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C'est sans doute l'évènement le plus marquant de ce troisième tome d'A Song of Ice & Fire : Jaime prend la parole. Le troisième de la fratrie Lannister, celui que l'on surnomme avec un mélange de crainte et de dégoût : Le Régicide, puisqu'adolescent encore il prit sur lui d'abattre son maître pour mettre son beau-frère Robert sur le trône. Beau et cruel, il n'était jusqu'alors qu'un personnage secondaire (et pour cause : il passa le plus clair du tome deux dans un cachot), réduit à sa réputation sulfureuse, ses amours incestueuses (il est acquis corps et âme à sa reine de sœur jumelle) et son caractère binaire. En lui offrant son tour de parole, George R.R. Martin réussit le plus beaux des retournements et signe quelques unes des meilleures pages de sa série. C'était une chose en effet que d'entrer dans la tête de Jaime, de le voir se nuancer et prendre une autre mesure ; c'en est une autre de le réinventer en héros romantique, décadent archétypal, pourvu de surcroît d'un solide sens de l'humour (certes noir et acide, mais quand même). Une fois encore, Martin est bluffant : d'une évidence (tout être est bien plus complexe et différent que ce que le regard des autres peut déceler) il a fait une mise en scène vertigineuse en s'appuyant sur l'être le plus profondément haïssable de Sept Couronnes - rappelons que dans sa toute première apparition Jaime tentait d'assassiner un enfant de sept ans.
Bluffant, oui... d'autant que la redécouverte du chevalier Jaime s'inscrit dans un schéma plus vaste de redéfinition des forces en présence. Dans la continuité de ce que l'auteur avait autrefois tenté (avec plus ou moins de réussite) autour de Theon Greyjoy, les évolutions de Brienne ou de Sandor Clegane étaient certes attendues - elles n'en sont pas moins finement menées. Les jeunes premiers que sont Jon ou Robb gagnent en ambivalences ; Tyrion et Catelyn sont plus touchants que jamais. Quant à Sansa, elle est plus que parfaite dans son rôle, son personnage entier semblant obéir à la nécessité d'un détournement de la figure de la petite princesse mijaurée (pléonasme).
A part ça le récit continue, lentement mais sûrement. A Storm of Swords n'est pas dénué de longueurs et de moments de faibles tensions, le rythme de la série semblant évoluer imperceptiblement vers quelque chose de plus cérébral et contemplatif, uniquement tendu vers l'explosion finale (ce qui était déjà un peu le cas du volet précédent). Vu le dernier tiers à couper le souffle que l'auteur nous concocte, on aurait mauvaise grâce de le lui reprocher, mais il faut reconnaître que comme dans A Clash of Kings le texte souffre d'un petit ventre mou en son milieu. Plus que jamais, George R.R. Martin donne l'impression de ne vouloir se focaliser que sur les personnages, leur laissant tout le temps nécessaire pour s'émanciper, tout loisir de faire hoqueter l'intrigue (pour sa part de plus en plus complexe et touffue... et secondaire !) comme bon leur semble. Si elle n'est pas exempte de défauts, la méthode continue de fonctionner. Et le lecteur n'est sans doute pas au bout de ses surprises.
A Song of Ice & Fire, vol. III : A Storm of Swords, de George R.R. Martin (2000)
C'est sans doute l'évènement le plus marquant de ce troisième tome d'A Song of Ice & Fire : Jaime prend la parole. Le troisième de la fratrie Lannister, celui que l'on surnomme avec un mélange de crainte et de dégoût : Le Régicide, puisqu'adolescent encore il prit sur lui d'abattre son maître pour mettre son beau-frère Robert sur le trône. Beau et cruel, il n'était jusqu'alors qu'un personnage secondaire (et pour cause : il passa le plus clair du tome deux dans un cachot), réduit à sa réputation sulfureuse, ses amours incestueuses (il est acquis corps et âme à sa reine de sœur jumelle) et son caractère binaire. En lui offrant son tour de parole, George R.R. Martin réussit le plus beaux des retournements et signe quelques unes des meilleures pages de sa série. C'était une chose en effet que d'entrer dans la tête de Jaime, de le voir se nuancer et prendre une autre mesure ; c'en est une autre de le réinventer en héros romantique, décadent archétypal, pourvu de surcroît d'un solide sens de l'humour (certes noir et acide, mais quand même). Une fois encore, Martin est bluffant : d'une évidence (tout être est bien plus complexe et différent que ce que le regard des autres peut déceler) il a fait une mise en scène vertigineuse en s'appuyant sur l'être le plus profondément haïssable de Sept Couronnes - rappelons que dans sa toute première apparition Jaime tentait d'assassiner un enfant de sept ans.
Bluffant, oui... d'autant que la redécouverte du chevalier Jaime s'inscrit dans un schéma plus vaste de redéfinition des forces en présence. Dans la continuité de ce que l'auteur avait autrefois tenté (avec plus ou moins de réussite) autour de Theon Greyjoy, les évolutions de Brienne ou de Sandor Clegane étaient certes attendues - elles n'en sont pas moins finement menées. Les jeunes premiers que sont Jon ou Robb gagnent en ambivalences ; Tyrion et Catelyn sont plus touchants que jamais. Quant à Sansa, elle est plus que parfaite dans son rôle, son personnage entier semblant obéir à la nécessité d'un détournement de la figure de la petite princesse mijaurée (pléonasme).
