La vie continue à Los Angeles, ses trafics et ses deals, ses crimes, son interminable liste de faits divers sordides ou simplement révoltants. La vie continue et les flics de Southland continuent de la traverser comme ils le peuvent, souvent mal, avançant comme mus par des forces invisibles dont on n'est pas tout à fait sûr qu'elles ne les rongent pas de l'intérieur.
Et puis c'est tout. En cette troisième saison il faut le reconnaître particulièrement intense, la série pilotée par John Wells ne s'écarte pas de ses fondamentaux, mais il serait assez difficile d'affirmer sans mentir qu'elle va beaucoup plus loin. Elle ne manque pas de qualités, casting solide (Michael Cudlitz et Regina King, notamment, sont brillants... et l'étaient d'ailleurs déjà dans les deux premières saisons), dialogues souvent percutants et refus de la facilité forçant le respect. Dans Southland point de romance, de glamour, de sexy. Juste de la sueur et du nerf, un sentiment d'urgence permanente et des personnages plus torturés que les uns que les autres, dévorés par leur métier... dévorés, même, par cette ville occupant une place centrale dans le récit.
D'où vient alors que je semble ainsi sur la réserve ? Disons qu'en dehors de ses qualités objectives, Southland m'a parfois ennuyé, cette saison comme les précédentes. On a eu beau essayer de me la vendre comme une série exceptionnelle, elle ne raconte pas grand-chose de rare, et certainement pas d'une manière suffisamment originale pour que la forme compense certaines carences de fond. Ce point de vue n'a rien de nouveau : je pensais déjà peu ou prou la même chose en novembre dernier, lorsque j'évoquais ce show pour la première fois. Ce qui a changé et n'a fait qu'accentuer ma perplexité, c'est que cette troisième saison, diffusée à partir de janvier, s'est attirée des critiques à ce point dithyrambiques que j'en suis parfois venu à douter de mon propre avis. Qu'on puisse aimer Southland, voire l'adorer, n'a rien de surprenant en soi. Qu'on l'élève au rang de "grande série" est en revanche plus étonnant.
Dans le fond, il n'y a pas dix mille manières pour une série de devenir "grande". Premier cas de figure : proposer une innovation formelle qui marquera son époque, dans la narration, la mise en scène ou le traitement des personnages - peu importe. Dans le genre policier, on citera Hill Street Blues et sa cousine NYPD Blue, ainsi que Law & Order, qui chacune à sa manière a modifié l'approche que l'on a eu des cop-shows durant les années suivantes. On notera au passage que leur universalité est inversement proportionnelle à la révolution qu'elle provoquèrent : difficile aujourd'hui, sans une bonne connaissance du genre, de comprendre en quoi NYPD Blue révolutionna l'univers des séries télévisées. Southland, c'est une évidence, n'entre pas dans cette catégorie. Son écriture est très conventionnelle, et sa manière de filmer caméra à l'épaule n'a plus grand-chose de novateur depuis au moins dix ans. Quant à ses personnages, s'ils sont bien dessinés, bien joués, crédibles et attachant, difficile de se dire qu'ils hanteront le spectateur comme ont pu le faire un Andy Sipowicz ou un Vic Mackey, personnages de fictions devenus tellement plus dans l'imaginaire collectifs des seriephages.
Second cas de figure : dépasser son a priori de départ, transcender son concept, être plus qu'une simple série. Pour rester dans le genre policier, les deux cas les plus évidents sont The Wire et The Shield : la première est progressivement devenue une fresque humaniste extraordinaire, changeant Baltimore en quasi allégorie de la Comédie Humaine, créant un souffle épique d'autant plus bluffant qu'elle ne se compose quasiment que de scènes du quotidien ; plus modestement, la seconde a su devenir au fil des saisons une fascinante tragédie shakespearienne, parcourue par une noirceur, une violence et une désespérance comme on en aura peu vues à la télévision. Détail important : toutes deux partaient pourtant sur une base hyper-réaliste, s'inspirant de faits voire de personnes réelles (concernant The Wire, tout le monde le sait ; concernant The Shield, rappelons que la Strike Team est inspirée d'une véritable unité d'intervention et que la série est une véritable mine d'informations sur l'étude des gangs de L.A.). Un réalisme transcendé qui, dans les deux cas, sert de terreau à la fiction, qui le tire vers le haut pour tendre vers le Beau (en tant que concept, bien sûr). Southland, aussi réussie soit-elle, n'est pas comparable une seconde à ces deux séries, auxquelles pourtant on l'a vue régulièrement comparée positivement ces derniers mois. Elle ne dépasse jamais son argument de "série policière quasi documentaire", arrimée à son obsession du réalisme, engoncée dans sa volonté de ne jamais trop en faire. On peut présenter The Wire ou The Shield de mille manières, les mots souvent manquent pour le faire. Présenter Southland prend une phrase : cette série narre la vie quotidienne d'une brigade de police de Los Angeles. Cela ne la rend pas mauvaise. On appelle ça le sens de la mesure, qualité (défaut ?) dont Southland ne manque d'ailleurs pas.
