Nous en parlions justement il y a peu dans les commentaires de cet article ; Luther, qui a été diffusée au printemps sur BBC One, est l'occasion de revenir et de coucher une fois pour toutes dans un véritable billet tout le bien que l'on pense d'Idris Elba, qui en quelques années a réussi à s'imposer non seulement comme l'un des meilleurs acteurs de séries contemporains, mais encore comme l'un des plus talentueux comédiens britanniques de sa génération. Elba, on le connaît bien sûr surtout pour le rôle culte (au sens littéral du terme) de Stringer Bell dans les trois premiers saisons de The Wire. Totalement inconnu à l'époque, il y rayonnait de mille feux en gangster raffiné aux aspirations libérales, composant l'un des personnages de fiction les plus fascinants que l'on ait pu croiser ces dernières années. On l'avait vu également, toujours chez HBO, dans le traumatisant téléfilm Sometimes in April, dans lequel il incarnait un Hutu marié et heureux avec une Tutsi jusqu'à ce jour d'avril où l'armée vint le réquisitionner pour massacrer ce même peuple auquel appartenaient sa femme et ses enfants. Il y était absolument bouleversant.
Après un ou deux rôles relevant plus du featuring que du CDI (notamment une prestation mémorable dans quelques épisodes de The Office), Elba retrouvait donc cette année son pays d'origine, qu'il avait déserté des années plus tôt faute d'y trouver des rôles décents pour un Noir. L'ironie aura voulu qu'il retrouve l'Angleterre en star locale et s'y voit composer une série entière juste pour lui. On imagine son bonheur - pour ne pas dire : sa revanche sur la télévision britannique. Tellement heureux sûrement qu'il aura oublié, comme c'est fâcheux, de lire le scénario avant de signer. Certes, on ne peut pas avoir que des The Wire sur son C.V. Mais Luther est tout de même une série très mineure, du genre ne cassant pas trois pattes à un canard : un énième flic usé traque un énième serial-killer qui va - vous ne me croirez jamais - s'en prendre à sa famille... on est en terrain connu, et dans l'esthétique comme dans l'écriture, Luther n'est qu'un cop-show parmi beaucoup d'autres. La différence fondamentale avec un Braquo tient dans un détail énorme : à la place de Jean-Hugues Anglade, il y a Idris Elba.
Paradoxalement, le rôle de John Luther est peut-être celui où il est le plus impressionnant. Toujours pourvu de son fameux charisme animal, il crève l'écran dès les premières secondes, est de quasiment tous les plans et, de manière assez étonnante, parvient à développer une partition extrêmement subtile dans une série qui ne l'est que très occasionnellement. Alors que joué par un quelconque tâcheron le personnage de Luther aurait été un énième héros de film noir, Elba lui confère une dimension bien plus complexe, jouant énormément sur son physique alors même qu'il s'agit plutôt d'un enquêteur surdoué - catégorie polar psychologique. Le résultat est assez saisissant : Luther devient un curieux compromis entre Colombo et Vic Mackey, l'intelligence aiguë du premier alliée à la colère sourde du second. Le duo qu'il forme avec la toute aussi talentueuse Ruth Wilson (qui était une étonnante Jane Eyre dans la série de la BBC) est plein de promesses, malheureusement rarement tenues tant la narration du romancier Neil Cross ne parvient jamais à surprendre, les rebondissements semblant pour la plupart totalement éculés. Pourtant, dans les nombreuses scènes où les deux comédiens sont face à face, la tension est si palpable que la série en devient captivante. Las. Deux excellents comédiens ne suffisent pas à faire tout le boulot. D'une certaine manière, ils en font déjà plus qu'ils ne le devraient, si l'on considère que leur étrange numéro de duettistes porte les six épisodes à bout de bras. Il semble que la BBC ait commandé une saison deux la semaine dernière ; pas sûr que ce soit la meilleure idée du monde, mais si c'est le pris à payer pour retrouver Idris, son jeu ambigu et son regard magnétique, il est possible qu'on soit tout de même prêt à mettre la main au porte-feuille.
