...
Inutile de te voiler la face : toi aussi, tu l'as ressenti. Si tu as jamais été vraiment fan de Community, tu n'as pu te dégager de la chape de plomb qui t'a recouvert depuis les premiers instants de la saison quatre. Tu es d'abord passé par tous les états (déception, colère, espoir, nostalgie, résignation), et puis au fil des épisodes, tout cela a cédé la place à une tristesse un peu diffuse sur laquelle tu n'es toujours pas parvenu à mettre de mots.
Ce n'est pourtant pas la première série qui décline. Ni la seule. Encore moins du côté des sitcoms. Ce n'est même sans doute pas, objectivement, le déclin le plus spectaculaire ni le plus choquant. Mais c'est celui qui fait le plus mal. Le seul, en fait, qui fasse réellement mal. Tu ne soupires pas d'agacement en voyant le spectacle que la série donne chaque semaine, comme tu peux le faire devant les autres. Tu ressens juste une véritable peine. Tu trouves douloureux de voir ce qu'elle est devenue. Tellement qu'au fond de toi, tu aurais préféré qu'elle s'arrête. Voire qu'elle devienne juste mauvaise. Voire merdique. Enfin : tout sauf ça. Cette manière de se normaliser. De se perdre en donnant l'apparence de n'avoir pas évolué d'un iota. Le pire, c'est que tu ne peux même pas en parler parce que personne ne te comprend. Tu n'arrives pas à expliquer cette tristesse qui t'envahit désormais chaque semaine lorsque commence l'épisode, et qui n'a hélas rien à voir avec le regard de Danny Pudi. Jusqu'alors, tu pensais qu'il y avait ceux qui regardaient Community et les autres. Tu comprends petit à petit que le monde a toujours été divisé en trois : ceux qui ne regardent pas Community, ceux qui regardent Community et ceux qui aiment Community. De cet amour inconditionnel que seules savent générer les plus belles œuvres pop, cet amour qui n'a pas besoin de mots, de chroniques de dix pages, de notes et de remarques objectives. Cet amour qui te rendait jusqu'alors ses défauts négligeables - peut-être même te faisaient-ils t'en sentir encore plus proche. Après tout, toi non plus tu ne manques pas de défauts.
Ceux qui regardent Community, cette saison, n'ont pas senti de différence particulière. Quand tu leur disais qu'ils avaient tort, ils haussaient les épaules : si on ne t'avait pas raconté pour le licenciement de Dan Harmon, tu trouverais ça très bien. Tout ça, c'est dans ta tête. C'est complètement subjectif. Tu ne dis rien. Mais par devers toi tu as tout de même un peu envie de répondre que Oui, évidemment que c'est subjectif - pauvre con. C'est un sentiment, abruti. Tu sais ce que c'est qu'un sentiment ? Je demande parce que vu les séries que tu regardes...
Alors oui, ce n'est qu'un sentiment. Rien que ça et au moins ça. Bien sûr, tu pourrais aller chercher des exemples. Essayer d'expliquer pourquoi l'épisode 4x09 ("Intro to Felt Surrogacy") est raté et ne l'aurait jamais été à l'époque de Harmon. En faire l'épisode le plus représentatif d'une saison qui, de bout en bout, aura eu la couleur et la forme et l'odeur de Community pour n'être Community qu'en de brefs instants ("Cooperative Escapism in Familial Relations", "Herstory of Dance"), et encore. Des épisodes relativement peu meta, comme si les nouveaux patrons du show ne parvenaient pas à mélanger le conceptuel et l'humain, et avaient donc décidé de ne plus faire que l'un ou l'autre selon les semaines. Avec une nette préférence pour le premier des deux versants. Le conceptuel, c'est bien. C'est cool. C'est ce qui a rendu cette série culte. Sauf que ce n'est pas qui fait qu'on en est tombé amoureux. Community a conservé ses références et a même réussi à esquiver