...
Amanda Palmer Goes Down Under, d'Amanda Palmer (2011)
Amanda Palmer est décidément un sacré numéro, qui à chaque nouvelle sortie (ce qui arrive souvent) se rapproche un peu plus du cercle très fermé des songwriters dérangés et hyper-prolifiques. Moitié live moitié studio, son second LP solo est un improbable concept-album sur les Antipodes, comme toujours drôle et provocant, coincé entre rires (beaucoup) et larmes (de temps en temps) - le plus souvent au sein de la même chanson. Foncièrement, son univers n'évolue pas énormément, mais il fonctionne toujours aussi bien, ses comptines macabres et sexy demeurant toujours aussi irrésistibles malgré les années. Un seul bémol : Madame Gaiman se repose de plus en plus sur ses acquis (les textes et l'interprétation au détriment de la musique, souvent redondante d'un titre à l'autre), menaçant un peu plus à chaque nouveau disque l'équilibre qui faisait des albums des Dresden Dolls de petites merveilles et surtout se fermant de plus en plus régulièrement aux auditeurs non-anglophones. Les autres en revanches s'en donneront à cœur joie, et dans l'ensemble Amanda Palmer Goes Down Under reste un bon, voire très bon album. Gare tout de même à ne pas en faire encore dix comme ça, sous peine au bout d'un moment de lasser les plus fervents supporters (dont ce blog).
Balladeer : To All the Guys I've Loved Before, de Woodpigeon (2010)
Sorti cet été à (tout) petit tirage, le second Woodpigeon de 2010 n'a, c'est peu de le dire, pas fait de vagues. Exercice folk-pop feutré mais avec toujours cette sophistication inhérente au groupe canadien, plus raccord sans doute avec ses albums passés qu'avec le très bon Die Stadt Musikanten, Balladeer tombe surtout à point nommé pour compenser le désistement de dernière minute d'Iron & Wine, dont il s'impose comme l'évident héritier. C'est mélancolique et contemplatif, inégal mais souvent d'une indescriptible beauté. Entre pop précieuse et folk raffinée, Woodpigeon joue désormais plus que jamais les premiers rôles. On ne peut que s'en réjouir.
Vive la trance, des Hommes Sauvages (2010)
Dans la catégorie tout le monde s'en branle alors nous voici, l'album des Hommes Sauvages se pose là. R & B en noir et blanc, franco-germanique pour la langue, américain pour le son exquis et rétro, le projet de Viola Limpet et d'un Kristof Hahn fuyant le bruit des Swans un est disque compulsif, maniaque, obsédé par la France, Genet et le rockabilly. Un cocktail qui pourra sembler un brin étrange, mais qui suinte l'élégance rock'n'roll par tous les spores. On saute sans vergogne des Cramps à Hazlewood, de la folk feutrée au rock le plus ténébreux. C'est artisanal, bien peuplé (Thomas "The Bad Seeds" Wydler tient les fûts) et doux comme tout. A découvrir.
Elle est plutôt très efficace, la country-pop du dernier Decemberists. Certes, on a du mal à se convaincre que ce sont bien les trois cinquièmes de ce groupe-là qui, il y a moins d'un an, publiait le formidable album de Black Prairie. Avec ses parenthèses power-pop et son approche celtique (relativement) édulcorée, The Kings Is Dead en est presque le parfait inverse. On ne reconnaît d'ailleurs plus tellement non plus le groupe de l'attachant The Crane Wife. Ceci noté, ça marche plutôt bien, dans un registre carré, radiomical et sans prétention. The Decemberists, ou le R.E.M. du XXIe siècle ? "Down by the Water", probable tube en devenir, évoque tellement "The One I Love"... qu'il devient difficile d'en douter. Et après tout : pourquoi pas ?