A part ça le récit continue, lentement mais sûrement. A Storm of Swords n'est pas dénué de longueurs et de moments de faibles tensions, le rythme de la série semblant évoluer imperceptiblement vers quelque chose de plus cérébral et contemplatif, uniquement tendu vers l'explosion finale (ce qui était déjà un peu le cas du volet précédent). Vu le dernier tiers à couper le souffle que l'auteur nous concocte, on aurait mauvaise grâce de le lui reprocher, mais il faut reconnaître que comme dans A Clash of Kings le texte souffre d'un petit ventre mou en son milieu. Plus que jamais, George R.R. Martin donne l'impression de ne vouloir se focaliser que sur les personnages, leur laissant tout le temps nécessaire pour s'émanciper, tout loisir de faire hoqueter l'intrigue (pour sa part de plus en plus complexe et touffue... et secondaire !) comme bon leur semble. Si elle n'est pas exempte de défauts, la méthode continue de fonctionner. Et le lecteur n'est sans doute pas au bout de ses surprises.
A Song of Ice & Fire, vol. III : A Storm of Swords, de George R.R. Martin (2000)
Je continue mon "travail" sur les publications françaises :
RépondreSupprimer- Intrigues à Port-Réal
- L'épée de feu
- Les noces pourpres
- La loi du régicide
Ceux qui les ont lus le noteront, ces titres sont habiles, parce que assez trompeurs.
Concernant l'article, j'apporterai une nuance. Pour moi, en effet, ce volume est moins marqué par Jaime, que par le retour du fantastique. Ou, pour être très précis, car il a toujours été là, son installation dans le récit, avec de nombreuses révélations sur la nature de Mélisandre, et aussi l'apparition de plusieurs personnages "purement fantastiques", comme Lord Dondarion. Ce que confirmera la suite.
RépondreSupprimerBonne journée, Thomas.
J'ai commencé le tome 1 et pour l'instant ça me plaît bien. Cela dit il y avait déjà des longueurs je trouve, alors si tu t'en plains seulement à partir du 2 ça ne me rassure pas trop :/
RépondreSupprimerJ'ai trouvé cet épisode EXCEPTIONNEL. Je suis plus réservé sur le suivant. En tout cas attends-toi à un gros choc ^_^
RépondreSupprimerBloom >>> parce que les dragons ils ne sont pas fantastiques, donc ? ;-)
RépondreSupprimerLil' >>> je n'en ai pas vu - je l'ai dévoré d'une traite.
J-C >>> j'ai entendu parler de ce "choc" en faisant quelques recherches... bizarrement, j'ai hâte :-)
Moi j'en suis toujours au premier volume, deuxième partie (en français) mais jusqu'à présent j'aime. Et je sens que je vais continuer en lisant ces commentaires....
RépondreSupprimerJ'arrive au tome 4 VF (donc la moitié du tome 2 VO) et c'est vraiment prenant, ce truc ! Et en même temps c'est fou, la plupart du temps il ne se passe rien !
RépondreSupprimerMerci pour la découverte ;-)
Jouissif, hein ? ;-)
RépondreSupprimerBon ben, j'ai commencé le premier tome (celui où Bran se fait jeter pas la fenêtre)
RépondreSupprimerCa faisait longtemps que j'avais pas accorché autant à un livre d'heroic fantasy!
Merci du conseil
(parce que pour le coup Gormenghast j'arrive pas du tout à dépasser la première moitié du premier tome...)
Et les polars personne n'en lit? Le dernier Elisabeth George est excellent comme d'hab!
:-)
Des polars ? Ah si si, j'en lis pas mal. Ca fait longtemps que j'en ai pas chroniqué un, par contre, c'est vrai...
RépondreSupprimerBon ben voilà , j'ai fini le festin des corbeaux.
RépondreSupprimerPfff, quel marathon!
Il faut avouer qu'in y a qq longueurs, qq personnages moins intéressants que d'autres (genre Sam ou Arya)
mais bon, on s'y accroche, on s'y attache et maintenant j'attends la suiiiiite!
et la série.
:-)
J'adore Arya, mais je suis en revanche assez d'accord concernant Sam. Enfin on aura l'occasion d'en reparler quand je posterai l'article sur le dernier tome. Et moi aussi bien sûr, j'attends la série avec impatience.
RépondreSupprimerTu as vu le trailer ?
Y en a quelques uns comme ça sur le site de HBO.
Arya, à mon sens manque d'ambiguité. Je préfère Sansa pour laquelle on ne peut qu'anticiper de futures graves désillusions!
RépondreSupprimerMes deux perso préfés sont Tyrion et Daenerys. Mais évidemment, ce livre est d'une telle richesse que tous forment un choeur équilibré ( quoiqu'un peu touffu quand même)
Et oui, une fois le livre fini, je me suis précipitée sur le site de HBO... héhé!
:-)
Moi mes préférés sont Tyrion et Cat... cela dit à partir du moment où Jaime et Cersei prennent la parole, ils sont assez fascinants également.
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