...
C'était l'une des séries les plus attendues de l'année passée, et voici qu'elle reprend ce mardi dans une relative indifférence. Caprica, spin off et prequel de Battlestar Galactica, portait en elle les promesses d'une nouvelle ère autant que d'un héritage - celui de la série de SF la plus passionnante (et inégale) de la décennie. On remettait les pendules à zéro, et même moins le quart en l'occurrence, et on allait voir ce qu'on allait voir : naissance des Cylons, tragédies familiales, enfance de l'excellent Commandant Adama. Conçue par Ronald D. Moore, le fidèle David Eick et un ancien de 24 (Remi Aubuchon), Caprica affichait sur le papier cette ambition folle d'être une colossale fresque historique à la sauce Battlestar, une réinvention de la mythologie de la série au moins autant qu'un prequel (ou une suite, faut voir, puisque la structure narrative de Battlestar était cyclique). Et en effet, vue la fin crapoteuse de la série de Sy-Fy, sans doute valait-il mieux tout effacer et recommencer sur de (presque) nouvelles bases.
Dès le pilote on en prend plein la vue, et Caprica semble en mesure de tenir toutes ses promesses. La reconstitution de Caprica (la ville) est impressionnante, les décors somptueux et le casting impeccable, porté notamment par un Essai Morales (NYPD Blue) particulièrement ambigu. Ce nouveau chapitre de la franchise achève d'abattre une cloison déjà sévèrement amochée par son prédécesseur - celle qui sépare encore (plus pour longtemps) la télévision du cinéma. Surtout, on est frappé par la volonté de se démarquer de Battlestar, aussi bien dans la mise en scène elle-même que dans les intrigues ou le style. Ce n'est pas la moindre des qualités de Caprica que d'oser faire table-rase du passé avec une radicalité confinant à l'impertinence. Quand la plupart des franchises SF (la plupart des franchises tout court) se contentent généralement de dupliquer la formule qui fit leur gloire, Moore a su imposer une réelle volonté de rupture, notamment en faisant le choix de situer son intrigue avant la première guerre et l'unification des colonnies. De fait, on pourrait presque prendre autant de plaisir à regarder Caprica sans rien connaître de sa glorieuse aînée. Elle a son propre ton, sa propre atmosphère et même son propre univers. Sans oublier, bien sûr, son propre thème : Caprica - et c'est une surprise - accorde une place extrêmement importante aux réalités virtuelles et aux avatars, s'inscrivant en cela dans la double filiation de Matrix et des excellent Extremes du non-moins excellent Christopher Priest. On ne s'y attendait pas vraiment. On ne voyait pas les Cylons venir de là, pas plus qu'on ne les imaginait naître des tréfonds du deuil le plus insoutenable. Vous aimiez les personnages torturés de Battlestar ? Vous allez vous régaler avec ceux de son spin-off, ados livrés à eux-mêmes, parents paumés, humanité décadente dansant sans le savoir au bord d'un gouffre aux airs de révolution.
Les neufs premiers épisodes donnent le la d'une série se démarquant déjà considérablement de la production contemporaine. On y fait des codes du soap et de l'anticipation ce qu'on fit autrefois de ceux du space-opera : on les malaxes, on les détourne, on les piétine. C'est peut-être la première fois que l'on se retrouve face à une histoire de réalité virtuelle sans avoir la crainte que cela parte dans tous les sens - le fait que ce thème s'inscrive dans une storyline plus vaste, sans doute. Le scénario a beau être complexe, on entre très facilement dans Caprica, son rythme lancinant, légèrement contemplatif, loin de la fureur et de la tension permanente de sa glorieuse aînée. Un autre registre, pas moins maîtrisé - assez complémentaire somme toute. Pour se dérouler dans l'espace, Battlestar n'en semblait pas moins plus terrienne (humaine ?) quand Caprica, pourtant beaucoup plus proche de nous dans l'univers, s'avère plus évanescente - elle se déroule à une époque où tous les possibles sont encore à portée de main. Bien sûr la fin, déjà, se profile à l'horizon. Cela lui confère une dimension tragique plus nette encore, comme une menace se profilant à l'horizon. Mais pour l'heure, l'espoir existe toujours. La croyance en l'avenir n'est pas (encore) devenue cette foi irrationnelle et déraisonnable qui bercera quelques soixante années plus tard les nuits agitées de Laura Roslin.