Personne n'ose le dire mais le math-rock n'est pas vraiment de la musique : c'est un sport les englobant tous, individuel ou collectif, avec ses coureurs de fond, ses laborieux comme ses artistes. To The North, c'est du math-rock athlétique, musclé et dopé aux hormones. Sur Lustre, tout semble tellement en apesanteur que l'on songe à classer le groupe dans la catégorie saut en hauteur. Soit neuf titres biscornus et anguleux (du geometry-rock ?) ne demandant qu'à envoyer des volées de bois vert. Pas foncièrement très original et déconseillé à ceux qui ont le vertige, mais un disque indubitablement efficace.
Honnêtement, personne n'a rien à carrer d'un album de David Lowery. Gentils trucs alternatifs ses deux groupes, Camper Van Beethoven et Cracker, ne se sont jamais extirpés de la seconde division indé, et dans le fond le seul fait d'armes du bonhomme n'a jamais été que d'avoir produit le premier Sparklehorse (et encore, la légende raconte qu'il l'a surtout financé), qu'il s'est appliqué à pomper ponctuellement par la suite. Et pourtant, il faut reconnaître que dans un genre indie-folk très prisé ces dernières années, ses Palace Guards font plutôt bonne figure face à des productions plus hype mais aux mélodies finalement bien moins racées. Bien sûr, l'album joue inconsciemment à fond sur la nostalgie d'une époque, les nineties, où les chansons primaient encore sur les gimmicks. Rien n'est fait pour faire oublier que Lowery est désormais un never been, brave artisan quiquagénaire passé complètement à côté de sa carrière. Mais cette humilité et cette simplicité rendent son disque terriblement sympathique.
Le Roi des Limbes. Pouvait-on imaginer meilleur titre pour cet album ? Un roi au singulier, Thom Yorke, ne régnant effectivement plus que sur les limbes, s'ébroue sur huit morceaux, tentant de faire croire qu'il occupe toujours son trône et qu'il règne toujours pour la postérité. The King of Limbs, ou le second album solo fantôme de Thom Yorke (c'en est confondant sur "Morning Mr Magpie"), œuvre décharnée, inégale... et globalement ratée. Sauf à être complètement réfractaire à Radiohead, on ne peut décemment pas considérer ce disque comme mauvais. Mais sauf à être un yorkôlatre en phase terminale, on ne peut guère le soupçonner d'être génial, ni même "juste très bon" (comme pouvait l'être le mésestimé In Rainbows). The King of Limbs donne en fait l'impression permanente de ne pas être fini, d'être un EP de démos plus que le nouvel album de Radiohead. Ses meilleurs moments ("Little by Little", "Codex") sonnent comme les faces B. d'une époque révolue. On l'appelait "années 2000", et Radiohead y règnait en maître. C'était il y a longtemps.
Les états de grâce n'étant pas définition par faits pour durer, celui de Buck 65 ne pouvait que connaître une fin en eau de boudin. Des années qu'on le voyait décliner progressivement, au fil d'albums de moins en moins inventifs. La quarantaine approchant à grand pas, il était temps pour Richard Terfry de rentrer dans le rang et cet album même pas nul, juste moyen, de venir entériner l'évènement. Il y a pourtant du très bon, sur ce Xe album, des idées, des fulgurances et un son, bien sûr, inimitable. Mais il y a aussi suffisamment de mauvais (Olivia Ruiz ? Sérieusement, Richard ?... et encore, même pas pour le plus mauvais titre...) pour que l'on n'ait pas spécialement envie d'y revenir. Et le génial auteur de Weirdo Magnet de continuer de s'approcher, lentement mais sûrement, du club très fermé des autrefois-grands n'ayant plus rien à dire mais continuant de le clamer avec insistance.
Vous allez rire (ou peut-être pas), mais à l'époque de sa gloire je crois bien n'avoir strictement jamais écouté Cake. Hormis un ou deux morceaux supportés malgrés moi à la radio ou dans la cour du lycée, je ne me rappelle pas avoir entendu son grand "classique" Fashion Nugget en entier - autant dire que son retour après sept ans de silence ne déchaînait pas spécialement mes passions. Pour autant, dans un mois de janvier comme de juste très ennuyeux, je suis bien obligé de reconnaître que Showroom of Compassion a rempli son office, meublant quelques matinées de grisaille avec une certaine efficacité. Rien de rare, hormis peut-être la très jolie "Italian Guy" en cloture. Mais de la bonne indie-pop, comme on en fait finalement de moins en moins de nos jours, sans prise de tête et avec un certain sens de la dérision.