le côté machine à gimmicks qui la guettait du temps de Harmon. Tu devrais être en train de sabrer le champagne. Sauf que non : tu la regardes désormais sans la moindre passion, parce que tu vois bien, toi, qu'elle a perdu toute sa charge émotionnelle. Que ses trips meta ne sont plus que cela : des trips, des délires, sympathiques sans doute mais presque systématiquement dénués de poésie. L'une des plus jolies scènes de la troisième saison était cette chute d'épisode avec les ombres chinoises, dans la chambre entièrement composée d'oreillers. C'était beau et ce n'était pas meta pour deux sous. C'était simple, inventif et plein de tendresse. On se serait cru chez le Tim Burton de la grande époque, le vrai, celui qui au-delà du gothique surjoué savait la valeur de la magie et de l'onirisme. Ce genre de scène n'existe plus dans le Community d'aujourd'hui. Il est devenu une machine à mettre en abyme comme d'autre sitcoms sont devenues des machines à déclencher le rire facile. Moses Port et David Guarascio, qui ont repris le show, sont les auteurs du sympathique Aliens in America et ont œuvré sur Happy Endings. Il n'y avait sur le papier aucune raison de les haïr. Pourtant aujourd'hui, tu as envie de leur crever les yeux. Tu n'as pourtant jamais rien eu contre leurs travaux. Tu étais même prêt à reconnaître que le choix n'était pas idiot, l'une ou l'autre de ces deux séries étant sinon meilleure, du moins différente du tout-venant de la sitcom US. Pourtant à présent, tu ne vois plus que les raisons pour lesquelles c'était le choix le plus con du monde. Happy Endings ! S'il est bien une série qui - en dehors de ses qualités propres - est totalement dépourvue de poésie et ne brille que par son cynisme, c'est bien ce distributeur automatique de références pop, à l'écriture en apnée et au name-dropping épileptique. Aliens in America, de même, ne brillait pas par sa fantaisie et son goût pour la contemplation. L'une et l'autre sont (était en ce qui concerne la seconde) des séries cools, vives, cruelles quand Communtiy n'a jamais parlé que d'amitié, de solidarité et d'empathie - des choses désormais remplacées par des niaiseries moralisatrices. On en revient à cet épisode, "Intro to Felt Surrogacy". A la fin, pour préserver leur amitié, Jeff suggère que chacun révèle le secret honteux qu'ils ont avoué la veille avant de totalement l'oublier (sauf Shirley, qui du coup se sent exclue). Tout sonne faux dans cette scène, sans jamais trahir objectivement l'esprit de la série. Tu ne peux pas dire que Jeff n'aurait jamais dit ça, ni que cette situation n'aurait jamais pu être imaginée par Dan Harmon. Et pourtant, en la voyant, tu n'y crois pas une seconde. D'une certaine manière, ton regard désenchanté, cette manière que tu as d'aller traîner ta mélancolie de forum en forum après chaque épisode, c'est peut-être bien tout ce qu'il reste d'irrationnel dans cenouveau remake de Community. Le reste a disparu. Tu ne saurais pas en faire une liste. Tu ne saurais pas le nommer. Mais ton ventre te le rappelle à chaque épisode, et savoir que ce très mauvais reboot vient d'être renouvelé pour une seconde saison te colle juste la nausée.
Inutile de te voiler la face : toi aussi, tu l'as ressenti. Si tu as jamais été vraiment fan de Community, tu n'as pu te dégager de la chape de plomb qui t'a recouvert depuis les premiers instants de la saison quatre. Tu es d'abord passé par tous les états (déception, colère, espoir, nostalgie, résignation), et puis au fil des épisodes, tout cela a cédé la place à une tristesse un peu diffuse sur laquelle tu n'es toujours pas parvenu à mettre de mots.
