10 Years Before

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C'était avant. Avant le revival rock. Avant les groupes "en The". Avant que les guitares reviennent à la mode et que le britrock relève la tête. Avant que The Coral ne plonge dans les limbes pour en arracher la pop psyché. C'était avant et après en même temps, après les années quatre-vingt-dix, la déferlante OK Computer et toutes ces choses. Avant et après, entre deux époques, pas comme un chaînon manquant mais plutôt comme une faille spatio-temporelle.

Certains albums ne marquent pas tout de suite. Il leur faut plusieurs années avant de s'insinuer. Le premier opus des excellents Starlight Mints est de ceux-là. Sans doute un des meilleurs albums de la décennie, sauf que très peu de gens l'ont entendu à l'époque et que plus personne ne s'en souvient aujourd'hui. Il est vrai que le groupe de Norman, Oklahoma n'avait rien pour lui, avec sa pop raffinée, mi-psyché mi-orchestrale, ses relents bluriens et son humour si fin qu'on l'aurait volontiers juré britannique. L'époque n'en avait alors que pour l'electro et le neo-metal. Un mois plus tard, Kid A paraîtrait et ferait table-rase, tandis qu'un an après les Strokes et les White Stripes achèveraient de purger les nineties. Starlight Mints resteraient sur le carreau, oubliés des rares les ayant jamais connus.

Pourtant dix ans plus tard, placer The Dream that Stuff Was Made of sur sa platine a quelque chose d'assez époustouflant. Parce que c'est un disque de 2010, paru il y a dix ans. Le son est celui que l'on retrouve aujourd'hui dans la plupart des productions pop-rock de qualités. Les mélodies ciselées, la diversité des climats, les références subtiles (Smiths, Bowie, Kinks, Pavement pour la facette indie US), la voix nasillarde et joyeuse... si The  Dream that Stuff Was Made of sortait aujourd'hui, les Starlight Mints deviendraient probablement énormes. On s'extasierait devant la qualité des riffs ("Sir Prize", "Sugar Blaster"), on acclamerait la production façon Stephen Street de la belle époque, on applaudirait les textes et l'on approuverait en connaisseur l'intelligence des arrangements ("The Bandit"). Les fans de rock psyché seraient charmés par le culot de l'ensemble tandis que les fans de pop, eux, ne pourraient qu'aimer ces mélodies bigarrées et catchy.

Sauf que voilà : The Dream that Stuff Was Made of n'est pas sorti le mois dernier, mais il y a dix ans. Et n'a pas intéressé grand-monde. Pourtant en dix ans, je peux vous assurer l'avoir écouté un sacré paquet de fois. Et si je suis rarement enclin à la tendresse vis-à-vis de ce que j'aimais à l'époque, je suis obligé de dire que sur ce disque, il n'y a tout simplement pas un seul mauvais titre. Ne devant rien aux modes de son temps, il n'en porte (évidemment) aucun des stigmates, et a formidablement bien vieilli. On écoute cet album de dandys déglingués avec une délectation... un bonheur insoupçonnables à l'époque. Non mais, sérieusement : y a-t-il au moins un lecteur de ce blog qui le connaisse ? Il gagnerait mon respect éternel...

👑 The Dream that Stuff Was Made of 

Starlight Mints | See Thru Recordings, 2000