[Mes disques à moi (et rien qu'à moi) - N°124]
This Is Hardcore - Pulp (1998)
Mon cher Thomas, il va bien falloir te rendre à l'évidence : tu n'y arriveras pas. Tu auras beau le tourner et le retourner dans tous les sens, tu n'écriras jamais ce texte sur This Is Hardcore. Ça doit bien faire dix ans que tu essaies, et pour quel résultat, dis-moi ? Quatre ou cinq brouillons dont trois carrément effacés, des centaines de notes éparses, sans parler de tentatives de contournement si éculées que même le plus mauvais journaliste du plus mauvais journal du pays le moins rock'n'roll du monde ne parviendrait pas à les parcourir sans se fendre d'un sourire navré. Tu as tenté quasiment tous les angles, de la lettre à ta femme qui adore tellement ce groupe à l'attaque par la bande en reprenant l'intégralité des parutions majeures de l'année 1998, en passant par l'inévitable anecdote personnelle à moitié inventée histoire de meubler un peu avant d'asséner que This Is Hardcore est un des plus grands albums des années 90 (comme si tout le monde ne le savait pas déjà). Un tel acharnement a beau forcer l'admiration, il serait temps d'accepter que tout cela est peine perdue. C'est un échec et ce n'est pas si grave. Tu n'as rien à dire sur This Is Hardcore ? Ma foi, tu n'es sans doute pas le seul. Il est nombre de choses en ce monde sur lesquelles les gens n'ont rien à dire, et ne disent donc... rien. Pourquoi devrait-il en être autrement dans ce cas précis ? J'entends que ce soit frustrant, quand on possède autant d'expérience que d'égo, de devoir reconnaître qu'on n'a rien à dire sur un de ses albums préférés de tous les temps. Je le perçois d'autant mieux que cela t'est déjà arrivé par le passé et que je me rappelle, non sans douleur, les trésors d'inventivité que tu m'as fait déployer pour préserver les apparences. Quand on intitule une rubrique Mes disques à moi (et rien qu'à moi), avec tout ce que cela sous-tend d'humilité, on fait le choix de jouer avec un handicap certain. Mais allons : depuis bientôt dix-sept ans que ton lectorat te suit, il peut bien tout entendre – n'a-t-il pas déjà tout lu, pas toujours pour le meilleur ? Dix-sept ans. T'en rends-tu compte ? À l'époque, This Is Hardcore était un album récent ! Et déjà alors, tu ne parvenais pas à écrire dessus. Je veux bien que tu laisses parfois mûrir les choses, les idées et – c'est essentiel – les mots. Mais dix-sept ans pour publier un pauvre article, ça commence à devenir inquiétant. Admets ta défaite et passe au suivant : il te reste encore facile une vingtaine de Tes disques à toi à dégoupiller avant de mourir, et tu ne rajeunis pas. Ça intéresse qui, de toute façon, This Is Hardcore ? À part les gens qui le connaissent déjà ? Qui écoute encore ce genre de disque aujourd'hui ?
J'aime d'autant moins te voir te complaire dans cet échec programmé que ses raisons, somme toute, devraient t'apparaître évidentes : tu n'as aucune histoire avec Pulp. Tu as découvert tardivement, tu n'aimes que la moitié des albums, tu n'as pas vu Cocker se moquer de Jackson aux Brit Awards et tu dois être la seule personne au monde à ne pas se rappeler à avoir entendu "Common People" à sa sortie. Tu trouves les premiers disques laborieux, le dernier pénible – tu n'écoutes jamais que la trilogie dite britpop, avec plaisir mais sans ferveur particulière puisque, le fameux This Is Hardcore excepté, tu n'as acheté aucun de ces CDs à l'époque. Tu as pris Pulp à l'envers, par son versant le moins glam, le moins festif et le moins pop, et la suite, coupable de ne jamais être si ténébreuse ni baroque, ne fut que tristesse et résignation – un peu comme les chansons de This Is Hardcore elles-mêmes, maintenant que j'y pense. Adolescent viscéralement mal dans ta peau, tu ne pouvais fatalement t'éprendre de Jarvis Cocker que par l'entremise de son album le plus mélancolique, désemparé, incarnation de la désincarnation jusque dans sa pochette (magnifique, mais ce n'est pas une raison là non plus pour te forcer à écrire dessus). Malheureusement pour toi mais heureusement pour sa santé mentale, Cocker ne passa pas les vingt-cinq années suivantes à écrire des choses aussi poignantes et désabusées que "TV Movie" – je suis certain qu'il ne t'en aura pas voulu de ne pas être resté concentré sur la suite des programmes.
