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Suede et ses producteurs, quatrième et (on l'espère) dernier épisode (les précédents sont ICI, ICI et ICI).
Or donc au début des années 2000, le groupe de Brett Anderson a-t-il l'idée saugrenue d'embaucher Stephen Street, producteur phare d'une certaine britpop de qualité (Smiths, blur... bon ok, Cranberries aussi), légèrement à contre-temps pour le moins – mais allons donc ? Comment aurait-on pu se plaindre de voir Suede bosser enfin avec un producteur dont le CV ne fut ni douteux, ni inexistant ?
Le problème, en dehors du fait que Stephen Street est réputé pour ses productions lisses comme des culs de bébés, c'est que le garçon arrive avec tellement de trains de retard que l'album en question, ironiquement intitulé A New Morning (Anderson et Oakes n'étaient pas les plus grands visionnaires d'Angleterre...), à force de végéter entre deux producteurs (c'est initialement un autre jeune gars à la mode, John Leckie, qui devait s'en occuper), est quasiment devenu irrécupérable. Et Suede de réussir, en douze titres si carrés que l'on s'y sentirait presque à l'étroit, à devenir très exactement ce qu'il était parvenu à ne pas être sur le risqué Head Music : un groupe de britpop sur le retour (voir 'Obsessions'), versant dans la choucroute surproduite (ce 'Positivity' est tout un poème), la caricature ('Lonely Girls') ou la niaiserie absolue (le texte de 'Lost In TV'... et la musique un peu aussi, d'ailleurs). Par éclats, le groupe réussit encore à ressusciter le souvenir de ce qu'il fut, principalement parce que Brett Anderson, lorsqu'il ne surjoue pas l'homme qui souffre, sait encore bander les muscles ('Beautiful Loser', claquant et clinquant comme du bon vieux Coming up). Mais un souvenir est-il en quoi que ce soit comparable à l'intensité du moment vécu ? Les meilleurs passages d'A New Morning évoquent les résidus d'une époque à jamais engloutie, et surtout ne tentent jamais, malgré des arrangement parfois malins ('Astrogirl', 'Untitled'), d'être plus que ça.
S'il fallait trouver une bonne raison d'acheter cette réédition (mais quelle bonne raison peut-on avoir d'acheter un mauvais album ?), elle résiderait sans doute dans un second CD qui, plus acoustique, renferme quelques jolies choses, plus souvent du côté des riffs d'Oakes ('Simon') que des lyrics d'Anderson, qui paraît temporairement bloqué en mode "lyrisme pataud". D'une manière générale, hélas (pour l'éditeur – nous on s'en moque un peu), le niveau reste moyen, même si ces bonus le ré-haussent un peu. Pas de bol, quand on y pense : si Suede s'était séparé en 2000, comme il a été à deux doigts de le faire alors, il serait parti au sommet et resté dans l'histoire. En s'arrêtant en 2003, son histoire à lui s'est achevée en eau de boudin. Comme trop d'autres.
👎 A New Morning
Suede | Epic, 2002
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