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Il y a quelque chose d’absolument gracieux chez Ana Bacalhau, qui n’a pas (que) à voir avec son physique. La chanteuse de Deolinda n’a d’ailleurs pas grand-chose de la beauté conventionnelle et ennuyeuse ; elle est bien mieux que cela : charmante, ravissante. Et d’un charisme assez affolant, que l’on n’avait pas réellement mesuré avant de découvrir le groupe sur scène. En fait, on n’avait pas mesuré grand-chose, mis à part que les albums de ce quatuor portugais, que l’on suit depuis déjà quelques années, étaient très bons. Ce soir, on a compris presque immédiatement pourquoi Deolinda était devenu l’un des orchestres les plus populaires de son pays 1.
Il y a donc évidemment cette grâce, cette chanteuse extraordinaire – à tout point de vue. La performance vocale est de très haut niveau, mais cela, on le savait déjà. Découvrir Ana Bacalhau en interprète complète, remarquable performeuse, habitée jusque dans ses rires (dont elle n’est pas avare)… on s’y attendait un peu – sans doute pas à ce point, cependant. Soutenue par un groupe sobre juste comme il faut, elle transmet vitalité, bonne humeur et humour à un public qui – est-il utile de le préciser ? – n’attendait que cela pour taper dans les mains, ou des pieds, ou chanter (des paroles qu’il semble dans sa grande majorité comprendre, le veinard, quand notre portugais à nous demeure assez rudimentaire 2).
Il y a donc inévitablement cette grâce, cette chanteuse fascinante, sans âge. Mais il y a aussi des musiciens remarquables, sans passeport, dépositaires d’une formule pour le moins imparable. On s’étonnera une fois encore que chez nous, Deolinda soit si souvent rapproché du fado, ce qui revient presque à considérer que Tue-Loup joue du musette ou des valses. Deolinda est avant tout un formidable groupe de jazz-folk, qui s’il puise sans complexe dans son héritage national tire avant tout sa spécificité des influences qu’il y injecte. "Mal por mal", probablement leur meilleure chanson (et, à en juger par l’accueil du public, leur plus populaire), aurait aussi bien sa place à la Nouvelle Orléans 3. Sur la (longue) durée du concert, on entend au moins autant sinon plus de musique tzigane, de sirtaki, de flamenco… que de fado à proprement dire. Détail particulièrement parlant : après avoir annoncé que pour les titres les plus fado de la soirée elle allait se rapprocher du guitariste, comme le veut la tradition, Ana aura bien du mal à rester en place et à ne pas gesticuler. Modernité quand tu nous tiens : même dans un registre plus traditionnel, Deolinda conserve une distance voire une ironie les empêchant de jamais sonner rétro, revival ou toute cette sorte de chose.
Le résultat ? Près de deux heures d’un show envoûtant et enlevé, bien plus léger et rythmé que ce à quoi l’on s’attendait. Les moments les moins captivants auront d’ailleurs été le plus souvent des ballades (pas toutes) qui, c’est vrai, constituent aussi les passages les moins convaincants des albums. Ceci explique sans doute cela – inutile de préciser que dans tous les cas, il s’agit de pur chipotage.
1. A l’heure où nous écrivons ces lignes, leurs deux disques sont dans le top 30 portugais, Canção ao lado ayant atteint le record des cent-vingt-six semaines de présence…
2. « Vão sem mim, que eu vou lá ter » passe encore, mais il n’aurait pas fallu nous en demander beaucoup plus…
3. Impossible d’ailleurs de ne pas relever une similitude troublante entre son intro et celle de la (désormais fameuse) "Treme Song" de John Boutté.
Il y a quelque chose d’absolument gracieux chez Ana Bacalhau, qui n’a pas (que) à voir avec son physique. La chanteuse de Deolinda n’a d’ailleurs pas grand-chose de la beauté conventionnelle et ennuyeuse ; elle est bien mieux que cela : charmante, ravissante. Et d’un charisme assez affolant, que l’on n’avait pas réellement mesuré avant de découvrir le groupe sur scène. En fait, on n’avait pas mesuré grand-chose, mis à part que les albums de ce quatuor portugais, que l’on suit depuis déjà quelques années, étaient très bons. Ce soir, on a compris presque immédiatement pourquoi Deolinda était devenu l’un des orchestres les plus populaires de son pays 1.
Il y a donc évidemment cette grâce, cette chanteuse extraordinaire – à tout point de vue. La performance vocale est de très haut niveau, mais cela, on le savait déjà. Découvrir Ana Bacalhau en interprète complète, remarquable performeuse, habitée jusque dans ses rires (dont elle n’est pas avare)… on s’y attendait un peu – sans doute pas à ce point, cependant. Soutenue par un groupe sobre juste comme il faut, elle transmet vitalité, bonne humeur et humour à un public qui – est-il utile de le préciser ? – n’attendait que cela pour taper dans les mains, ou des pieds, ou chanter (des paroles qu’il semble dans sa grande majorité comprendre, le veinard, quand notre portugais à nous demeure assez rudimentaire 2).
Il y a donc inévitablement cette grâce, cette chanteuse fascinante, sans âge. Mais il y a aussi des musiciens remarquables, sans passeport, dépositaires d’une formule pour le moins imparable. On s’étonnera une fois encore que chez nous, Deolinda soit si souvent rapproché du fado, ce qui revient presque à considérer que Tue-Loup joue du musette ou des valses. Deolinda est avant tout un formidable groupe de jazz-folk, qui s’il puise sans complexe dans son héritage national tire avant tout sa spécificité des influences qu’il y injecte. "Mal por mal", probablement leur meilleure chanson (et, à en juger par l’accueil du public, leur plus populaire), aurait aussi bien sa place à la Nouvelle Orléans 3. Sur la (longue) durée du concert, on entend au moins autant sinon plus de musique tzigane, de sirtaki, de flamenco… que de fado à proprement dire. Détail particulièrement parlant : après avoir annoncé que pour les titres les plus fado de la soirée elle allait se rapprocher du guitariste, comme le veut la tradition, Ana aura bien du mal à rester en place et à ne pas gesticuler. Modernité quand tu nous tiens : même dans un registre plus traditionnel, Deolinda conserve une distance voire une ironie les empêchant de jamais sonner rétro, revival ou toute cette sorte de chose.
Le résultat ? Près de deux heures d’un show envoûtant et enlevé, bien plus léger et rythmé que ce à quoi l’on s’attendait. Les moments les moins captivants auront d’ailleurs été le plus souvent des ballades (pas toutes) qui, c’est vrai, constituent aussi les passages les moins convaincants des albums. Ceci explique sans doute cela – inutile de préciser que dans tous les cas, il s’agit de pur chipotage.
1. A l’heure où nous écrivons ces lignes, leurs deux disques sont dans le top 30 portugais, Canção ao lado ayant atteint le record des cent-vingt-six semaines de présence…
2. « Vão sem mim, que eu vou lá ter » passe encore, mais il n’aurait pas fallu nous en demander beaucoup plus…
3. Impossible d’ailleurs de ne pas relever une similitude troublante entre son intro et celle de la (désormais fameuse) "Treme Song" de John Boutté.