Different Gear, Still Speeding, de Beady Eye (2011)
Terrifiante il y a encore dix ans, l'existence de Beady Eye paraissait plutôt sympathique sur le papier. Liam Gallagher avait fait des progrés considérables en matière d'écriture, Andy Bell n'était pas un manchot (Ride, quand même)... le groupe était capable de créer la surprise, de ne pas être qu'une voix et trois très bons musiciens à la recherche de chansons. Il ne faut jamais jurer de rien, pourtant. Beady Eye est très exactement... une voix et trois très bons musiciens en dèche de chansons dignes de ce nom. Long comme un jour sans pain, son premier album est désespérément vide à l'exception d'un ou deux titres, et fleure bon le disques de mecs frustrés qui gravent sans réfléchir tous les titres rejetés par leur ancien groupe pendant des années. Comme un greastest hits d'Oasis sur lequel il n'y aurait que les mauvais morceaux. Et franchement, qui pourrait bien avoir envie d'écouter un sous-Oasis ?
Let England Shake, de PJ Harvey (2011)
PJ Harvey est une artiste habile. Jusqu'à présent, la tradition voulait qu'en gros, depuis une dizaine d'années, on adore son nouvel album à la première écoute, puis qu'on n'y voit progressivement plus que les coutures et les maladresses. En 2011, saisie par une envie de se renouveler une fois de plus (ce qui rappelons-le se traduit depuis la nuit de temps, chez elle, par une incapacité totale à trouver un son ou une touche personnelle), la vampirella la plus hype de la planète a décidé d'inverser le système : à la première écoute, Let England Shake est donc un album insupportable, d'une nullité si consternante que l'on cherche immédiatement l'embrouille, le message codé, la démarche artistique cachée. Pas la peine de se fatiguer, il n'y en a pas : Let England Shake est le mauvais album, le disque foiré (presque) de bout en bout qu'elle n'avait jamais réussi à faire jusqu'alors, et qu'elle nous doit donc depuis vingt ans au bas mot. De ce point de vue c'est une belle réussite : la production est vaporeuse et craignos, la voix ridiculement suraiguë et surjouée la plupart du temps, et l'on n'y rencontrera pas le commencement du début d'une chanson digne de ce nom. Ce qui ne l'empêchera évidemment pas d'être célébré par les blogs et une presse dithyrambique, objectivité et PJ Harvey tenant rarement dans la même phrase.
Amanda Palmer Goes Down Under, d'Amanda Palmer (2011)
Amanda Palmer est décidément un sacré numéro, qui à chaque nouvelle sortie (ce qui arrive souvent) se rapproche un peu plus du cercle très fermé des songwriters dérangés et hyper-prolifiques. Moitié live moitié studio, son second LP solo est un improbable concept-album sur les Antipodes, comme toujours drôle et provocant, coincé entre rires (beaucoup) et larmes (de temps en temps) - le plus souvent au sein de la même chanson. Foncièrement, son univers n'évolue pas énormément, mais il fonctionne toujours aussi bien, ses comptines macabres et sexy demeurant toujours aussi irrésistibles malgré les années. Un seul bémol : Madame Gaiman se repose de plus en plus sur ses acquis (les textes et l'interprétation au détriment de la musique, souvent redondante d'un titre à l'autre), menaçant un peu plus à chaque nouveau disque l'équilibre qui faisait des albums des Dresden Dolls de petites merveilles et surtout se fermant de plus en plus régulièrement aux auditeurs non-anglophones. Les autres en revanches s'en donneront à cœur joie, et dans l'ensemble Amanda Palmer Goes Down Under reste un bon, voire très bon album. Gare tout de même à ne pas en faire encore dix comme ça, sous peine au bout d'un moment de lasser les plus fervents supporters (dont ce blog).