Ce qui est amusant, et je devine que ton impuissance ne t'en frustre qu'un peu plus, c'est évidemment que de tous ces Disques à toi que tu as chroniqués avec parfois autant de passion que l'on en met dans la sodomie d'une poupée gonflable, This Is Hardcore est sans doute celui qui te ressemble le plus. Est-ce lui qui t'a appris à ironiser ainsi sur tes propres faiblesses, ou bien est-ce que parce que tu étais déjà ainsi qu'il t'a à ce point parlé à sa sortie ? Est-ce la tendre auto-dérision de "Dishes" qui t'a contaminé au point de te faire écrire ces choses qu'on a parfois dites émusantes, ou t'es-tu simplement trouvé une âme sœur insoupçonnée le jour où tu as vu Cocker interpréter ce titre dans NPA ? L’œuf, la poule... tout cela n'est guère nouveau et je suppose que ce passage serait sabré s'il s'était agi d'un de tes précieux textes. Il n'empêche que chaque fois que tu me repasses This Is Hardcore, ma curiosité se ravive : ce jour-là, le lendemain de l'émission, lorsque tu as foncé chez le disquaire du coin pour acheter l'album (en espérant qu'il l'ait reçu)... t'es-tu pris de plein fouet, comme d'autres, la dépression que Jarvis Cocker était trop pudique et indolent pour nommer ainsi, ou es-tu simplement entré en empathie avec lui, le temps d'un instant encore inachevé à ce jour – alors qu'aux dernières nouvelles, le britannique se porte bien et que toi-même, tu ne vas pas si mal ? Note que dans l'un ou l'autre des cas, le simple fait que vous ayez tous deux vécu vingt-cinq années supplémentaires autorise à s'étonner. Une fois gratté le vernis, les jolis arrangements et les punchlines nonchalantes, l'étape qui suit théoriquement immédiatement This Is Hardcore, c'est... eh bien, disons que ce n'est pas la Joie, l'Allégresse, ni la Grandeur – puisque tout est devenu dérisoire, puisque la vie elle-même n'est plus qu'une œillade entendue et puisque les mots n'ont plus aucun sens à force de former des phrases qui en ont plusieurs. Rien que ce titre, déjà : This Is Hardcore. Cette demi-blague que tout le monde alors avait cru entière – et avait, surtout, cru comprendre. Comme si choisir ce titre relevait juste de la provocation bon enfant et comme si, décorrélé de la chanson éponyme, ledit titre ne disait pas quelque chose de cru et douloureux sur l'état d'esprit de ses auteurs, au bout du rouleau et au bord du split. Est-il si étonnant qu'aucun d'entre eux, ensemble ou séparément, n'ait plus jamais navigué en de telles sphères ? T'es-tu déjà demandé si, dans le fond, la raison pour laquelle tu n'avais aucune histoire avec Pulp n'était pas tout simplement que ce groupe avait une dimension trop joviale, trop gaguesque pour jamais tout à fait parvenir à te toucher ? Que tu avais besoin qu'il sombre dans une sorte d'abysses, qu'il soit dans le dur, pour réellement te prendre d'amour pour lui ? Qu'avec ses popsongs dépitées à la "Help the Aged", sa fausse esthétique rétro et son morceau-titre au groove aussi sexy que sa dialectique est goguenarde, This Is Hardcore était la parfaite réponse à tout ce qui t'indifférait un peu chez un groupe dont le plus grand chef-d’œuvre jusqu'alors célébrait joyeusement la bizarrerie de tout un chacun ? Que tu avais secrètement envie que Pulp sorte du supermarché pour aller jouer ses pitreries désabusées au milieu d'un musée d'art (post)moderne, non pas tant parce qu'il se serait subitement pris au sérieux que parce son leader se serait mis à souffrir de la solitude, de l'isolement et d'un succès si absurde qu'il en deviendrait abstrait ? "All I know is I can't even think / Of anything clever to say / So I say / Why pretend any longer?" Je vais te dire, mon vieux Thomas : elle est là, la raison de ton échec perpétuel à écrire quoi que ce soit de pertinent au sujet de This Is Hardcore. Ce n'est pas un de tes disques à toi (et rien qu'à toi). C'est un disque qui parle de toi, presque tout le temps, qui en parlait déjà beaucoup trop à l'époque et qui, comme si ce brave Jarvis ne t'avait pas assez prévenu, n'a fait qu'en parler de plus en plus au gré des vingt-cinq années qui suivirent. Impossible de régler ta focale : même quand tu veux évoquer ses moments les plus légers, tu finis invariablement par voir flou. Nous serons d'accord que ce n'est pas en écrivant cela que tu donneras envie à qui que ce soit ne le connaissant pas déjà de jeter la moindre oreille dessus – au contraire. Enfin moi, je dis ça pour ton bien mais n'y réfléchis pas trop, s'il te plaît. Tu serais capable d'essayer de nous en faire un article.
