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Sans tambour, trompettes ni fioritures (ou presque), Jason Robert « Papercuts » Quever poursuit son bonhomme de chemin. Désormais chez Sub Pop après s’être émancipé sur le label de Devendra Banhart, dont on sait qu’il a bien meilleur goût que ce que ses albums inégaux laissent supposer, il publie ce mois-ci un (déjà) cinquième album au titre délicieux, Fading Parade, après un fort joli You Can Have What You Want il y a deux ans, lui-même suivi d’une fort jolie tournée où l’on avait découvert avec une certaine émotion sa pop un peu foutraque et son indicible séduction scénique.
« Joli », le mot est lâché, et c’est le mot juste. Dans une époque où tout le monde vire opportunément garage et où il suffit de sonner vaguement lo/fi pour être porté aux nues par le landerneau indie, Papercuts fait figure d’anomalie, qui semble incapable de produire autre chose qu’une musique jolie, bien écrite, bien produite, parfois emphatique mais toujours intimiste – autant dire que le garçon est définitivement perdu pour le succès de masse. L’archétype de l’artiste imperméable aux modes, discret et attachant, jamais suffisamment génial pour être complètement culte, trop brillant et touchant pour ne pas drainer un petit public de fidèles attendant religieusement un nouvel album dont ils savent à l’avance qu’il ne les décevra pas.
Et en effet : Fading Parade ne déçoit pas une seconde. Rien d’étonnant venant de celui qui a su devenir, au fil des années, l’un des songwriters les plus réguliers de la scène indé américaine. En fait, Fading Parade est même encore meilleur que ce que l’on était en droit d’attendre d’un type qui nous avait habitué, depuis le temps, à n’être jamais exceptionnel – mais toujours très bon. Sans rien trahir de ce pourquoi on l’aimait, Quever semble avoir nettement revu ses ambitions à la hausse et signe ici, au milieu de titres plus conventionnels, une poignée d’autres nettement supérieurs à la moyenne de sa production. Dès les premières mesures de "Do You Really Want to Know?", particulièrement entraînant, on est frappé par cette progression et ce sentiment que Papercuts n’a jamais aussi bien sonné. Il est vrai que Quever s’est adjoint pour l’occasion les services de Tom Monahan, pas vraiment le plus manchot des producteurs américains contemporains, puisqu’on lui doit entre autres les deux chefs-d’œuvre des méconnus Pernice Brothers (The World Won’t End et Yours, Mine & Ours).
Le résultat est une pop de plus en plus vaporeuse, onirique… dream au sens le plus strict du terme. Et parfois carrément brillante, lorsqu’elle s’aventure à mélanger le catchy et le planant ("Chills", "Do What You Will") ou lorsque Quever signe, sans avoir l’air d’y toucher et sans lyrisme excessif, deux des plus belles ballades de l’année (la presque jazzy de "The Messenger", et surtout "I’ll See You Later" I Guess, éthérée, malheureuse comme les pierres… Magnifique). On regrette d’autant plus que l’ensemble manque parfois un peu de soufre, ce qui reste le principal défaut de la musique de Papercuts : si elle parvient à être douce et délicate sans jamais sembler soporifique, elle conserve ce côté un peu languide donnant parfois envie de mettre un petit coup de pied aux fesses de Jason. Un peu de morgue ne dépareillerait par instants (au hasard sur "Marie Says You’ve Changed"), mais peut-être n’est-ce pas dans sa nature. Cela n’enlève rien, de toute manière, à la majesté se dégageant de cette parade pas si terne que ce que suggère l’intitulé. Valeur mineure devenue valeur sûre, Papercuts vient de franchir un nouveau cap. Qui sait où il nous emmènera à l’avenir ?