Balladeer : To All the Guys I've Loved Before, de Woodpigeon (2010)
Sorti cet été à (tout) petit tirage, le second Woodpigeon de 2010 n'a, c'est peu de le dire, pas fait de vagues. Exercice folk-pop feutré mais avec toujours cette sophistication inhérente au groupe canadien, plus raccord sans doute avec ses albums passés qu'avec le très bon Die Stadt Musikanten, Balladeer tombe surtout à point nommé pour compenser le désistement de dernière minute d'Iron & Wine, dont il s'impose comme l'évident héritier. C'est mélancolique et contemplatif, inégal mais souvent d'une indescriptible beauté. Entre pop précieuse et folk raffinée, Woodpigeon joue désormais plus que jamais les premiers rôles. On ne peut que s'en réjouir.
Vive la trance, des Hommes Sauvages (2010)
Dans la catégorie tout le monde s'en branle alors nous voici, l'album des Hommes Sauvages se pose là. R & B en noir et blanc, franco-germanique pour la langue, américain pour le son exquis et rétro, le projet de Viola Limpet et d'un Kristof Hahn fuyant le bruit des Swans un est disque compulsif, maniaque, obsédé par la France, Genet et le rockabilly. Un cocktail qui pourra sembler un brin étrange, mais qui suinte l'élégance rock'n'roll par tous les spores. On saute sans vergogne des Cramps à Hazlewood, de la folk feutrée au rock le plus ténébreux. C'est artisanal, bien peuplé (Thomas "The Bad Seeds" Wydler tient les fûts) et doux comme tout. A découvrir.
The King Is Dead, de The Decemberists (2011)
Elle est plutôt très efficace, la country-pop du dernier Decemberists. Certes, on a du mal à se convaincre que ce sont bien les trois cinquièmes de ce groupe-là qui, il y a moins d'un an, publiait le formidable album de Black Prairie. Avec ses parenthèses power-pop et son approche celtique (relativement) édulcorée, The Kings Is Dead en est presque le parfait inverse. On ne reconnaît d'ailleurs plus tellement non plus le groupe de l'attachant The Crane Wife. Ceci noté, ça marche plutôt bien, dans un registre carré, radiomical et sans prétention. The Decemberists, ou le R.E.M. du XXIe siècle ? "Down by the Water", probable tube en devenir, évoque tellement "The One I Love"... qu'il devient difficile d'en douter. Et après tout : pourquoi pas ?
Lustre, de To The North (2011)
Personne n'ose le dire mais le math-rock n'est pas vraiment de la musique : c'est un sport les englobant tous, individuel ou collectif, avec ses coureurs de fond, ses laborieux comme ses artistes. To The North, c'est du math-rock athlétique, musclé et dopé aux hormones. Sur Lustre, tout semble tellement en apesanteur que l'on songe à classer le groupe dans la catégorie saut en hauteur. Soit neuf titres biscornus et anguleux (du geometry-rock ?) ne demandant qu'à envoyer des volées de bois vert. Pas foncièrement très original et déconseillé à ceux qui ont le vertige, mais un disque indubitablement efficace.
