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Chaque fois que j'ouvre un livre de Montherlant, je suis parcouru par le même sentiment étrange. Je commence en me disant que décidément, ce n'est pas aussi bien que l'on dit, et même pas aussi bien que je le dis moi-même lorsque l'on m'interroge sur le sujet. J'avance un peu, relativement à reculons, je me dis que ça ne va nulle part, que ce n'est pas la littérature que j'aime, que c'est même assez limité - esthétiquement parlant. Et puis en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire j'ai terminé le bouquin, et je m'aperçois que ce fut une expérience ravissante.
En fait, Montherlant est un auteur qui me fascine. Peut-être en partie parce que je ne l'ai jamais complètement compris. Ses romans, bien souvent, et Le Démon du Bien en est l'une des plus splendides illustrations, ne racontent pas grand-chose. Il n'y a généralement en tout et pour tout qu'un seul personnage digne de ce nom, deux dans les bons jours (Le Démon du bien a été écrit dans un de ceux-là). De toute façon le plus grand personnage que Montherlant ait jamais créé, c'est Montherlant lui-même.
Chaque fois que j'ouvre un de ses livres je suis donc à la fois charmé et stupéfait. Charmé par une écriture proche de la perfection, stupéfait parce qu'elle est toujours contrebalancée par les innombrables faiblesses narratives qui l'encadrent. Montherlant est un auteur incroyable parce que tragiquement imparfait, parce que donnant souvent une impression de paresse, parce que ne résistant, dans ses romans et dans son théâtre, qu'à très peu de facilités. Ainsi n'aime-t-il rien tant que reproduire de longues discussions, toujours vaguement provocatrices, ne racontant somme toute pas grand-chose, et n'aidant jamais à faire avancer le récit. Pour un peu qu'il y en ait un. Le Démon du Bien pourrait difficilement prétendre à ce titre ; avant toute autre chose, il est un catalogue d'aphorismes (le plus souvent grandioses) quant à la vie, l'homme, et le mariage (une monstruosité qui fait sourire, forcément, en 2010... il faut bien évidemment, pour savourer tout le piquant de la chose, remplacer mariage par couple, ce qui revient de toute façon au même en 1937). Ce qui est presque effrayant, c'est que Le Démon du Bien donne très régulièrement l'impression de n'être qu'un interminable empilage de clichés, stéréotypes et idées préconçues que l'on pourrait qualifier de libertarisme réactionnaire (à moins que ce ne soit le contraire). C'est effrayant parce que c'est bien, parce que c'est drôle, parce que le rythme est soutenu et que les mots s'entrechoquent de manière très naturelle.
Vous l'avez sans doute compris, j'adore Montherlant. Je suis prêt à lui trouver toutes les excuses du monde, et le pire c'est que je ne sais même pas pourquoi. Peut-être qu'il me rassure. Il est un grand écrivain qui ne fait pas peur. Il n'est pas une statue du commandeur, plutôt un génie que ses faiblesses rendent attachant. Il doit y avoir de cela.
Le Démon du Bien, de Henry de Montherlant (1937)
Chaque fois que j'ouvre un livre de Montherlant, je suis parcouru par le même sentiment étrange. Je commence en me disant que décidément, ce n'est pas aussi bien que l'on dit, et même pas aussi bien que je le dis moi-même lorsque l'on m'interroge sur le sujet. J'avance un peu, relativement à reculons, je me dis que ça ne va nulle part, que ce n'est pas la littérature que j'aime, que c'est même assez limité - esthétiquement parlant. Et puis en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire j'ai terminé le bouquin, et je m'aperçois que ce fut une expérience ravissante.
En fait, Montherlant est un auteur qui me fascine. Peut-être en partie parce que je ne l'ai jamais complètement compris. Ses romans, bien souvent, et Le Démon du Bien en est l'une des plus splendides illustrations, ne racontent pas grand-chose. Il n'y a généralement en tout et pour tout qu'un seul personnage digne de ce nom, deux dans les bons jours (Le Démon du bien a été écrit dans un de ceux-là). De toute façon le plus grand personnage que Montherlant ait jamais créé, c'est Montherlant lui-même.
