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Pulp est un groupe qui s'est beaucoup cherché et a mis très longtemps à se trouver. En terme de line-up, en terme d'ambitions, en terme de style. Surtout de style : sporadique, décousue, inégale, la discographie du "groupe" de Sheffield avant les années britpop n'a jamais eu bonne presse (façon de parler, puisqu'en réalité elle n'en a eu que très peu, de presse). Ne te voile pas la face, cher lecteur : ce ne sera guère différent ici.
Enregistré par un Jarvis Cocker à peine sorti de l'adolescence et accompagné de quelques potes n'ayant pas le moindre rapport avec le groupe Pulp tel qu'on le connaît aujourd'hui, It est plutôt un bon album dans l'absolu. C'est même peut-être le meilleur du groupe dans les années quatre-vingts (les autres étant balayés dans une production assez infâme). Osons même avancer que s'il paraissait aujourd'hui, il pourrait peut-être remporter un petit succès tant, par instants, l'imitation des Smiths est troublante et supérieure à celle que tant de groupes nous infligent en 2012. Ce 'My Lighthouse' ! Ce 'Wishful Thinkings' ! Et par anticipation, encore, puisqu'au moment de leur enregistrement Marr et Morrissey viennent tout juste de rencontrer Mike Joyce (certes, Sheffield n'est jamais qu'à une grosse heure de Manchester).
It est donc un album sympathique, mais il reste un peu trop sage, voire un peu trop cul-serré pour vraiment emporter l'adhésion. Jarvis Cocker, manifestement plus fun et déjanté à quarante ans qu'à vingt, s'y montre aussi doué dans les mélodies qu'appliqué dans le chapardage (chez Human League un peu, chez Kevin Ayers pas mal, et - beaucoup - chez Echo & The Bunnymen), et surtout très naïf dans des textes à des années lumière de l'écriture dandy-cool-pince-sans-rire qu'on lui connaît aujourd'hui. Même commentaire au demeurant concernant l'interprétation, très emphatique, qui hésite entre le lyrisme touchant et du Morrissey empoté (je n'en remet pas une couche, promis... contentez-vous d'écouter 'Blue Girls' - vous comprendrez tout de suite ce que je veux dire). C'est un bon disque et c'est bien ce qui est cruel lorsqu'on le réécoute trente ans (!) après : on sent bien que dans cette formule, dans ce style, Pulp n'ira nulle part, incapable de soutenir, même trois secondes pour déconner, la concurrence new-wave/pop de son époque (tout en étant, paradoxe délicieux, bien meilleur que beaucoup de disques du genre paraissant de nos jours). Il n'y a ni réel potentiel, ni même marge de progression. Pas un hasard si Cocker mettra par la suite quatre années à tout changer de la cave au grenier pour aboutir à l'album suivant, Freaks. It, c'est l'album très abouti, quasiment terminal, d'un songwriter qui ne l'est pas du tout et d'un groupe médiocre ici à son apogée. Personne ne pourra s'étonner qu'il soit totalement passé inaperçu, ni même que son auteur l'ait plus ou moins renié depuis longtemps. Quel écrivain aurait envie de se vanter de ses poèmes de lycée, même des meilleurs ?
Pulp est un groupe qui s'est beaucoup cherché et a mis très longtemps à se trouver. En terme de line-up, en terme d'ambitions, en terme de style. Surtout de style : sporadique, décousue, inégale, la discographie du "groupe" de Sheffield avant les années britpop n'a jamais eu bonne presse (façon de parler, puisqu'en réalité elle n'en a eu que très peu, de presse). Ne te voile pas la face, cher lecteur : ce ne sera guère différent ici.
Enregistré par un Jarvis Cocker à peine sorti de l'adolescence et accompagné de quelques potes n'ayant pas le moindre rapport avec le groupe Pulp tel qu'on le connaît aujourd'hui, It est plutôt un bon album dans l'absolu. C'est même peut-être le meilleur du groupe dans les années quatre-vingts (les autres étant balayés dans une production assez infâme). Osons même avancer que s'il paraissait aujourd'hui, il pourrait peut-être remporter un petit succès tant, par instants, l'imitation des Smiths est troublante et supérieure à celle que tant de groupes nous infligent en 2012. Ce 'My Lighthouse' ! Ce 'Wishful Thinkings' ! Et par anticipation, encore, puisqu'au moment de leur enregistrement Marr et Morrissey viennent tout juste de rencontrer Mike Joyce (certes, Sheffield n'est jamais qu'à une grosse heure de Manchester).
It est donc un album sympathique, mais il reste un peu trop sage, voire un peu trop cul-serré pour vraiment emporter l'adhésion. Jarvis Cocker, manifestement plus fun et déjanté à quarante ans qu'à vingt, s'y montre aussi doué dans les mélodies qu'appliqué dans le chapardage (chez Human League un peu, chez Kevin Ayers pas mal, et - beaucoup - chez Echo & The Bunnymen), et surtout très naïf dans des textes à des années lumière de l'écriture dandy-cool-pince-sans-rire qu'on lui connaît aujourd'hui. Même commentaire au demeurant concernant l'interprétation, très emphatique, qui hésite entre le lyrisme touchant et du Morrissey empoté (je n'en remet pas une couche, promis... contentez-vous d'écouter 'Blue Girls' - vous comprendrez tout de suite ce que je veux dire). C'est un bon disque et c'est bien ce qui est cruel lorsqu'on le réécoute trente ans (!) après : on sent bien que dans cette formule, dans ce style, Pulp n'ira nulle part, incapable de soutenir, même trois secondes pour déconner, la concurrence new-wave/pop de son époque (tout en étant, paradoxe délicieux, bien meilleur que beaucoup de disques du genre paraissant de nos jours). Il n'y a ni réel potentiel, ni même marge de progression. Pas un hasard si Cocker mettra par la suite quatre années à tout changer de la cave au grenier pour aboutir à l'album suivant, Freaks. It, c'est l'album très abouti, quasiment terminal, d'un songwriter qui ne l'est pas du tout et d'un groupe médiocre ici à son apogée. Personne ne pourra s'étonner qu'il soit totalement passé inaperçu, ni même que son auteur l'ait plus ou moins renié depuis longtemps. Quel écrivain aurait envie de se vanter de ses poèmes de lycée, même des meilleurs ?
👍 It
Pulp | Rhino, 1983 (Fire Records, 2012 pour la présente édition)