Barton Hollow, des Civil Wars (2011)
Il arrive qu'on tombe sur un disque un peu au hasard, qu'on s'y attache pour une raison absurde n'ayant rien à voir avec ce qu'il propose ni même avec sa valeur intrinsèque... et qu'on y reste, finalement satisfait. C'est peu dire qu'en s'attelant à l'album d'un groupe nommé The Civil Wars on ne s'attend pas à tomber sur une country délicate, à la limite de la splendeur par (brefs) instants. Les Civil Wars, c'est un peu comme si une nana avait pris la place de Mark Olson au sein des Jayhawks (dont on n'en peut plus par ailleurs d'attendre le prochain album). Les deux voix se marient à la perfection, et l'ensemble paraît couler de source, élégant, sensuel, mignon et raffiné. Rien qui changera le monde, mais une de ces belles collections de chansons folk dont les tréfonds de l'Amérique regorgent. Et qui, trop souvent, n'intéressent personne. Un régal. The Palace Guards, de David Lowery (2011)
Honnêtement, personne n'a rien à carrer d'un album de David Lowery. Gentils trucs alternatifs ses deux groupes, Camper Van Beethoven et Cracker, ne se sont jamais extirpés de la seconde division indé, et dans le fond le seul fait d'armes du bonhomme n'a jamais été que d'avoir produit le premier Sparklehorse (et encore, la légende raconte qu'il l'a surtout financé), qu'il s'est appliqué à pomper ponctuellement par la suite. Et pourtant, il faut reconnaître que dans un genre indie-folk très prisé ces dernières années, ses Palace Guards font plutôt bonne figure face à des productions plus hype mais aux mélodies finalement bien moins racées. Bien sûr, l'album joue inconsciemment à fond sur la nostalgie d'une époque, les nineties, où les chansons primaient encore sur les gimmicks. Rien n'est fait pour faire oublier que Lowery est désormais un never been, brave artisan quiquagénaire passé complètement à côté de sa carrière. Mais cette humilité et cette simplicité rendent son disque terriblement sympathique.
The King of Limbs, de Radiohead (2011)
Le Roi des Limbes. Pouvait-on imaginer meilleur titre pour cet album ? Un roi au singulier, Thom Yorke, ne régnant effectivement plus que sur les limbes, s'ébroue sur huit morceaux, tentant de faire croire qu'il occupe toujours son trône et qu'il règne toujours pour la postérité. The King of Limbs, ou le second album solo fantôme de Thom Yorke (c'en est confondant sur "Morning Mr Magpie"), œuvre décharnée, inégale... et globalement ratée. Sauf à être complètement réfractaire à Radiohead, on ne peut décemment pas considérer ce disque comme mauvais. Mais sauf à être un yorkôlatre en phase terminale, on ne peut guère le soupçonner d'être génial, ni même "juste très bon" (comme pouvait l'être le mésestimé In Rainbows). The King of Limbs donne en fait l'impression permanente de ne pas être fini, d'être un EP de démos plus que le nouvel album de Radiohead. Ses meilleurs moments ("Little by Little", "Codex") sonnent comme les faces B. d'une époque révolue. On l'appelait "années 2000", et Radiohead y règnait en maître. C'était il y a longtemps.
20 Odd Years, de Buck 65
Showroom of Compassion, de Cake (2011)
Vous allez rire (ou peut-être pas), mais à l'époque de sa gloire je crois bien n'avoir strictement jamais écouté Cake. Hormis un ou deux morceaux supportés malgrés moi à la radio ou dans la cour du lycée, je ne me rappelle pas avoir entendu son grand "classique" Fashion Nugget en entier - autant dire que son retour après sept ans de silence ne déchaînait pas spécialement mes passions. Pour autant, dans un mois de janvier comme de juste très ennuyeux, je suis bien obligé de reconnaître que Showroom of Compassion a rempli son office, meublant quelques matinées de grisaille avec une certaine efficacité. Rien de rare, hormis peut-être la très jolie "Italian Guy" en cloture. Mais de la bonne indie-pop, comme on en fait finalement de moins en moins de nos jours, sans prise de tête et avec un certain sens de la dérision.
Different Gear, Still Speeding, de Beady Eye (2011)
Terrifiante il y a encore dix ans, l'existence de Beady Eye paraissait plutôt sympathique sur le papier. Liam Gallagher avait fait des progrés considérables en matière d'écriture, Andy Bell n'était pas un manchot (Ride, quand même)... le groupe était capable de créer la surprise, de ne pas être qu'une voix et trois très bons musiciens à la recherche de chansons. Il ne faut jamais jurer de rien, pourtant. Beady Eye est très exactement... une voix et trois très bons musiciens en dèche de chansons dignes de ce nom. Long comme un jour sans pain, son premier album est désespérément vide à l'exception d'un ou deux titres, et fleure bon le disques de mecs frustrés qui gravent sans réfléchir tous les titres rejetés par leur ancien groupe pendant des années. Comme un greastest hits d'Oasis sur lequel il n'y aurait que les mauvais morceaux. Et franchement, qui pourrait bien avoir envie d'écouter un sous-Oasis ?