Luther (saison 1), créée par Neil Cross (BBC One, 2010)
Après un ou deux rôles relevant plus du featuring que du CDI (notamment une prestation mémorable dans quelques épisodes de The Office), Elba retrouvait donc cette année son pays d'origine, qu'il avait déserté des années plus tôt faute d'y trouver des rôles décents pour un Noir. L'ironie aura voulu qu'il retrouve l'Angleterre en star locale et s'y voit composer une série entière juste pour lui. On imagine son bonheur - pour ne pas dire : sa revanche sur la télévision britannique. Tellement heureux sûrement qu'il aura oublié, comme c'est fâcheux, de lire le scénario avant de signer. Certes, on ne peut pas avoir que des The Wire sur son C.V. Mais Luther est tout de même une série très mineure, du genre ne cassant pas trois pattes à un canard : un énième flic usé traque un énième serial-killer qui va - vous ne me croirez jamais - s'en prendre à sa famille... on est en terrain connu, et dans l'esthétique comme dans l'écriture, Luther n'est qu'un cop-show parmi beaucoup d'autres. La différence fondamentale avec un Braquo tient dans un détail énorme : à la place de Jean-Hugues Anglade, il y a Idris Elba.
Paradoxalement, le rôle de John Luther est peut-être celui où il est le plus impressionnant. Toujours pourvu de son fameux charisme animal, il crève l'écran dès les premières secondes, est de quasiment tous les plans et, de manière assez étonnante, parvient à développer une partition extrêmement subtile dans une série qui ne l'est que très occasionnellement. Alors que joué par un quelconque tâcheron le personnage de Luther aurait été un énième héros de film noir, Elba lui confère une dimension bien plus complexe, jouant énormément sur son physique alors même qu'il s'agit plutôt d'un enquêteur surdoué - catégorie polar psychologique. Le résultat est assez saisissant : Luther devient un curieux compromis entre Colombo et Vic Mackey, l'intelligence aiguë du premier alliée à la colère sourde du second. Le duo qu'il forme avec la toute aussi talentueuse Ruth Wilson (qui était une étonnante Jane Eyre dans la série de la BBC) est plein de promesses, malheureusement rarement tenues tant la narration du romancier Neil Cross ne parvient jamais à surprendre, les rebondissements semblant pour la plupart totalement éculés. Pourtant, dans les nombreuses scènes où les deux comédiens sont face à face, la tension est si palpable que la série en devient captivante. Las. Deux excellents comédiens ne suffisent pas à faire tout le boulot. D'une certaine manière, ils en font déjà plus qu'ils ne le devraient, si l'on considère que leur étrange numéro de duettistes porte les six épisodes à bout de bras. Il semble que la BBC ait commandé une saison deux la semaine dernière ; pas sûr que ce soit la meilleure idée du monde, mais si c'est le pris à payer pour retrouver Idris, son jeu ambigu et son regard magnétique, il est possible qu'on soit tout de même prêt à mettre la main au porte-feuille.
Luther (saison 1), créée par Neil Cross (BBC One, 2010)
Ouais, pas terrible terrible, t'as bien fait de te le garder pour l'été.
RépondreSupprimerComplètement d'accord avec ton analyse!
RépondreSupprimerA quand de grands rôles pour lui????
Idris Elba est à l'affiche de Takers, mais ça n'a pas l'air plus exceptionnel que ça... Il a peut-être besoin de manger le monsieur :-)
RépondreSupprimerJ'pense que j'irai peut-être le voir, ça a l'air d'un film d'action quoi..
http://www.metacritic.com/movie/takers
http://www.rottentomatoes.com/m/takers/
(Sinon Luther, pas vu, pas l'intention de voir non plus...)
Serious >>> j'avais vu le pilote après la diffusion et effectivement je m'étais dit que cela faisait un très bon "en stock".
RépondreSupprimerKath >>> je crois qu'il pense que Luther est un grand rôle ;-)
Élodie >>> ici ça ne sort pas avant novembre, j'ai donc largement le temps d'oublier (d'autant qu'Idris est un rôle secondaire)
J'ai presque honte d'avoir beaucoup aimé ^^
RépondreSupprimerHonte ? Pas à cause de l'article, j'espère ?...
RépondreSupprimerSi, si, un peu qaund même. J'ai longtemps retardé le visionnage à cause de l'article.
RépondreSupprimer3/6 et quelques commentaires vraiment peu élogieux, j'avais un peu peur de perdre mon temps.
Et là, pour une fois, c'est moi qui viens dire quelque chose de positif ! ;-))
J'ai commencé Shadow Line, c'est pas mal, après deux épisodes !
Oh ! Mais enfin, depuis quand tu écoutes les gens aveuglément ? ^^
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