Fading Parade, de Papercuts (2011)
Sans tambour, trompettes ni fioritures (ou presque), Jason Robert « Papercuts » Quever poursuit son bonhomme de chemin. Désormais chez Sub Pop après s’être émancipé sur le label de Devendra Banhart, dont on sait qu’il a bien meilleur goût que ce que ses albums inégaux laissent supposer, il publie ce mois-ci un (déjà) cinquième album au titre délicieux, Fading Parade, après un fort joli You Can Have What You Want il y a deux ans, lui-même suivi d’une fort jolie tournée où l’on avait découvert avec une certaine émotion sa pop un peu foutraque et son indicible séduction scénique.
« Joli », le mot est lâché, et c’est le mot juste. Dans une époque où tout le monde vire opportunément garage et où il suffit de sonner vaguement lo/fi pour être porté aux nues par le landerneau indie, Papercuts fait figure d’anomalie, qui semble incapable de produire autre chose qu’une musique jolie, bien écrite, bien produite, parfois emphatique mais toujours intimiste – autant dire que le garçon est définitivement perdu pour le succès de masse. L’archétype de l’artiste imperméable aux modes, discret et attachant, jamais suffisamment génial pour être complètement culte, trop brillant et touchant pour ne pas drainer un petit public de fidèles attendant religieusement un nouvel album dont ils savent à l’avance qu’il ne les décevra pas.
Et en effet : Fading Parade ne déçoit pas une seconde. Rien d’étonnant venant de celui qui a su devenir, au fil des années, l’un des songwriters les plus réguliers de la scène indé américaine. En fait, Fading Parade est même encore meilleur que ce que l’on était en droit d’attendre d’un type qui nous avait habitué, depuis le temps, à n’être jamais exceptionnel – mais toujours très bon. Sans rien trahir de ce pourquoi on l’aimait, Quever semble avoir nettement revu ses ambitions à la hausse et signe ici, au milieu de titres plus conventionnels, une poignée d’autres nettement supérieurs à la moyenne de sa production. Dès les premières mesures de "Do You Really Want to Know?", particulièrement entraînant, on est frappé par cette progression et ce sentiment que Papercuts n’a jamais aussi bien sonné. Il est vrai que Quever s’est adjoint pour l’occasion les services de Tom Monahan, pas vraiment le plus manchot des producteurs américains contemporains, puisqu’on lui doit entre autres les deux chefs-d’œuvre des méconnus Pernice Brothers (The World Won’t End et Yours, Mine & Ours).
Le résultat est une pop de plus en plus vaporeuse, onirique… dream au sens le plus strict du terme. Et parfois carrément brillante, lorsqu’elle s’aventure à mélanger le catchy et le planant ("Chills", "Do What You Will") ou lorsque Quever signe, sans avoir l’air d’y toucher et sans lyrisme excessif, deux des plus belles ballades de l’année (la presque jazzy de "The Messenger", et surtout "I’ll See You Later" I Guess, éthérée, malheureuse comme les pierres… Magnifique). On regrette d’autant plus que l’ensemble manque parfois un peu de soufre, ce qui reste le principal défaut de la musique de Papercuts : si elle parvient à être douce et délicate sans jamais sembler soporifique, elle conserve ce côté un peu languide donnant parfois envie de mettre un petit coup de pied aux fesses de Jason. Un peu de morgue ne dépareillerait par instants (au hasard sur "Marie Says You’ve Changed"), mais peut-être n’est-ce pas dans sa nature. Cela n’enlève rien, de toute manière, à la majesté se dégageant de cette parade pas si terne que ce que suggère l’intitulé. Valeur mineure devenue valeur sûre, Papercuts vient de franchir un nouveau cap. Qui sait où il nous emmènera à l’avenir ?
Fading Parade, de Papercuts (2011)
Un peu triste, comme réveil, mais très belle chanson. Je vais m'empresser de trouver l'album.
RépondreSupprimerJ'avoue que je ne connaissais pas du tout.
RépondreSupprimerMais j'aime beaucoup ce que j'entends.
Oui, il est vraiment chouette.
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