiver je vais imaginer qu’en fait, si vous n’étiez pas là vendredi, c’est parce que vous habitez tous à cinq cents kilomètres de Paris).
Ce concert de Tue-Loup était donc excellent4. D’autant plus excellent que le groupe sut tirer profit de l’ambiance conviviale5 comme de l’absence de Rom Liteau (qui rendait évidemment un peu délicate la transposition du Goût du bonbon6), faisant de fait la part belle aux morceaux de… leur excellent prochain album7. Ce qui du coup la fout un peu mal pour la set-list (décidément tout le monde était contre moi, ce soir8) mais peu importe : chacun de ses titres, pour la plupart franchement rock, était un régal n’ayant pas à rougir de figurer aux côtés d’un Merlin.
Partis pour assister à une prestation sombre et envoûtante, c’est donc à un concert plutôt lumineux que nous avons assisté, intimiste et souvent touchant (j’ai même entrevu une dame versant une larme sur "En terre inconnue", il est vrai encore plus belle qu’à l’accoutumée). Les titres les plus tendus ("Mon vin de garde", "Gorki") n’en semblèrent que plus incisifs, et l’alternance entre grâce et tension exacerbée donna… une excellente introduction à l’univers de Tue-Loup, en fait. Qui j’en suis sûr ne manqua pas d’en convertir quelques uns – pour avoir été peu fournie l’assistance n’en fut pas moins conquise et les applaudissements, nourris. Comment eut-il pu en être autrement ? Entre une "Cabale" aérienne en ouverture et une reprise de "Mr Bojangles" toute en émotion contenue en fermeture… entre une anecdote pour le moins poilante sur le pourquoi du comment de "Gorki"9 et un petit détour par les "Carpathes"… la séduction ne pouvait opérer qu’à plein régime. Tant mieux pour ceux qui y étaient ; tant pis pour les autres. Les absents ont toujours tort, même s’ils nous lisent10. En espérant que nous serons plus nombreux pour la suite du festival…
1. J’arrêterai de le répéter le jour où Tue-Loup entrera dans le Top 200… vous noterez que je reste modeste dans mes ambitions…
2. Manière polie de dire que je pouvais quasiment compter les spectateurs de là où j’étais.
3. Oui, je sais : on en dit des choses dans un simple signe.
4. Comment ça vous saviez que j’allais écrire ça ? Comme si c’était de ma faute si Tue-Loup n’a publié que de bons albums et très peu de mauvaises chansons – oui parce que je pourrais tout de même en trouver une ou deux pas terribles en cherchant bien…
5. J’ai hésité avec « intimiste », comme litote.
6. Je fais comme si vous voyiez de quoi je parle, quoiqu’à ce stade je ne sois même plus sûr que vous ayez pris la peine de lire ma chronique.
7. Quitte à ce que vous doutiez de mon objectivité autant y aller franco, non ?
8. En effet tout avait commencé quelques heures plus tôt lorsque ma femme, dans une de ces inspirations justifiant notre vie commune, embarqua l’appareil photo sans me le dire…
9. Je ne vous la raconte pas, le mystère entourant les textes de Xavier Plumas étant, comme tout mystère qui se respecte, bien plus intéressant que sa solution.
10. Non, mais… je vous aime bien quand même, hein, les lecteurs… faut pas non plus prendre tout au pied de la lettre.