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Les réacs de la musique, il y en a et pas qu'un seul, n'aiment rien tant qu'à vous expliquer qu'Internet et le numérique ont tué la musique, l'ont vidée de toute valeur, pour finir par éradiquer ce qui faisait l'essence même de ses amoureux (dont les réacs de la musique espèrent bien sûr secrètement être les derniers survivants). C'est-à-dire l'excitation de la quête, le plaisir intense de la découverte, la joie suscitée au hasard d'un achat, sur un coup de tête ou une intuition. Outre que l'excitation de la quête est un plaisir très surfait (combien de fois avons-nous cherché un album durant des années pour finalement, une fois acquis à un prix aberrant, nous apercevoir que seuls deux titres valaient le détour ?), on voit mal en quoi toutes ces choses ont pu bien pu disparaître en 2010. La plupart des albums qui nous accompagnent persistent à nous tomber dessus le plus souvent de manière accidentelle, par hasard, coïncidence, fatalité même, pourquoi pas. Qu'a changé le Net à tout cela, dans le fond ? Il n'y a que les fétichistes pour voir une différence. Que la musique soit un objet ou qu'elle se clique, la fascination, le plaisir extatique de la découverte... le coup de foudre pur et simple, tout cela n'a pas changé, tout cela ne changera jamais. Et l'on persistera à se moquer des argumentations hypocrites défendant un vieux monde disparu depuis bien longtemps.
Le premier album de Peau m'est parvenu à l'ancienne, c'est-à-dire par hasard. Pré-adolescent, je remontais le fil invisible de la musique, sautant de nom en nom, d'interview en chroniques, je griffonnais des titres, m'empressais d'aller les écouter. Aujourd'hui je ne fais que sauter de lien en lien, d'une certaine manière c'est presque plus concret. Je flânais donc sur la toile, un matin, me demandant ce qu'étaient devenus les anciens membres de Virago. J'adorais ce groupe il y a dix ans mais je ne m'étais, je l'avoue, jamais posé cette question. C'est ainsi que je découvris, au détour d'un site ou d'un blog, je ne sais plus, qu'Olivier Depardon, hurleur sublime de feu le groupe grenoblois, avait produit le premier album d'une jeune femme disait-on fascinante (certains osaient même écrire géniale). Peau, s'appelait-elle, nom simple et aussi peu engageant que la pochette du disque (quand je vous disais que tout se faisait encore à l'ancienne). Curieux, je cliquai sur un lien, puis un autre, puis arrivai sur deezer... etc.
Ma première réaction fut de rester muet en face d'un morceau, éponyme, dont les beats hypnotiques touchaient aisément au but. La seconde, quelques instants plus tard et alors que l'album s'emballait, fut de me demander comment il était possible qu'aucun de mes camarades blogueurs n'ait chroniqué cet album troublant, éclaté et parfois d'une beauté à couper le souffle. On m'expliquera après cela que non, pas du tout, personne n'a plus de problème avec la musique francophone en 2010. Mouais.
Ce qui m'a surpris dans un second temps, c'est à quel point les quelques articles glanés sur Première mue paraissent peiner à le catégoriser. Untel évoquait Émilie Simon, tel autre parlait de Birkin, un troisième allait carrément chercher Robert Wyatt (?). L'ensemble est effectivement délicat à classifier (ce à quoi les démagos de la musique répondront "à quoi bon ?"), mais c'est moins parce qu'il ne ressemble à rien de connu que parce qu'il part un peu dans tous les sens. C'est à la fois sa faiblesse et sa force : on perd parfois le fil, tout en étant ébloui par la multiplicité de l'ouvrage, qui parvient malgré tout (et de manière assez improbable) à demeurer soniquement cohérent. Par bien des aspects, Première mue constitue un genre de cas d'école, de premier album presque quintessenciel : solide et régulièrement brillant, tout en jouant un rôle de carte de visite de l'artiste, qui y explore bien des genres (de l'électro à la pop en passant par la folk) en retombant systématiquement sur ses pieds. Et qui en profite bien évidemment pour dévoiler les contours d'un univers tout à fait personnel, que l'on préfèrera le cas échéant dans ses passages les plus intimistes. "Guerre longue" est aussi belle que ce que son titre suggère, quand "Litanie" rappelle l'urgence et l'angoisse d'encre, autre grand groupe français dont on est sans nouvelles depuis un moment. Après les promesses, passé le potentiel, ces deux morceaux ouvrent une dernière ligne droite de l'album dans laquelle Peau achève de parfaitement s'imposer, de plus en plus minimaliste ("Breath"), pour en définitive s'échouer sur les rives du post-rock ("Une petite pluie", "A Few Things").