Caprica (saison 1, partie 1), créée par Ronald D. Moore, David Eick & Remi Aubuchon (Syfy, 2010)
C'était l'une des séries les plus attendues de l'année passée, et voici qu'elle reprend ce mardi dans une relative indifférence. Caprica, spin off et prequel de Battlestar Galactica, portait en elle les promesses d'une nouvelle ère autant que d'un héritage - celui de la série de SF la plus passionnante (et inégale) de la décennie. On remettait les pendules à zéro, et même moins le quart en l'occurrence, et on allait voir ce qu'on allait voir : naissance des Cylons, tragédies familiales, enfance de l'excellent Commandant Adama. Conçue par Ronald D. Moore, le fidèle David Eick et un ancien de 24 (Remi Aubuchon), Caprica affichait sur le papier cette ambition folle d'être une colossale fresque historique à la sauce Battlestar, une réinvention de la mythologie de la série au moins autant qu'un prequel (ou une suite, faut voir, puisque la structure narrative de Battlestar était cyclique). Et en effet, vue la fin crapoteuse de la série de Sy-Fy, sans doute valait-il mieux tout effacer et recommencer sur de (presque) nouvelles bases.
Dès le pilote on en prend plein la vue, et Caprica semble en mesure de tenir toutes ses promesses. La reconstitution de Caprica (la ville) est impressionnante, les décors somptueux et le casting impeccable, porté notamment par un Essai Morales (NYPD Blue) particulièrement ambigu. Ce nouveau chapitre de la franchise achève d'abattre une cloison déjà sévèrement amochée par son prédécesseur - celle qui sépare encore (plus pour longtemps) la télévision du cinéma. Surtout, on est frappé par la volonté de se démarquer de Battlestar, aussi bien dans la mise en scène elle-même que dans les intrigues ou le style. Ce n'est pas la moindre des qualités de Caprica que d'oser faire table-rase du passé avec une radicalité confinant à l'impertinence. Quand la plupart des franchises SF (la plupart des franchises tout court) se contentent généralement de dupliquer la formule qui fit leur gloire, Moore a su imposer une réelle volonté de rupture, notamment en faisant le choix de situer son intrigue avant la première guerre et l'unification des colonnies. De fait, on pourrait presque prendre autant de plaisir à regarder Caprica sans rien connaître de sa glorieuse aînée. Elle a son propre ton, sa propre atmosphère et même son propre univers. Sans oublier, bien sûr, son propre thème : Caprica - et c'est une surprise - accorde une place extrêmement importante aux réalités virtuelles et aux avatars, s'inscrivant en cela dans la double filiation de Matrix et des excellent Extremes du non-moins excellent Christopher Priest. On ne s'y attendait pas vraiment. On ne voyait pas les Cylons venir de là, pas plus qu'on ne les imaginait naître des tréfonds du deuil le plus insoutenable. Vous aimiez les personnages torturés de Battlestar ? Vous allez vous régaler avec ceux de son spin-off, ados livrés à eux-mêmes, parents paumés, humanité décadente dansant sans le savoir au bord d'un gouffre aux airs de révolution.