Ce n'est pourtant pas la première série qui décline. Ni la seule. Encore moins du côté des sitcoms. Ce n'est même sans doute pas, objectivement, le déclin le plus spectaculaire ni le plus choquant. Mais c'est celui qui fait le plus mal. Le seul, en fait, qui fasse réellement mal. Tu ne soupires pas d'agacement en voyant le spectacle que la série donne chaque semaine, comme tu peux le faire devant les autres. Tu ressens juste une véritable peine. Tu trouves douloureux de voir ce qu'elle est devenue. Tellement qu'au fond de toi, tu aurais préféré qu'elle s'arrête. Voire qu'elle devienne juste mauvaise. Voire merdique. Enfin : tout sauf ça. Cette manière de se normaliser. De se perdre en donnant l'apparence de n'avoir pas évolué d'un iota. Le pire, c'est que tu ne peux même pas en parler parce que personne ne te comprend. Tu n'arrives pas à expliquer cette tristesse qui t'envahit désormais chaque semaine lorsque commence l'épisode, et qui n'a hélas rien à voir avec le regard de Danny Pudi. Jusqu'alors, tu pensais qu'il y avait ceux qui regardaient Community et les autres. Tu comprends petit à petit que le monde a toujours été divisé en trois : ceux qui ne regardent pas Community, ceux qui regardent Community et ceux qui aiment Community. De cet amour inconditionnel que seules savent générer les plus belles œuvres pop, cet amour qui n'a pas besoin de mots, de chroniques de dix pages, de notes et de remarques objectives. Cet amour qui te rendait jusqu'alors ses défauts négligeables - peut-être même te faisaient-ils t'en sentir encore plus proche. Après tout, toi non plus tu ne manques pas de défauts.
Ceux qui regardent Community, cette saison, n'ont pas senti de différence particulière. Quand tu leur disais qu'ils avaient tort, ils haussaient les épaules : si on ne t'avait pas raconté pour le licenciement de Dan Harmon, tu trouverais ça très bien. Tout ça, c'est dans ta tête. C'est complètement subjectif. Tu ne dis rien. Mais par devers toi tu as tout de même un peu envie de répondre que Oui, évidemment que c'est subjectif - pauvre con. C'est un sentiment, abruti. Tu sais ce que c'est qu'un sentiment ? Je demande parce que vu les séries que tu regardes...
Alors oui, ce n'est qu'un sentiment. Rien que ça et au moins ça. Bien sûr, tu pourrais aller chercher des exemples. Essayer d'expliquer pourquoi l'épisode 4x09 ("Intro to Felt Surrogacy") est raté et ne l'aurait jamais été à l'époque de Harmon. En faire l'épisode le plus représentatif d'une saison qui, de bout en bout, aura eu la couleur et la forme et l'odeur de Community pour n'être Community qu'en de brefs instants ("Cooperative Escapism in Familial Relations", "Herstory of Dance"), et encore. Des épisodes relativement peu meta, comme si les nouveaux patrons du show ne parvenaient pas à mélanger le conceptuel et l'humain, et avaient donc décidé de ne plus faire que l'un ou l'autre selon les semaines. Avec une nette préférence pour le premier des deux versants. Le conceptuel, c'est bien. C'est cool. C'est ce qui a rendu cette série culte. Sauf que ce n'est pas qui fait qu'on en est tombé amoureux. Community a conservé ses références et a même réussi à esquiver le côté machine à gimmicks qui la guettait du temps de Harmon. Tu devrais être en train de sabrer le champagne. Sauf que non : tu la regardes désormais sans la moindre passion, parce que tu vois bien, toi, qu'elle a perdu toute sa charge émotionnelle. Que ses trips meta ne sont plus que cela : des trips, des délires, sympathiques sans doute mais presque systématiquement dénués de poésie. L'une des plus jolies scènes de la troisième saison était cette chute d'épisode avec les ombres chinoises, dans la chambre entièrement composée d'oreillers. C'était beau et ce n'était pas meta pour deux sous. C'était simple, inventif et plein de tendresse. On se serait cru chez le Tim Burton de la grande époque, le vrai, celui qui au-delà du gothique surjoué savait la valeur de la magie et de l'onirisme. Ce genre de scène n'existe plus dans le Community d'aujourd'hui. Il est devenu une machine à mettre en abyme comme d'autre sitcoms sont devenues des machines à déclencher le rire facile. Moses Port et David