Bien sûr, passée la fascination de départ, on entrevoit ici ou là quelques coutures. On doit modérer un peu ses ardeurs, par principe ou quasiment, mais le coup de foudre aura laissé d'autant plus de traces que l'on ne savait absolument pas où l'on s'aventurait en débutant l'écoute. Il faut y aller et ne pas hésiter à y retourner, tant Première mue (dont le titre, quelque part, disait déjà tout) recèle de choses susceptibles de happer l'auditeur. Vous ne déciderez pas réellement de l'écouter, non. Vous vous noierez dedans.
Première mue, de Peau (2010)
Les réacs de la musique, il y en a et pas qu'un seul, n'aiment rien tant qu'à vous expliquer qu'Internet et le numérique ont tué la musique, l'ont vidée de toute valeur, pour finir par éradiquer ce qui faisait l'essence même de ses amoureux (dont les réacs de la musique espèrent bien sûr secrètement être les derniers survivants). C'est-à-dire l'excitation de la quête, le plaisir intense de la découverte, la joie suscitée au hasard d'un achat, sur un coup de tête ou une intuition. Outre que l'excitation de la quête est un plaisir très surfait (combien de fois avons-nous cherché un album durant des années pour finalement, une fois acquis à un prix aberrant, nous apercevoir que seuls deux titres valaient le détour ?), on voit mal en quoi toutes ces choses ont pu bien pu disparaître en 2010. La plupart des albums qui nous accompagnent persistent à nous tomber dessus le plus souvent de manière accidentelle, par hasard, coïncidence, fatalité même, pourquoi pas. Qu'a changé le Net à tout cela, dans le fond ? Il n'y a que les fétichistes pour voir une différence. Que la musique soit un objet ou qu'elle se clique, la fascination, le plaisir extatique de la découverte... le coup de foudre pur et simple, tout cela n'a pas changé, tout cela ne changera jamais. Et l'on persistera à se moquer des argumentations hypocrites défendant un vieux monde disparu depuis bien longtemps.
Le premier album de Peau m'est parvenu à l'ancienne, c'est-à-dire par hasard. Pré-adolescent, je remontais le fil invisible de la musique, sautant de nom en nom, d'interview en chroniques, je griffonnais des titres, m'empressais d'aller les écouter. Aujourd'hui je ne fais que sauter de lien en lien, d'une certaine manière c'est presque plus concret. Je flânais donc sur la toile, un matin, me demandant ce qu'étaient devenus les anciens membres de Virago. J'adorais ce groupe il y a dix ans mais je ne m'étais, je l'avoue, jamais posé cette question. C'est ainsi que je découvris, au détour d'un site ou d'un blog, je ne sais plus, qu'Olivier Depardon, hurleur sublime de feu le groupe grenoblois, avait produit le premier album d'une jeune femme disait-on fascinante (certains osaient même écrire géniale). Peau, s'appelait-elle, nom simple et aussi peu engageant que la pochette du disque (quand je vous disais que tout se faisait encore à l'ancienne). Curieux, je cliquai sur un lien, puis un autre, puis arrivai sur deezer... etc.
Ma première réaction fut de rester muet en face d'un morceau, éponyme, dont les beats hypnotiques touchaient aisément au but. La seconde, quelques instants plus tard et alors que l'album s'emballait, fut de me demander comment il était possible qu'aucun de mes camarades blogueurs n'ait chroniqué cet album troublant, éclaté et parfois d'une beauté à couper le souffle. On m'expliquera après cela que non, pas du tout, personne n'a plus de problème avec la musique francophone en 2010. Mouais.
