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Il y a quelque chose d’assez ironique à ce que, sur Interlignage cet article soit paru juste après le dernier numéro de notre rubrique Meeting… . Bien sûr, à première vue, on peut considérer que les points communs entre Michel Cloup, rocker romantique et viscéral, et Jacno, dandy pop n’ayant jamais craché sur la variété, sont quasiment inexistants. Pourtant, ils sont réunis par les hasards du calendrier et par la relative indifférence dans laquelle ils persistent cependant à créer, contre vents et marées. La France est décidément un pays bizarre, qui n’aime rien tant qu’à se complaire dans cette légende urbaine comme quoi ses citoyens seraient incapable de faire du bon rock, mais qui n’a quasiment jamais – à quelques Bashung près – été capable de rendre hommage à ses musiciens indés les plus inventifs ou ambitieux. Michel Cloup ou Jacno n’étant ici que des exemples pris au hasard. On aurait aussi pu faire le même constat à propos des Dogs (meilleur groupe de rock’n'roll de son époque n’ayant jamais eu le succès escompté et la postérité méritée), de Tue-Loup (sans conteste le plus grand groupe français en activité, dont on raconta comment il nous offrit une prestation remarquable devant trente peupleus) ou de Marcel Kanche, bien installé sur le podium du CDG et dont les albums, plus sublimes les uns que les autres, persistent à échapper aux oreilles du plus grand nombre. La liste est sans fin, et le cas de Michel Cloup est doublement consternant, dans la mesure où il porta non pas un, mais deux des meilleurs orchestres français des vingt dernières années : Diabologum, vénéré, haï, relativement culte aujourd’hui ; et Expérience, passionnant et globalement méconnu.
Rien de nouveau sous le soleil de Toulouse : il ne faut que quelques secondes pour que l’on se retrouve en terrain familier, à parcourir l’univers caractéristique, autrefois controversé et résonnant désormais comme une évidence, d’un Michel Cloup qui après vingt ans de carrière aura souvent changé son fusil d’épaule mais rarement déçu. L’atmosphère est toujours aussi désabusée et bizarrement émouvante, ténébreuse plus que véritablement sombre, et toujours parcourue d’éclats de lumière ("L’Enfant"). Pour ce premier album solo duo avec Patrice Cartier, le batteur d’Expérience, la musique est réduite jusqu’à l’os, cette guitare baritone souvent féroce, cette batterie métronomique et ce phrasé blanc affuté. Un minimalisme qui pourtant ne sonne jamais pauvre et préserve au contraire quelques belles embardées lyriques.
Cloup a beau marteler sur le plus beau titre de ce nouveau disque qu’il est « retombé dans [le] piège » de la colère, qu’il doit « recycler » car elle demeure « son meilleur carburant », ce n’est pas le sentiment qui domine Notre silence, ouvrage mélancolique dont la violence est parfaitement domestiquée. L’ensemble des huit titres brille avant tout par sa poignante humanité, tendant parfois vers une forme d’apaisement ("Le Cercle parfait"), ou osant même une pointe d’entrain sur "Un film américain". Pas de quoi en faire la bande-son de la prochaine fête de la musique, soit : Notre silence, comme tous les autres disques sur lesquels Michel Cloup apporta sa patte, conserve un côté crépusculaire, un romantisme à vif et plus souvent désolé que rieur. Mais il est étonnant de constater à quel point un parti-pris pour le moins dépouillé débouche sur une grande variété de climats, au point de finir par échapper à toute possibilité de classification. Bien malin celui qui pourra donner un nom à cette musique, en admettant même que ce soit nécessaire : Michel Cloup et Patrice Cartier viennent de signer un disque quasiment hors du temps et des modes, intimiste, tempétueux – à la fois familier et unique en son genre. De ceux qui touchent et marquent, non pas l’histoire de la musique mais les êtres humains qui les écoutent… les reçoivent. Dommage qu’ils soient si peu nombreux.
Il y a quelque chose d’assez ironique à ce que, sur Interlignage cet article soit paru juste après le dernier numéro de notre rubrique Meeting… . Bien sûr, à première vue, on peut considérer que les points communs entre Michel Cloup, rocker romantique et viscéral, et Jacno, dandy pop n’ayant jamais craché sur la variété, sont quasiment inexistants. Pourtant, ils sont réunis par les hasards du calendrier et par la relative indifférence dans laquelle ils persistent cependant à créer, contre vents et marées. La France est décidément un pays bizarre, qui n’aime rien tant qu’à se complaire dans cette légende urbaine comme quoi ses citoyens seraient incapable de faire du bon rock, mais qui n’a quasiment jamais – à quelques Bashung près – été capable de rendre hommage à ses musiciens indés les plus inventifs ou ambitieux. Michel Cloup ou Jacno n’étant ici que des exemples pris au hasard. On aurait aussi pu faire le même constat à propos des Dogs (meilleur groupe de rock’n'roll de son époque n’ayant jamais eu le succès escompté et la postérité méritée), de Tue-Loup (sans conteste le plus grand groupe français en activité, dont on raconta comment il nous offrit une prestation remarquable devant trente peupleus) ou de Marcel Kanche, bien installé sur le podium du CDG et dont les albums, plus sublimes les uns que les autres, persistent à échapper aux oreilles du plus grand nombre. La liste est sans fin, et le cas de Michel Cloup est doublement consternant, dans la mesure où il porta non pas un, mais deux des meilleurs orchestres français des vingt dernières années : Diabologum, vénéré, haï, relativement culte aujourd’hui ; et Expérience, passionnant et globalement méconnu.