Guarascio, qui ont repris le show, sont les auteurs du sympathique Aliens in America et ont œuvré sur Happy Endings. Il n'y avait sur le papier aucune raison de les haïr. Pourtant aujourd'hui, tu as envie de leur crever les yeux. Tu n'as pourtant jamais rien eu contre leurs travaux. Tu étais même prêt à reconnaître que le choix n'était pas idiot, l'une ou l'autre de ces deux séries étant sinon meilleure, du moins différente du tout-venant de la sitcom US. Pourtant à présent, tu ne vois plus que les raisons pour lesquelles c'était le choix le plus con du monde. Happy Endings ! S'il est bien une série qui - en dehors de ses qualités propres - est totalement dépourvue de poésie et ne brille que par son cynisme, c'est bien ce distributeur automatique de références pop, à l'écriture en apnée et au name-dropping épileptique. Aliens in America, de même, ne brillait pas par sa fantaisie et son goût pour la contemplation. L'une et l'autre sont (était en ce qui concerne la seconde) des séries cools, vives, cruelles quand Communtiy n'a jamais parlé que d'amitié, de solidarité et d'empathie - des choses désormais remplacées par des niaiseries moralisatrices. On en revient à cet épisode, "Intro to Felt Surrogacy". A la fin, pour préserver leur amitié, Jeff suggère que chacun révèle le secret honteux qu'ils ont avoué la veille avant de totalement l'oublier (sauf Shirley, qui du coup se sent exclue). Tout sonne faux dans cette scène, sans jamais trahir objectivement l'esprit de la série. Tu ne peux pas dire que Jeff n'aurait jamais dit ça, ni que cette situation n'aurait jamais pu être imaginée par Dan Harmon. Et pourtant, en la voyant, tu n'y crois pas une seconde. D'une certaine manière, ton regard désenchanté, cette manière que tu as d'aller traîner ta mélancolie de forum en forum après chaque épisode, c'est peut-être bien tout ce qu'il reste d'irrationnel dans ce
👎👎 Community (saison 4)
créée par Dan "reviiiiiiiient pitié" Harmon
NBC, 2013
Bon, on en parle du final ?
RépondreSupprimerNon!!
SupprimerIl n'y a pas grand chose à en dire je crois.
SupprimerC'était nul. Encore plus NUL que tout le reste de la saison.
SupprimerGénial, le titre :-)
RépondreSupprimerJe me suis creusé, crois-moi !
SupprimerAmen !
RépondreSupprimerJ'ai toujours été un peu sceptique sur Community, mais c'est vrai qu'en comparaison avec la 4, les 3 premières saisons sont la meilleure série de tous les temps...
RépondreSupprimerDe tous les temps ? Waouh ! Tu as vraiment dû détester la saison 4 :-)
SupprimerBen je découvre le nom de la série ici, jamais entendu parler donc je suis une happy few, si jamais je regarde j'arrêterai avant de pleurer :-)
RépondreSupprimerCe n'est pourtant pas la première fois que j'en parle, loin de là ^^
SupprimerComme quoi rien ne vaut une bonne vieille allusion à la calinothérapie ;-)
Ur welcome, buddy boy. Look forward to your next show!
RépondreSupprimerJe te rejoins du début à la fin évidemment, même si je n'ai pas vu la saison en entier (j'ai du voir les 5 premiers épisodes). Je n'ai pas pu supporter de voir des personnages que j'aimais tant devenir chiants. Même pas juste chiants, c'est comme si tu réalisais d'un coup que tes potes que tu vois toutes les semaines jouent une pièce de théâtre quand ils te voient. Bref, c'est bien plus qu'une déception, c'est un déchirement. Tout cela étant effectivement accentué par le fait que certains disent "Moui, mais c'était déjà pas terrible dans la saison 3" ou alors "J'trouve ça toujours fun". Je n'ai jamais beaucoup ri devant Community, par contre je souriais beaucoup. Sur cette saison, j'ai eu la désagréable sensation d'avoir à me forcer à rire aux gags pour faire partie du truc.
RépondreSupprimerEt je suis encore plus sidéré de voir que cet ersatz de Community va continuer à vivre alors que Dan Harmon a eu tant de mal à la renouveller au départ. Que font les fans, ceux qui s'étaient battus pour une troisième saison ?
Eh bien sûr - on me l'a encore faite il y a deux jours - l'inévitable "c'est une hallucination collective, on ne vous aurait pas dit que Dan Harmon était parti, vous n'auriez rien remarqué."
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