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Ce qui est étonnant avec Alma Brami, c'est qu'on a l'impression que les clichés ne lui font pas peur (ou alors - hypothèse moins amusante - qu'elle n'ouvre jamais un livre). Quand la plupart des écrivains font des pieds et des mains pour les éviter, quand tout écrivain digne ce nom se déclare ennemi du cliché... Alma Brami, dans ce nouveau roman comme dans les deux précédents, donne l'impression de se rouler dedans avec un mélange assez stupéfiant de jubilation et de candeur. En ouvrant Ils l'ont laissée là l'an passé, on avait déjà ce sentiment que la jeune auteure filait droit dans le mur, qu'elle empilait tellement d'idées convenues dans les premières pages que les suivantes ne pourraient que s'effondrer sur sa tête. Et puis le récit se construisait en filigranes, presque malgré elle. Et finalement le texte finissait par tenir la route, et même impressionner par endroits.
Mêmes causes, mêmes effets dans le cas de Tant que tu es heureuse, qui va jusqu'à arborer un titre que Marc Levy en personne n'aurait pas renié. Rien que cela n'incite pas à ouvrir le roman. On le pose dans un coin en se disant que mouais, on verra plus tard. Une histoire de rupture ? Sérieusement, Alma ?
Sérieusement ! Et pas que, puisque le roman s'ouvre sur la perte d'un enfant pour enchaîner sur une espèce de compilation de tous les trucs les plus pathos qu'on ait pu lire ces cinq dernières années. Laurence Tardieu, pourtant particulièrement balèz en la matière, peut aller se rhabiller. Alma Brami vient de la surclasser dans le genre pathosissime ; c'est à croire qu'elle s'est lancée un défi personnel : je vais mettre toutes les idées les plus déprimantes et larmoyantes possibles dans mon livre, et je vais quand même m'en sortir à la fin. Le pire, c'est qu'elle s'en sort en effet plutôt pas mal. A la condition de n'avoir rien contre le premier degré un peu brut de décoffrage (ce qui a de toute façon toujours été plus ou moins le style d'Alma Brami), difficile de ne pas repérer quelques belles pages sur le vide intérieur suivant la rupture, la perte de soi, la dissolution de l'identité dans la relation, l'esquive du regard des autres, toujours à côté de la plaque ("Trop de personnes qui ne servaient à rien"...). Tout cela est, c'est le moins que l'on puisse dire, parfaitement rendu. Celui qui trouvera l'ensemble un peu lourd et répétitif n'aura sans doute jamais été éperdument amoureux, ni jamais largué comme une merde. Dans ces cas-là, on est effectivement lourd et répétitif, et l'on se noie dans des abîmes dont Brami dessine les contours avec un réel talent.
Reste qu'au-delà de cette reproduction fidèle d'un ressenti, il n'y a tout de même pas grand-chose dans Tant que tu es heureuse. L'émotion est brute, écrite avec finesse et une économie de moyens inversement proportionnelle au pathos du récit. Seulement de récit, justement, il n'y a point. Le texte ne va nulle part, ne suit pas de ligne directrice particulière, tellement pas que l'on pourrait sauter des chapitres et retomber sur ses pattes comme si de rien n'était. Comme souvent avec Alma Brami la forme est plus que pas mal, il y a une plume, un ton, un rythme. Mais le font n'est pas assez mâché, ou tout simplement pas assez intéressant pour que l'on y adhère.
Tant que tu es heureuse, d'Alma Brami (2010)
Ce qui est étonnant avec Alma Brami, c'est qu'on a l'impression que les clichés ne lui font pas peur (ou alors - hypothèse moins amusante - qu'elle n'ouvre jamais un livre). Quand la plupart des écrivains font des pieds et des mains pour les éviter, quand tout écrivain digne ce nom se déclare ennemi du cliché... Alma Brami, dans ce nouveau roman comme dans les deux précédents, donne l'impression de se rouler dedans avec un mélange assez stupéfiant de jubilation et de candeur. En ouvrant Ils l'ont laissée là l'an passé, on avait déjà ce sentiment que la jeune auteure filait droit dans le mur, qu'elle empilait tellement d'idées convenues dans les premières pages que les suivantes ne pourraient que s'effondrer sur sa tête. Et puis le récit se construisait en filigranes, presque malgré elle. Et finalement le texte finissait par tenir la route, et même impressionner par endroits.
Mêmes causes, mêmes effets dans le cas de Tant que tu es heureuse, qui va jusqu'à arborer un titre que Marc Levy en personne n'aurait pas renié. Rien que cela n'incite pas à ouvrir le roman. On le pose dans un coin en se disant que mouais, on verra plus tard. Une histoire de rupture ? Sérieusement, Alma ?
Sérieusement ! Et pas que, puisque le roman s'ouvre sur la perte d'un enfant pour enchaîner sur une espèce de compilation de tous les trucs les plus pathos qu'on ait pu lire ces cinq dernières années. Laurence Tardieu, pourtant particulièrement balèz en la matière, peut aller se rhabiller. Alma Brami vient de la surclasser dans le genre pathosissime ; c'est à croire qu'elle s'est lancée un défi personnel : je vais mettre toutes les idées les plus déprimantes et larmoyantes possibles dans mon livre, et je vais quand même m'en sortir à la fin. Le pire, c'est qu'elle s'en sort en effet plutôt pas mal. A la condition de n'avoir rien contre le premier degré un peu brut de décoffrage (ce qui a de toute façon toujours été plus ou moins le style d'Alma Brami), difficile de ne pas repérer quelques belles pages sur le vide intérieur suivant la rupture, la perte de soi, la dissolution de l'identité dans la relation, l'esquive du regard des autres, toujours à côté de la plaque ("Trop de personnes qui ne servaient à rien"...). Tout cela est, c'est le moins que l'on puisse dire, parfaitement rendu. Celui qui trouvera l'ensemble un peu lourd et répétitif n'aura sans doute jamais été éperdument amoureux, ni jamais largué comme une merde. Dans ces cas-là, on est effectivement lourd et répétitif, et l'on se noie dans des abîmes dont Brami dessine les contours avec un réel talent.
Reste qu'au-delà de cette reproduction fidèle d'un ressenti, il n'y a tout de même pas grand-chose dans Tant que tu es heureuse. L'émotion est brute, écrite avec finesse et une économie de moyens inversement proportionnelle au pathos du récit. Seulement de récit, justement, il n'y a point. Le texte ne va nulle part, ne suit pas de ligne directrice particulière, tellement pas que l'on pourrait sauter des chapitres et retomber sur ses pattes comme si de rien n'était. Comme souvent avec Alma Brami la forme est plus que pas mal, il y a une plume, un ton, un rythme. Mais le font n'est pas assez mâché, ou tout simplement pas assez intéressant pour que l'on y adhère.
Tant que tu es heureuse, d'Alma Brami (2010)
C'est une semaine spéciale "je suis indulgent avec les filles françaises" ? Non parce qu'il est très nul ce bouquin quand même :)
RépondreSupprimerJe ne trouve pas, non.
RépondreSupprimerbrrrrr même bien écrit, pathosissime c'est point mon truc :-)
RépondreSupprimerMoi j'adore pleurer. Je suis un faux dur ;-)
RépondreSupprimer"pathossissime", j'adore ! Et j'adore aussi quand tu râles...
RépondreSupprimerAh oui ? Tu devrais emménager chez moi alors, tu serais ravie : je râle de tout le temps :-D
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