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Quoi de neuf sous le ciel souvent orageux de Hugo Hamilton ? Ma foi, pas grand-chose, donc beaucoup. La phrase n'est pas sibilline : elle n'est que la continuité de ce que nous relevions l'an passé, à propos de son précédent roman. L'univers de Hamilton évolue peu, ses obsessions semble tétaniser ses ambitions, son écriture souvent poignante assure l'arbitrage.
Alors dans un tel contexte, le moindre pas grand-chose peut paraître une petite révolution. De fait, il y a une vivacité et une énergie dans les premières pages de ce Hand in Fire qui donnent le sentiment de totalement redécouvrir l'auteur, ou à tout le moins impose de se rappeler qu'à ses débuts, il fut un écrivain particulièrement teigneux et déjanté (c'est d'ailleurs le titre français de l'un de ses meilleurs romans, Headbanger). Entendons-nous bien : Hand in the Fire n'est pas un livre particulièrement rock'n'roll, ni même franchement rigolo. Mais dans ses cinquante premières pages au moins, il épate par son humour, sa profonde vitalité et une forme de légèreté qui faisait cruellement défaut à Disguise, roman touchant mais assez lent et déprimant.
Le secret de cette énergie retrouvée réside sans doute dans un parti-pris amusant l'amenant à évoquer un sujet qui, littéralement, n'existe pas : l'immigration en Irlande, autant dire la pluie au Sahara tant, dans l'imaginaire collectif, l'Irlandais est plus volontiers représenté comme celui qui émigre que comme celui qui accueille. Hamilton renverse habilement ce cliché en adoptant la voix de Vid, immigré serbe en quête d'intégration dans un pays dont il ignore tout et qu'il ne comprend fondamentalement pas. C'est que ces Irlandais n'ont pas grand-chose de commun avec l'humeur slave, plus réservée et mélancolique, quand les individus que croisent Vid donnent le sentiment d'exploser en permanence, de faire de bruit, de rebondir, de parler tout le temps. L'idée a beau ne pas être très originale, on se dit que seul un Irlandais profondément attaché à son pays pouvait si bien raconter sa société en la prenant de l'extérieur - sinon carrément à revers. Le mélange de sincère candeur et de fausse ironie du narrateur assure une bonne partie du travail de sappe de la résistance du lecteur : toute personne ayant déjà lu Hamilton en sait infiniement plus que Vid sur le pays où il vient de s'exiler, et redécouvre sous un jour totalement différent ce qu'il sait déjà, cette société qui se remet en place, dans ses blessures, son intolérance, ses contradictions... et bien entendu sa belle humanité. Il en prend, pourtant, des portes dans la figure, le pauvre Vid - éternel rejeté tournant en rond autour de la culture irlandaise en donnant l'impression de ne jamais pouvoir y pénétrer. Mais sa bonne volonté et sa gentillesse ne le désertent jamais, et elles finiront par payer, dans une chute morale, logique, presque banale... et pourtant tellement à contre-courant des âneries que l'on peut lire de nos jours à propos de l'immigration.
Quoi de neuf sous le ciel souvent orageux de Hugo Hamilton ? Ma foi, pas grand-chose, donc beaucoup. La phrase n'est pas sibilline : elle n'est que la continuité de ce que nous relevions l'an passé, à propos de son précédent roman. L'univers de Hamilton évolue peu, ses obsessions semble tétaniser ses ambitions, son écriture souvent poignante assure l'arbitrage.
Alors dans un tel contexte, le moindre pas grand-chose peut paraître une petite révolution. De fait, il y a une vivacité et une énergie dans les premières pages de ce Hand in Fire qui donnent le sentiment de totalement redécouvrir l'auteur, ou à tout le moins impose de se rappeler qu'à ses débuts, il fut un écrivain particulièrement teigneux et déjanté (c'est d'ailleurs le titre français de l'un de ses meilleurs romans, Headbanger). Entendons-nous bien : Hand in the Fire n'est pas un livre particulièrement rock'n'roll, ni même franchement rigolo. Mais dans ses cinquante premières pages au moins, il épate par son humour, sa profonde vitalité et une forme de légèreté qui faisait cruellement défaut à Disguise, roman touchant mais assez lent et déprimant.
Le secret de cette énergie retrouvée réside sans doute dans un parti-pris amusant l'amenant à évoquer un sujet qui, littéralement, n'existe pas : l'immigration en Irlande, autant dire la pluie au Sahara tant, dans l'imaginaire collectif, l'Irlandais est plus volontiers représenté comme celui qui émigre que comme celui qui accueille. Hamilton renverse habilement ce cliché en adoptant la voix de Vid, immigré serbe en quête d'intégration dans un pays dont il ignore tout et qu'il ne comprend fondamentalement pas. C'est que ces Irlandais n'ont pas grand-chose de commun avec l'humeur slave, plus réservée et mélancolique, quand les individus que croisent Vid donnent le sentiment d'exploser en permanence, de faire de bruit, de rebondir, de parler tout le temps. L'idée a beau ne pas être très originale, on se dit que seul un Irlandais profondément attaché à son pays pouvait si bien raconter sa société en la prenant de l'extérieur - sinon carrément à revers. Le mélange de sincère candeur et de fausse ironie du narrateur assure une bonne partie du travail de sappe de la résistance du lecteur : toute personne ayant déjà lu Hamilton en sait infiniement plus que Vid sur le pays où il vient de s'exiler, et redécouvre sous un jour totalement différent ce qu'il sait déjà, cette société qui se remet en place, dans ses blessures, son intolérance, ses contradictions... et bien entendu sa belle humanité. Il en prend, pourtant, des portes dans la figure, le pauvre Vid - éternel rejeté tournant en rond autour de la culture irlandaise en donnant l'impression de ne jamais pouvoir y pénétrer. Mais sa bonne volonté et sa gentillesse ne le désertent jamais, et elles finiront par payer, dans une chute morale, logique, presque banale... et pourtant tellement à contre-courant des âneries que l'on peut lire de nos jours à propos de l'immigration.
👍👍 Hands in the Fire [Je ne suis pas ici]
Hugo Hamilton | Fourth Estate, 2010
Coucou Thomas,
RépondreSupprimerBon, comme je passais par là et que je constate qu'il y a zéro commentaire sur ce post, je me dis que tu vas encore désespérer de l'inculture de tes visiteurs, donc, bref, je laisse une trace de mon passage.
Sinon, je dois avouer que le seul roman que j'ai lu d'Hamilton, Sang Impur (The Speckled People) ne m'avait pas emballée plus que ça, il me semble me souvenir qu'il comporte quelmques longueurs...
Bonne journée !!
:-)
RépondreSupprimerTu es un ange.
Alors dis-moi, à part ça, comment vas-tu ? Tu pars un peu cet été ? ^^
Je vais bien, mais j'attends effectivement les vacances avec impatience : je pars la deuxième quinzaine d'août en provence. Comme ça, je serai toute bronzée moi aussi...
RépondreSupprimerAh oui, c'est pas tout de suite, j'imagine que l'attente doit devenir interminable !
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