Southland (saison 3), créée par Ann Biderman (TNT, 2011)
Et puis c'est tout. En cette troisième saison il faut le reconnaître particulièrement intense, la série pilotée par John Wells ne s'écarte pas de ses fondamentaux, mais il serait assez difficile d'affirmer sans mentir qu'elle va beaucoup plus loin. Elle ne manque pas de qualités, casting solide (Michael Cudlitz et Regina King, notamment, sont brillants... et l'étaient d'ailleurs déjà dans les deux premières saisons), dialogues souvent percutants et refus de la facilité forçant le respect. Dans Southland point de romance, de glamour, de sexy. Juste de la sueur et du nerf, un sentiment d'urgence permanente et des personnages plus torturés que les uns que les autres, dévorés par leur métier... dévorés, même, par cette ville occupant une place centrale dans le récit.
D'où vient alors que je semble ainsi sur la réserve ? Disons qu'en dehors de ses qualités objectives, Southland m'a parfois ennuyé, cette saison comme les précédentes. On a eu beau essayer de me la vendre comme une série exceptionnelle, elle ne raconte pas grand-chose de rare, et certainement pas d'une manière suffisamment originale pour que la forme compense certaines carences de fond. Ce point de vue n'a rien de nouveau : je pensais déjà peu ou prou la même chose en novembre dernier, lorsque j'évoquais ce show pour la première fois. Ce qui a changé et n'a fait qu'accentuer ma perplexité, c'est que cette troisième saison, diffusée à partir de janvier, s'est attirée des critiques à ce point dithyrambiques que j'en suis parfois venu à douter de mon propre avis. Qu'on puisse aimer Southland, voire l'adorer, n'a rien de surprenant en soi. Qu'on l'élève au rang de "grande série" est en revanche plus étonnant.
Dans le fond, il n'y a pas dix mille manières pour une série de devenir "grande". Premier cas de figure : proposer une innovation formelle qui marquera son époque, dans la narration, la mise en scène ou le traitement des personnages - peu importe. Dans le genre policier, on citera Hill Street Blues et sa cousine NYPD Blue, ainsi que Law & Order, qui chacune à sa manière a modifié l'approche que l'on a eu des cop-shows durant les années suivantes. On notera au passage que leur universalité est inversement proportionnelle à la révolution qu'elle provoquèrent : difficile aujourd'hui, sans une bonne connaissance du genre, de comprendre en quoi NYPD Blue révolutionna l'univers des séries télévisées. Southland, c'est une évidence, n'entre pas dans cette catégorie. Son écriture est très conventionnelle, et sa manière de filmer caméra à l'épaule n'a plus grand-chose de novateur depuis au moins dix ans. Quant à ses personnages, s'ils sont bien dessinés, bien joués, crédibles et attachant, difficile de se dire qu'ils hanteront le spectateur comme ont pu le faire un Andy Sipowicz ou un Vic Mackey, personnages de fictions devenus tellement plus dans l'imaginaire collectifs des seriephages.
Second cas de figure : dépasser son a priori de départ, transcender son concept, être plus qu'une simple série. Pour rester dans le genre policier, les deux cas les plus évidents sont The Wire et The Shield : la première est progressivement devenue une fresque humaniste extraordinaire, changeant Baltimore en quasi allégorie de la Comédie Humaine, créant un souffle épique d'autant plus bluffant qu'elle ne se compose quasiment que de scènes du quotidien ; plus modestement, la seconde a su devenir au fil des saisons une fascinante tragédie shakespearienne, parcourue par une noirceur, une violence et une désespérance comme on en aura peu vues à la télévision. Détail important : toutes deux partaient pourtant sur une base hyper-réaliste, s'inspirant de faits voire de personnes réelles (concernant The Wire, tout le monde le sait ; concernant The Shield, rappelons que la Strike Team est inspirée d'une véritable unité d'intervention et que la série est une véritable mine d'informations sur l'étude des gangs de L.A.). Un réalisme transcendé qui, dans les deux cas, sert de terreau à la fiction, qui le tire vers le haut pour tendre vers le Beau (en tant que concept, bien sûr). Southland, aussi réussie soit-elle, n'est pas comparable une seconde à ces deux séries, auxquelles pourtant on l'a vue régulièrement comparée positivement ces derniers mois. Elle ne dépasse jamais son argument de "série policière quasi documentaire", arrimée à son obsession du réalisme, engoncée dans sa volonté de ne jamais trop en faire. On peut présenter The Wire ou The Shield de mille manières, les mots souvent manquent pour le faire. Présenter Southland prend une phrase : cette série narre la vie quotidienne d'une brigade de police de Los Angeles. Cela ne la rend pas mauvaise. On appelle ça le sens de la mesure, qualité (défaut ?) dont Southland ne manque d'ailleurs pas.
Southland (saison 3), créée par Ann Biderman (TNT, 2011)
Sûr qu'il y a une surestimation de Southland. En même temps, toi, depuis le début, tu n'arrêtes pas de la sous-estimer.
RépondreSupprimerAlors est-ce que ça ne s'équilibre pas ? :-)
Bonne journée.
On peut dire ça ;-)
RépondreSupprimerMais si, c'est très bien, Southland ;-)
RépondreSupprimerMoi je suis complètement d'accord avec toi.
RépondreSupprimerSouthland est une série modeste. Je suis fan de Hill street blues (je crois la première série qui m'a "addictée" avec Clair de Lune) mais on n'est pas aussi fort dans southland. Ceci dit, elle est quand même réussie, et j'aime bien mais sans passion.
Mention spéciale pour Regina King qui est exceptionnelle!
Moi aussi, je suis un grand grand de HSB... et de Regina King ^^
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