Let England Shake, de PJ Harvey (2011)
PJ Harvey est une artiste habile. Jusqu'à présent, la tradition voulait qu'en gros, depuis une dizaine d'années, on adore son nouvel album à la première écoute, puis qu'on n'y voit progressivement plus que les coutures et les maladresses. En 2011, saisie par une envie de se renouveler une fois de plus (ce qui rappelons-le se traduit depuis la nuit de temps, chez elle, par une incapacité totale à trouver un son ou une touche personnelle), la vampirella la plus hype de la planète a décidé d'inverser le système : à la première écoute, Let England Shake est donc un album insupportable, d'une nullité si consternante que l'on cherche immédiatement l'embrouille, le message codé, la démarche artistique cachée. Pas la peine de se fatiguer, il n'y en a pas : Let England Shake est le mauvais album, le disque foiré (presque) de bout en bout qu'elle n'avait jamais réussi à faire jusqu'alors, et qu'elle nous doit donc depuis vingt ans au bas mot. De ce point de vue c'est une belle réussite : la production est vaporeuse et craignos, la voix ridiculement suraiguë et surjouée la plupart du temps, et l'on n'y rencontrera pas le commencement du début d'une chanson digne de ce nom. Ce qui ne l'empêchera évidemment pas d'être célébré par les blogs et une presse dithyrambique, objectivité et PJ Harvey tenant rarement dans la même phrase.
Tu as réussi à écouter le Beady Eye complètement ?
RépondreSupprimerRespect ! ^^
Trois fois, même, cela dit il m'a complètement glissé entre les oreilles, et quelques semaines plus tard j'ai déjà presque tout oublié...
RépondreSupprimerJ'écoute To the North, là...pas mal du tout dans le genre. Je vais m'intéresser au reste même si je déjà qu'il y a plein de trucs qui vont pas me plaire.
RépondreSupprimerTu es un peu sévère avec le PJ Harvey, même si au final on se rejoint.
RépondreSupprimerDe même avec Radiohead, sauf que là on ne se retient pas. Je suis content que tu affirmes qu'on ne peut pas dire de cet album qu'il soit vraiment mauvais, mais moi je le trouve "juste très bon" et pourtant je ne suis pas ce qu'on pourrait qualifier de "yorkolâtre" (Kid A et Ok Computer m'ennuient pour la moitié des chansons, l'autre moitié me fascine, et The Eraser ne m'avait pas spécialement marqué).
Je trouve que cet album montre vraiment que Radiohead s'est éloigné de leur démarche antérieure. Comme ils le disent, ils ne font plus vraiment d'albums, et c'est sans doute ce qui déroute autant. Car pour ce qui est de la musique, je trouve ça vraiment très bon, je regrette simplement qu'il soit trop court et trop homogène, mais encore une fois, cela est dû à une démarche fondamentalement différente.
Enfin, je n'ai pas eu la sensation que Radiohead cherchait encore à être un leader, au contraire je les trouve plus humbles et détachés...
Erratum: "on ne se rejoint pas" bien sûr. :)
RépondreSupprimerJe confirme n'avoir jamais entendu parler du Woodpigeon. Chouette, c'est une bonne surprise !
RépondreSupprimerAh ben moi je n'ai écouté que le PJ Harvey de la liste et je l'aime vraiment beaucoup ;)
RépondreSupprimerJe te trouve bien dur, mais en même temps les 2 diodes paraissent presque gentilles par rapport au commentaire...
Spiroid >>> je me moque un peu qu'ils ne fassent plus vraiment d'albums... ce qui m'ennuie plus, c'est que certaines chansons sont sans grand intérêt, ou plus simplement qu'ils les ont déjà faites.
RépondreSupprimerEmily >>> oui, il est adorable cet album (comme tous ceux du groupe). J'étais également assez étonné de le découvrir presque par hasard, alors que le précédent avait pas mal fait parler de lui.