Chaque fois que j'ouvre un de ses livres je suis donc à la fois charmé et stupéfait. Charmé par une écriture proche de la perfection, stupéfait parce qu'elle est toujours contrebalancée par les innombrables faiblesses narratives qui l'encadrent. Montherlant est un auteur incroyable parce que tragiquement imparfait, parce que donnant souvent une impression de paresse, parce que ne résistant, dans ses romans et dans son théâtre, qu'à très peu de facilités. Ainsi n'aime-t-il rien tant que reproduire de longues discussions, toujours vaguement provocatrices, ne racontant somme toute pas grand-chose, et n'aidant jamais à faire avancer le récit. Pour un peu qu'il y en ait un. Le Démon du Bien pourrait difficilement prétendre à ce titre ; avant toute autre chose, il est un catalogue d'aphorismes (le plus souvent grandioses) quant à la vie, l'homme, et le mariage (une monstruosité qui fait sourire, forcément, en 2010... il faut bien évidemment, pour savourer tout le piquant de la chose, remplacer mariage par couple, ce qui revient de toute façon au même en 1937). Ce qui est presque effrayant, c'est que Le Démon du Bien donne très régulièrement l'impression de n'être qu'un interminable empilage de clichés, stéréotypes et idées préconçues que l'on pourrait qualifier de libertarisme réactionnaire (à moins que ce ne soit le contraire). C'est effrayant parce que c'est bien, parce que c'est drôle, parce que le rythme est soutenu et que les mots s'entrechoquent de manière très naturelle.
Vous l'avez sans doute compris, j'adore Montherlant. Je suis prêt à lui trouver toutes les excuses du monde, et le pire c'est que je ne sais même pas pourquoi. Peut-être qu'il me rassure. Il est un grand écrivain qui ne fait pas peur. Il n'est pas une statue du commandeur, plutôt un génie que ses faiblesses rendent attachant. Il doit y avoir de cela.
Le Démon du Bien, de Henry de Montherlant (1937)
Bel hommage. Je ne lis plus cet auteur depuis longtemps. Peur sans doute que cela ait beaucoup vieilli.
RépondreSupprimerVoilà un auteur dont je ne sais strictement rien, à part son nom (pourquoi je ne sais pas, des citations dans d'autres livres ?) et ce que tu en dis :-))) tss tss que faire ?
RépondreSupprimerIl y a donc encore des gens qui lisent Montherlant ?
RépondreSupprimerBBB. >>> je trouve que la littérature des années 30, de manière générale, a beaucoup vieilli.
RépondreSupprimeryueyin >>> que faire ? Lire Les Jeunes Filles, par exemple :-)
H.V. >>> rassurez-vous, je suis le seul, comme en témoignent les commentaires ci-dessus ;-)
Lu une fois une pièce de théâtre de l'auteur, mais je n'avais pas été emballé.
RépondreSupprimerPour la littérature de années 30, je te trouve assez sévère. Outre Céline (bien entendu), d'autres auteurs méritent qu'on s'y attarde, comme Giono ou Malraux.
Parce que Giono ou Malraux ça n'a pas vieilli ? :-)
RépondreSupprimerBonjour. Je viens de découvrir Henry de Montherlant il y a peu, en lisant, sans rien connaitre de l'auteur -si ce n'est son nom-, "Les Célibataires", livre trouvé, et choisi au hasard, parmi d'autres, au rebut d'un tri papier/carton, avant le démembrement fatal et le recyclage définitif... Dès les deux premières pages du roman, Montherlant me mit le grappin dessus définitivement, ce fut comme une évidence. J'ai adoré "Les Célibataires" et j'adore également "La rose de sable" que je lis en ce moment. Cet auteur oublié est un diamant précieux, enfoui six pieds sous terre, par une nuit sans lune et le silence infini d'un monde endormi.
RépondreSupprimer"Il humait vaguement le visage de cette femme, pareil à un lion qui déchiquetant la viande qu'il tient entre ses pattes de temps en temps s'arrête pour la lécher" : les jeunes filles" Diamant précieux ? Mépris des femmes, mépris des patriotes résistants durant l'occupation. Quel être méprisable et lâche face à un homme!!!
RépondreSupprimerVous commentez un billet vieux de plus de 13 ans en invectivant un commentateur dont le message, auquel personne n'a répondu parce que personne ne l'a vu, remonte à un an... tout va bien pour vous, sinon ?
SupprimerJe ne connais pas cet auteur si ce n est de nom... j aimerais essayer... quelle œuvre conseilleriez-vous pour une découverte ? Bien à vous.
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