Rien de nouveau sous le soleil de Toulouse : il ne faut que quelques secondes pour que l’on se retrouve en terrain familier, à parcourir l’univers caractéristique, autrefois controversé et résonnant désormais comme une évidence, d’un Michel Cloup qui après vingt ans de carrière aura souvent changé son fusil d’épaule mais rarement déçu. L’atmosphère est toujours aussi désabusée et bizarrement émouvante, ténébreuse plus que véritablement sombre, et toujours parcourue d’éclats de lumière ("L’Enfant"). Pour ce premier album solo duo avec Patrice Cartier, le batteur d’Expérience, la musique est réduite jusqu’à l’os, cette guitare baritone souvent féroce, cette batterie métronomique et ce phrasé blanc affuté. Un minimalisme qui pourtant ne sonne jamais pauvre et préserve au contraire quelques belles embardées lyriques.
Cloup a beau marteler sur le plus beau titre de ce nouveau disque qu’il est « retombé dans [le] piège » de la colère, qu’il doit « recycler » car elle demeure « son meilleur carburant », ce n’est pas le sentiment qui domine Notre silence, ouvrage mélancolique dont la violence est parfaitement domestiquée. L’ensemble des huit titres brille avant tout par sa poignante humanité, tendant parfois vers une forme d’apaisement ("Le Cercle parfait"), ou osant même une pointe d’entrain sur "Un film américain". Pas de quoi en faire la bande-son de la prochaine fête de la musique, soit : Notre silence, comme tous les autres disques sur lesquels Michel Cloup apporta sa patte, conserve un côté crépusculaire, un romantisme à vif et plus souvent désolé que rieur. Mais il est étonnant de constater à quel point un parti-pris pour le moins dépouillé débouche sur une grande variété de climats, au point de finir par échapper à toute possibilité de classification. Bien malin celui qui pourra donner un nom à cette musique, en admettant même que ce soit nécessaire : Michel Cloup et Patrice Cartier viennent de signer un disque quasiment hors du temps et des modes, intimiste, tempétueux – à la fois familier et unique en son genre. De ceux qui touchent et marquent, non pas l’histoire de la musique mais les êtres humains qui les écoutent… les reçoivent. Dommage qu’ils soient si peu nombreux.
👍👍👍 Notre silence
Michel Cloup (duo) | Autoprod, 2011
Michel Cloup est effectivement un très très grand du rock français, et il est dommage qu'on ne lui rend pas assez hommage dans ce qu'il a fait après Diabologum (qui n'est que la continuité d'une oeuvre plus vaste après tout). Cet album est magnifique et il faut vraiment l'acheter, pas le dl ni rien, les mecs comme lui méritent vraiment d'être soutenu bec et ongle.
RépondreSupprimerTrès chouette extrait, si si !
RépondreSupprimerSi l'album est du même tonneau, je risque d'adhérer fortement ;-)
Alors là... autant venant de mika je ne suis pas étonné, autant toi, tu viens de me... trouer le cul (osons dire les choses ^^). Même si tu n'aimes pas le reste de l'album, sache que je suis déjà comblé :-)
RépondreSupprimerEt sinon, oui, c'est relativement dans la même veine, même si certains titres sont plus noisy. Michel Cloup fait partie de ces artistes qui ont une touche immédiatement reconnaissable.
RépondreSupprimerAttendons septembre ;-)
RépondreSupprimerOh ! ^^
RépondreSupprimerVous pouvez acheter l'album ici !
RépondreSupprimerhttp://www.michelcloup.com/
Je cherche M.Cloup sur Google et je tombe direct ici. Costaud le Golb ! En tout cas niveau feeling musical, belle atmosphère, j'adhère vraiment. C'est Loïc Swiny, le photographe de la pochette, qui vient à l'instant de me faire connaître cette sombre et belle galette. (Chose curieuse, lui et toi avez vécu la lecture d'un certain livre dont je fus l'auteur... C'est fou ce que le monde est petit, dans certains plis... Ça doit pas être par hasard...).
RépondreSupprimerSalutations amicales, cher Thomas.
J'aimerais que ce soit parce que Le Golb est "costaud", mais je crains que ce soit surtout parce que l'album a généré peu de chroniques...
RépondreSupprimerEn tout cas c'est vrai que le monde est petit.
Amitiés,