Les neufs premiers épisodes donnent le la d'une série se démarquant déjà considérablement de la production contemporaine. On y fait des codes du soap et de l'anticipation ce qu'on fit autrefois de ceux du space-opera : on les malaxes, on les détourne, on les piétine. C'est peut-être la première fois que l'on se retrouve face à une histoire de réalité virtuelle sans avoir la crainte que cela parte dans tous les sens - le fait que ce thème s'inscrive dans une storyline plus vaste, sans doute. Le scénario a beau être complexe, on entre très facilement dans Caprica, son rythme lancinant, légèrement contemplatif, loin de la fureur et de la tension permanente de sa glorieuse aînée. Un autre registre, pas moins maîtrisé - assez complémentaire somme toute. Pour se dérouler dans l'espace, Battlestar n'en semblait pas moins plus terrienne (humaine ?) quand Caprica, pourtant beaucoup plus proche de nous dans l'univers, s'avère plus évanescente - elle se déroule à une époque où tous les possibles sont encore à portée de main. Bien sûr la fin, déjà, se profile à l'horizon. Cela lui confère une dimension tragique plus nette encore, comme une menace se profilant à l'horizon. Mais pour l'heure, l'espoir existe toujours. La croyance en l'avenir n'est pas (encore) devenue cette foi irrationnelle et déraisonnable qui bercera quelques soixante années plus tard les nuits agitées de Laura Roslin.
Caprica (saison 1, partie 1), créée par Ronald D. Moore, David Eick & Remi Aubuchon (Syfy, 2010)
J'ai fait partie des déçus de Caprica durant les premiers épisodes, mais je dois dire qu'à la longue cette série me plait de plus en plus. Je suis très content qu'elle reprenne bientôt, la fin de la première partie était assez abrupte.
RépondreSupprimerC'est vrai que la suite a tardé. En même temps vu ce qu'une telle série doit coûter à produire...
RépondreSupprimerMoi je me suis un peu fait chier quand même par moment. Mais il y a eu du très bon (et même James Marsters!)
RépondreSupprimerAh oui, tiens. J'avais déjà oublié.
RépondreSupprimeron dirait le nom d'une émission de cuisine exotique.
RépondreSupprimer"Vous avez 30 minutes pour faire un dessert aromatisé au caprica. Un expert de Sodhexo jugera vos prestations."
Sinon moi j'avais la version film à l'eau de rose (Caprica, c'est fini)
RépondreSupprimerOui il saute comme un Caprica
RépondreSupprimerEnfin surtout plus que tout ça fait quand même marque de crackers, je trouve :)
RépondreSupprimerSinon c'est pour quand la chronique du nouveau Caprica Bambaataa ?
RépondreSupprimercaprica bambaaata ^^
RépondreSupprimeryou made my day :-)
Vous êtes graves, les mecs :-)
RépondreSupprimer1er gros rire de la journée, merci Serious (mais il faut dire que le terrain avait été bien préparé par arbobo :-) ).
RépondreSupprimerQuant à Caprica, j'ai été moyennement intéressée par son annonce, j'en ai vu des bribes et connaît certaines parties de l'histoire, ça me suffit...
(et la fin de BSG, j'ai pas vu, tant mieux apparemment, du coup BSG reste pour moi une grande série :-D)
Merci à tous ! je passerai avec mon petit chapeau d'ici une heure.
RépondreSupprimerUn petit dernier pour la route ?
RépondreSupprimerCaprica deux...
RépondreSupprimerCaprice des dieux !
RépondreSupprimer- c'est plus drôle quand on a vu la série -
RépondreSupprimerT'es cinglé...
RépondreSupprimer[Insérer ici une blague à base de poivre rouge]
RépondreSupprimerEt sinon, moi aussi j'aime beaucoup la série, très intelligente dans le choix de ses thèmes et dans leur traitement. Mais quand j'y repense, elle manque quand même sérieusement de rythme, par moment. Je retrouve pas le côté passionnel qu'il y avait avec BSG ou d'autres grandes séries. J'espère que la saison 2 aura les qualités de la 1, mais aussi un peu plus de Pep's.
C'est ce que j'appelle "plus contemplative" (mais manque de rythme me va aussi, je ne suis pas difficile ^^).
RépondreSupprimerEn fait ce n'est pas la saison 2 qui débute, mais la seconde partie de la 1. Je ne sais pas si cela a une grande importance, j'imagine que oui sinon ils auraient appelé ça saison 2...