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La mémoire d’un chroniqueur vaut ce qu’elle vaut, mais de mémoire de chroniqueur je crois bien n’avoir jamais vu pareil concert. Ce pourrait être un compliment. Quelque part c’en est un. Mais un vicieux. Catégorie réversible.
Il y avait pourtant une curiosité sincère à l’idée de voir ce que donnait sur scène BABX, artiste singulier dont les deux albums (surtout le second) auraient sans doute gagné à une plus large exposition et à être vendus comme un peu plus qu’un énième truc de chanson française. Toujours ce problème bien de chez nous, cette tendance naturelle à classifier automatiquement tout ce qui est francophone en « chanson », alors qu’il n’est nul besoin d’avoir une oreille particulièrement exercée pour déceler que BABX n’est pas exactement le genre de songwriter à bouffer la laine sur le dos de Bénabar. Il y avait cette curiosité, oui, parce que l’on sent aisément à l’écoute de Cristal Ballroom que tendues, les chansons sont toutes prêtes à exploser en live. On attendait cela, sans trop y croire, au moment de se planter au coin de la scène de la Maroquinerie.
On serait tenté de dire que BABX tint ses promesses, mais la vérité demeure qu’il ne nous avait rien promis du tout et qu’on n’en savait pas assez sur lui pour deviner à quelle sauce nous allions être mangés. Avouons que durant vingt-cinq minutes environ, celle-ci fut exquise. Intenses, nerveux, puissamment soutenus par un groupe de haute-voltige, les cinq ou six premiers morceaux impressionnent, que ce soient "Electrochocs Ladyland" (dont la montée en puissance se prête assez naturellement aux feux d’artifices), "Cristal Ballroom" (moins pêchue mais dont les accents férréiens laissaient supposer – à juste titre – des versions live hantées) ou "Mourir au Japon" (qui devient ce qu’elle est, dans le fond : un grand morceau que Tom Waits a oublié d’écrire). Et puis alors, le soufflé commence à retomber. BABX s’attaque à Baudelaire dans une version gueularde et sans émotion ; le morceau traîne trop, les musiciens bavardent et le bouquet final prend des allures de choucroute – plus proche d’un mauvais groupe de prog-prock que de la jam seventies qu’il voudrait évoquer. On soupire. Après une entame à ce point tonitruante, tout le monde a le droit à un faux pas.
La mémoire d’un chroniqueur vaut ce qu’elle vaut, mais de mémoire de chroniqueur je crois bien n’avoir jamais vu pareil concert. Ce pourrait être un compliment. Quelque part c’en est un. Mais un vicieux. Catégorie réversible.
Il y avait pourtant une curiosité sincère à l’idée de voir ce que donnait sur scène BABX, artiste singulier dont les deux albums (surtout le second) auraient sans doute gagné à une plus large exposition et à être vendus comme un peu plus qu’un énième truc de chanson française. Toujours ce problème bien de chez nous, cette tendance naturelle à classifier automatiquement tout ce qui est francophone en « chanson », alors qu’il n’est nul besoin d’avoir une oreille particulièrement exercée pour déceler que BABX n’est pas exactement le genre de songwriter à bouffer la laine sur le dos de Bénabar. Il y avait cette curiosité, oui, parce que l’on sent aisément à l’écoute de Cristal Ballroom que tendues, les chansons sont toutes prêtes à exploser en live. On attendait cela, sans trop y croire, au moment de se planter au coin de la scène de la Maroquinerie.
Sauf que non. Ce n’est pas un faux-pas, mais le tournant du concert. A partir de là, les morceaux vont s’enchaîner selon un axe simple : lents, longs et ennuyeux. Mention spéciale aux « nouvelles chansons » délivrées pour l’occasion, toutes particulièrement fades du point de vue mélodique – un fait d’autant plus étonnant que les mélodies sont généralement le grand point fort de l’artiste. L’introduction des invités n’aide pas à relancer l’attention, loin de là. L comme Camélia Jordana délivrent chacune deux ballades chiantes comme la mort. Le concert dure depuis déjà une bonne heure et à l’exception de la touchante "Sous le piano de ma mère", cela fait bien une demi-heure que l’on n’a plus rien entendu d’intéressant. Pour être franc, on baille et on a envie de s’asseoir. Le public semble conquis et puisqu’il paraît qu’il a toujours raison, tant mieux pour lui. On peine à le comprendre tant ce concert ressemble à un curieux numéro d’éjaculateur précoce, envoyant toute la purée en quelques minutes puis montrant des signes de fatigues et commençant à s’endormir. Sauf que vous savez comment sont les femmes – et le public en est une, qu’il faut séduire du mieux possible, et garder si on le peut. Alors l’éjaculateur précoce fait ce qu’il peut pour retrouver un semblant d’excitation, je vous passe les détails mais c’est un peu à cela que ressembleront "Crack Maniac" ou "8h04" (assez réussies, au demeurant).
Le concert aura duré quasiment deux heures en tout, le second orgasme étant un peu long à venir (une reprise du "Green Grass" de Tom Waits fera finalement office de sex-toy). Honnêtement, à la fin, c’était un peu pénible, au point qu’on ne sait pas trop quoi en penser. BABX est-il un excellent amant que l’on a rencontré dans un mauvais jour ? Ou bien souffre-t-il de problèmes plus pathologiques que seul un thérapeute pourrait soigner ? Difficile à dire. Il faudra sans doute un second rendez-vous pour le savoir (ce qui sera compliqué, vu que c’était la dernière de la tournée). Il le mérite, il est sympathique et présente bien. En revanche la prochaine fois, pas sûr qu’on acceptera de payer l’addition.