Typh >>> c'est vrai ce que tu dis sur la note, en même temps c'est la forme condensée qui donne un côté plus rentre-dedans, je pense. Sur un article plus long j'aurais sans doute été plus nuancé, mais je n'avais vraiment aucune envie d'écrire un long papier sur cet album :-)
Un peu sévère avec le Radiohead. Et un peu généreux avec Beady Eye. Toi, quoi :D
RépondreSupprimerC'est bien parce que j'ai mis Radiohead, Beady Eye et PJ dans cette rubrique parce que j'estimais que c'était beaucoup de bruit pour pas grand-chose... et vous me parlez de quoi ? De Radiohead, Beady Eye et PJ. Merci les amis :-))
RépondreSupprimerOn est d'acc avec le RADIOHEAD... sinon je n'ai pas écouté le PJ HARVEY, mais tu sembles plus sévère que nombre d'autres... ça m'intrigue, du coup ;-)
RépondreSupprimerSysT
Bon, je n'ai écouté là que les trucs les plus "connus"... (non, je n'écrirai pas mainstream...).
RépondreSupprimerEt je te trouve bien sévère avec Radiohead (mais je n'ai plus été scotché par le groupe depuis le dyptique Kid A/mnesiac) et PJ Harvey. De cette dernière, j'aime cet album, bien plus que le très coté White Chalk ou que le très médiocre A Woman a Man Walked By (là, pour le coup, niveau voix, c'était insupportable, chaque morceau comme une performance). Let England Shake me paraît plus cohérent et au fil des écoutes, je l'aime même de plus en plus. Reste que ça fait chier de lire en interview qu'elle se sent désormais beaucoup plus poétesse que musicienne...
Le syndrome Patti Smith, quoi. Ça ne me donnera pas envie de plus l'épargner la prochaine fois :-)
RépondreSupprimerMême si je ne sais pas vraiment quoi en penser pour le moment, je te trouve dur avec PJ Harvey (si si, des chansons y en a^^). Mais c'est vrai que la prod est rebutante à la première écoute.
RépondreSupprimerPour Radiohead, tout le monde semble être d'accord (sauf les fans, mais eux on s'en fout). Les 3 premiers morceaux et "Lotus flower" titillent l'intérêt, et pour le reste... bah pas grand chose. La chronique d'Eric remet bien les choses à leur place : http://www.planetgong.fr/article-radiohead-the-king-of-limbs-pas-indispensable-68661260.html
En ce qui concerne Lowery, dommage que ça retombe trop en fin d'album (ces synthés d'un goût douteux), parce que les 3 premières chansons sont vraiment fortes.
Et je rappelle au passage que le premier album de Camper Van Beethoven, "Telephone free landslide victory", est une perle d'indie ricain 80s résolument jubilatoire (t'en foutrai, de la deuxième division ! ;p)
Je serais moins sévère que toi sur le PJ, je trouve comme Dahu qu'il y a tout de même quelques chansons pas dégueus, mais beaucoup plus avec ce Radiohead tout pourri...
RépondreSupprimerSinon, assez d'accord avec toi sur Buck 65, encore une fois décevant... quant au Decemberists, il m'a - pour le dire poliment - mortellement fait chier...
T'es quand même méchant avec PJ HArvey et Radiohead.
RépondreSupprimerPour des albums de démos ils sonnent assez bien ;-)
Et pour Beady Eye, je partage totalement l'avis de l'ami DPC: "quand je vois que mes trois titres préférés sur Different Gear, Still Speeding sont celui-qui-sonne-comme-Instant-Karma, celui-avec-le-même-refrain-que-Get-Back et celui-à-la-rythmique-repompée-sur-My-Generation, je préfère rester méfiant quand au potentiel créatif du groupe."
Mais qu'est-ce que vous pouvez bien aimer chez le PJ ? Parce que moi j'attends, et un peu comme pour le Radiohead, j'ai lu des tonnes d'articles qui en parlait, mais je me suis chaque fois demandé ce que ça racontait...
