mardi 14 juin 2011

A Storm Of Light - Tempête dans un verre d'acide

Une surprise peut en cacher une autre. Il y a deux ans, le second album d’A Storm Of Light, Forgive Us Our Trespasses, nous avait mis une baffe d’autant plus brutale que nous ne l’avions pas vue venir. Autant dire que cette année, en apprenant que le groupe de l’ex-Red Sparowes Josh Graham revenait avec de nouvelles histoires d’apocalypse sous le bras, on s’était un minimum préparé. Boules Quies, antidépresseurs, révision du champ lexical de la fin du monde et bien sûr réserve de compliments – just in case. Croyez-le ou non, ça n’a pas suffi : en six minutes et vingt-et-une secondes d’une intro sanguinolente baptisée "Missing", A Storm Of Light nous mis K.O. avec une aisance déconcertante. Le champ lexical de la fin du monde, disions-nous ? On aurait mieux fait de réviser le dictionnaire des superlatifs.


Car plus l’album défile et plus plus l’on a envie de hurler à qui ne veut pas l’entendre d’oublier ses préjugés, de venir constater par soi-même que cet album vaut beaucoup mieux que son titre ronflant (attention accrochez-vous – je ne l’écrirai qu’une seule fois : As the Valley of Death Becomes Us, Our Silver Memories Fade) et sa pochette, probablement parmi les plus laides qu’ait jamais dessinées Josh Graham (on ne les connaît pas toutes, soit… mais reconnaissez qu’on voit mal comment il pourrait faire pire). On avait beau avoir apprécié Forgive Us Our Trespasses (fou comme ce titre paraît subitement sobre et épuré), on n’attendait certainement pas A Storm Of Light à un tel niveau d’excellence, non seulement prêt à balancer à la face d’un monde évidemment en putréfaction (on ne se refait pas) de potentiels classiques du doom-metal (au hasard : "Black Wolves", "Silver"… on pourrait cites chaque titre), mais encore en témoignant d’une capacité précieuse à s’éloigner des sentiers battus du genre pour aller chouraver ici chez le grunge, là chez le stoner, là encore chez le post-punk.

Le niveau monte d’un voire de deux crans ; l’évolution n’en est pas moins logique : il y a deux ans, Forgive Us Our Trespasses faisait déjà montre d’une volonté farouche d’abattre les cloisons, et de ne plus ressembler aux amis et modèles de Neurosis que par sa capacité à fédérer bien au-delà des frontières du metal. Il était sans doute un peu tôt alors, mais voilà que c’est chose faite, entérinée par les guests de Jarboe (sur "Collapse"), qui après Lydia Lunch sur le précédent disque est donc une autre légende du rock expérimental à venir piger chez ASOL, de Kim Tahyil, très culte guitariste de Soundgarden, ou de la violoniste d’avant-garde Carla Kihlstedt. Des adoubements symboliques plus que de véritables apports, tant le groupe n’a désormais plus besoin de personne pour surprendre et (c’est dans son code génétique) inquiéter. Rythmiques hachées ("Wretched Valley"," Leave No Wound"), élans lyriques (superbe "Destroyer")… A Storm Of Light donne l’impression d’enrichir sa panoplie à chaque nouvel opus, et c’est à peine si l’on se souvient qu’à ses débuts certains ne voyaient en lui qu’un sous-Neurosis. Autant dire qu’il n’en est plus question avec cet album ténébreux, plus contemplatif et dont la hargne mesurée est à des années lumières de la lourdeur apprêtée devenue si souvent légions chez les mauvais groupes de doom. Il est probable que dans le genre, on trouve difficilement mieux cette année.


👍👍👍 As the Valley of Death Becomes Us, Our Silver Memories Fade 
A Storm Of Light | Neurot, 2011

5 commentaires:

  1. Promis, ça, je ne noterai pas. 15 secondes m'ont suffi ;-)

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  2. C'est vrai que ce groupe est meilleur à chaque sortie. Je me demande où ils vont s'arrêter...

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  3. Dios ! Gros titre ! Pas dit que Witch et Red Fang que j'aime bien écouter en ce moment jouent au même niveau !
    Je vais m'écouter le reste très vite.

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  4. J'aime bien. J'suis pas un gros fan du son à certains moments mais j'trouve ça plutôt bon. Ca me donne envie de me remettre au doom. Ma dernière claque doom remonte à 2007 avec Pilgrimage de Om.
    Mais j'vais me pencher dessus, parce que ça tombe dans ce que j'aime bien: le doom qui lorgne vers le stoner et le rock expérimental.

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  5. Thierry >>> :-))

    Klak >>> je ne connais pas Red Fang, mais sûr que comparé à Witch on est dans la division au-dessus (et j'aime bien Witch, pourtant).

    Joris >>> moi ça fait une nouillée de temps que j'en ai pas pris une comme ça. Sans doute depuis l'album de Shrinebuilder, qui ne date pas d'hier...

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