Ce qui m'a surpris dans un second temps, c'est à quel point les quelques articles glanés sur Première mue paraissent peiner à le catégoriser. Untel évoquait Émilie Simon, tel autre parlait de Birkin, un troisième allait carrément chercher Robert Wyatt (?). L'ensemble est effectivement délicat à classifier (ce à quoi les démagos de la musique répondront "à quoi bon ?"), mais c'est moins parce qu'il ne ressemble à rien de connu que parce qu'il part un peu dans tous les sens. C'est à la fois sa faiblesse et sa force : on perd parfois le fil, tout en étant ébloui par la multiplicité de l'ouvrage, qui parvient malgré tout (et de manière assez improbable) à demeurer soniquement cohérent. Par bien des aspects, Première mue constitue un genre de cas d'école, de premier album presque quintessenciel : solide et régulièrement brillant, tout en jouant un rôle de carte de visite de l'artiste, qui y explore bien des genres (de l'électro à la pop en passant par la folk) en retombant systématiquement sur ses pieds. Et qui en profite bien évidemment pour dévoiler les contours d'un univers tout à fait personnel, que l'on préfèrera le cas échéant dans ses passages les plus intimistes. "Guerre longue" est aussi belle que ce que son titre suggère, quand "Litanie" rappelle l'urgence et l'angoisse d'encre, autre grand groupe français dont on est sans nouvelles depuis un moment. Après les promesses, passé le potentiel, ces deux morceaux ouvrent une dernière ligne droite de l'album dans laquelle Peau achève de parfaitement s'imposer, de plus en plus minimaliste ("Breath"), pour en définitive s'échouer sur les rives du post-rock ("Une petite pluie", "A Few Things").
Bien sûr, passée la fascination de départ, on entrevoit ici ou là quelques coutures. On doit modérer un peu ses ardeurs, par principe ou quasiment, mais le coup de foudre aura laissé d'autant plus de traces que l'on ne savait absolument pas où l'on s'aventurait en débutant l'écoute. Il faut y aller et ne pas hésiter à y retourner, tant Première mue (dont le titre, quelque part, disait déjà tout) recèle de choses susceptibles de happer l'auditeur. Vous ne déciderez pas réellement de l'écouter, non. Vous vous noierez dedans.
Découvrez la playlist Peau - Première mue avec Peau
Première mue, de Peau (2010)
Simple message pour dire qu'il est disponible sur emusic : http://www.emusic.com/album/Peau-Premi%C3%A8re-mue-MP3-Download/11868808.html?exclude=artist&sflIndex=0&sflAction=save
RépondreSupprimerEt rien d'autre à dire actuellement puisque je n'avais jamais entendu parler de Peau...
Si : bonne année, à toi, Glob!
Pas mal ce morceau. Pas mal du tout...
RépondreSupprimerQue c'est bien ce morceau!
RépondreSupprimerJe vais de ce pas utiliser le lien de Mmarsupilami.
Merci! (à tous les deux ^^)
Tout un paragraphe sur moi sur le Golb. La classe... :-)
RépondreSupprimerCe morceau est vraiment fascinant. C'est vrai qu'Encre n'est pas loin.
RépondreSupprimermerdre, je suis sous le charme de la première écoute de ce morceau... comme un tourbillon qui semble mener la demoiselle à la syncope
RépondreSupprimerAh ! je suis bien content que ça vous plaise, les amis.
RépondreSupprimerP.S. : bonne année à toi, Mmarsu !
j'aime beaucoup la musique, qui me rappelle un peu Tiersen.
RépondreSupprimerj'ai du mal en revanche avec ce susurrement humide, et les paroles....
tu peus faire un deuxieme tour tout nu dans ton salon ;-)
RépondreSupprimerc'est très très très bon
Xavier >>> mais tu as écouté les autres morceaux ? Parce que le chant est assez différent d'un titre à l'autre...
RépondreSupprimerDiane >>> le truc c'est que j'habite au rez-de-chaussée, c'est un peu gênant, il y a plein de petites vieilles qui passent sous ma fenêtre...
De toute façon je n'en suis plus là. Maintenant je suis à deux doigts de m'ériger une statue dans ma salle de bain.
Non, si je trouve le disque à la médiathèque je le prend pour en avoir le coeur net...
RépondreSupprimer(la statue dans la salle de bain... très pratique pour accrocher les serviettes...)
@Thom
RépondreSupprimerbah ça leur fera plaisir aux vieilles, un beau gaillards comme toi!
@xavier
http://www.deezer.com/en/music/peau/premiere-mue-514053?provider=widget#music/peau/premiere-mue-514053
merci Diane, mais je n'ai hélas pas le droit d'écouter de musique au boulot (d'ailleurs deezer est bloqué), et pas le temps de rester derrière l'ordi chez moi...
RépondreSupprimerOn fait ce qu'on peut ^^
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