RépondreSupprimerDans ces deux cas comme pour le Beady Eye, un seul mot de plus de ma part serait les faire passer pour ce qu'ils ne sont pas - à savoir des évènements.
Question intéressante pour le coup...
RépondreSupprimerDoit-on faire de chaque parution de Radiohead ou PJ Harvey un événement ? Un artiste "majeur" n'a-t-il pas le droit de sortir des albums mineurs (et sciemment conçus et écoutés comme tels) ?
Elle est terrible cette malédiction qui condamnerait à refaire et à dépasser à chaque fois et To Bring You My Love et Kid A...
Je plaide pour le droit des grands groupes à sortir des petits albums... :-)
Ce que raconte le PJ Harvey ? (au-delà de l'explication de texte convenue sur la guerre, l'Angleterre, bla-bla-bla, etc) : une mutation, tout simplement, la sienne (et on a tout à fait le droit de le regretter). Let England Shake, c'est, selon moi, un disque comme un auto-portrait : avec ses ratés disgracieux, ses tentatives avortées, sa remise en cause permanente, sa recherche perpétuelle - et parfois éreintante - qu'une cohérence thématique (la guerre, l'Angleterre, bla-bla-bla) tente de masquer difficilement...
RépondreSupprimerla lecture de ta descente en flèche de ce 'England Shake' finit d'achever une semaine de m... sur une nouvelle déception : comment as-tu pu ecrire une chose pareille, toi, sur ce disque qui ne méritait pas tant de haine... ;-?
RépondreSupprimerSka >>> "Doit-on faire de chaque parution de Radiohead ou PJ Harvey un événement ? Un artiste "majeur" n'a-t-il pas le droit de sortir des albums mineurs (et sciemment conçus et écoutés comme tels) ?" Pour moi ce sont deux questions bien distinctes. Je suis le premier à dire qu'un artiste majeur ne voit pas son talent se tarir brutalement, et je déteste brûler ce que j'ai adoré la veille sous de fallacieux prétextes.
RépondreSupprimerEn revanche la question de l'évènement relève de l'écho reçu par la sortie, sinon carrément de l'a priori. Ce que j'allumais gentiment dans les commentaires plus haut, ce sont les kilomètres d'encre virtuels gaspillés pour dire à propos du Radiohead (surtout) ou du PJ (qui du coup a été vite éclipsé) ce qui pourrait tenir en cinq lignes. Pour des raisons n'ayant rien à voir avec la qualité intrinsèque de l'album en question, on va accorder au groupe un "traitement de faveur" évident, lui trouver mille circonstances atténuantes, voire essayer de dégager des symboles et des explications à la limite de la psychologie (ou du symbolisme) de comptoir plutôt que de faire ce que j'ai essayé de faire dans ce bref texte : s'avouer à soi-même que cet album est très mineur, qu'on ne le réécoutera probablement pas, et puis voilà. En d'autres termes : j'écoute toujours les nouvelles sorties des artistes qui ont compté pour moi, je n'éprouve pas pour autant systématiquement le besoin d'en faire des tonnes et de considérer chacun de leur pets comme un évènement planétaire. Le buzz autour du dernier Radiohead a été absolument incroyable, surréaliste, ce qu'Arbobo a parfaitement résumé chez GT ("c'est ridicule, ce provoque Radiohead"), et il ne l'a pas été à cause du plan marketing du groupe, contrairement à ce que certains ont pu dire... mais bien parce que les gens ont une croyance irraisonnée et irrationnelle en Thom Yorke. Bref, voilà, on parle encore de Radiohead alors que je ne voulais surtout pas écrire d'article dessus. Vous allez me vexer, les mecs :-)
Alf >>> je soupçonnais depuis longtemps que tes semaines sans édito étaient "de merde" ;-)
semaines de merde sans edito, ce n'est pas la modestie qui t'étouffe! Soyons raisonnables, et parlons plutot de mercredis de merde....
RépondreSupprimer:-)
RépondreSupprimer