Sur le fond, rien à dire, tu as raison : This is hardcore est un des meilleurs disques des années 90, tout le monde le sait déjà, on s'en fiche, surtout les rares qui l'ignorent.
RépondreSupprimerSur la forme, par contre, vraiment... Tant de choses dans ce texte, en sous-entendu, des références subtiles, c'est une magnifique mise en abîme de l'album, en fait, sans être trop transparente (j'ai un doute : c'est bien une mise abîme de l'album, hein ?) Je ne l'ai pas beaucoup dit, depuis ton "retour", mais : bravo.
Je te rassure : oui. Et je te remercie l'avoir relevé, je pensais en le publiant que la plupart des gens y verraient un exercice de style un peu flemmard, une de ces méthodes de contournement dont je me moquais en intro... je ne m'attendais vraiment pas à ce que quelqu'un grille le truc dès le premier commentaire.
SupprimerJ'aime pas Pulp et j'allais troller comme un chien mais j'avoue, je suis d'accord avec Lil, l'article est vraiment très malin. Je respecte et je me tais (pour cette fois mais te sens pas pour autant encouragé à enchainer les articles sur la britpop).
RépondreSupprimer(où je découvre avec stupeur qu'en fait, depuis toutes ces années, tu lis les articles avant de commenter)
SupprimerJe connais Pulp que de réputation (et, blague à part, au début je le confondais régulièrement avec Suede) et je suis profondément admiratif de la sincérité qui se dégage de ton article. Comme souvent d'ailleurs. Je m'en vais donc de ce pas régler cette lacune au sujet du dit album ; )
RépondreSupprimerS'il y a bien une chose que je ne pensais réellement pas réussir avec ce texte, c'est faire découvrir l'album à quelqu'un. This Is Hardcore est un tel classique des années 90... certes, un peu moins que d'autres de la même époque (comme le note MIKA plus bas, à raison), et avec ce handicap majeur que le plus gros tube du groupe n'est pas dessus. Mais tout de même, ça reste un incontournable. Il faudra que tu me racontes ce que ça fait de le découvrir avec 25 ans de décalage...
SupprimerOk tu es officiellement dispensé du Rékap Morrissey ;)
RépondreSupprimerTu es trop bon :-)
SupprimerBel article. J'aime particulièrement la manière dont tu coupes volontairement la citation de TV Movie, non pas pour lui faire dire autre chose mais pour lui faire dire plus de choses. En y réfléchissant, il y a plein de passages comme ça dans l'album où en coupant un mot ou un vers, le texte devient beaucoup plus dur et pessimiste. Je ne sais pas si c'était volontaire, par contre..
RépondreSupprimerJarvis Cocker est un excellent lyricist et je ne pense pas du tout que ce soit une coïncidence. Toutes les chansons de l'album sont parcourues par les mêmes thèmes sous(-sous-sous)-jacents (l’angoisse de la page blanche, le vertige à l'idée d'écrire "l'Album d'Après", la situation bordélique au sein du groupe, le fait de connaître une gloire tardive accompagnée d'un sentiment compréhensible d'usurpation, la découverte brutale de ce qu'est une "image publique"... etc.)
SupprimerVoilà qui ne nous rajeunit pas!
RépondreSupprimerJ'ai jamais été trop PULP mais c'est vrai que c'est album est une splendeur. Les deux d'avant sont excellents également mais c'est vrai qu'il ne sont pas aussi émouvants.
Je pense aussi que ça n'intéresse plus beaucoup de gens aujourd'hui This is hardcore et c'est malheureux, Jarvis Cocker n'a rien fait pour que le succès du groupe perdure après le split. S'il s'était construit une vraie carrière solo avec des albums tous les 3 ans chaque sortie serait devenu un petit revival mais comme il n'a pas du tout voulu s'enfermer là dedans PULP n'ont pas eu (IMO) la postérité à laquelle ils auraient pu prétendre.
Tout dépend je crois ce que l'on entend par "postérité". Par pure curiosité, j'ai regardé les listes des meilleurs albums des années 90 de médias dits "de référence". Que ce soit Rolling Stone, Spin, Q, Pitchfork... Pulp figure à chaque dans le Top 100 (avec Different Class, "Common People oblige, sans doute). Certes jamais aux premières places, mais dans une décennie aussi riche, ce n'est pas si étonnant. En revanche, ce n'est sans doute pas, en effet, un groupe que tu découvres rapidement si tu es un(e) gamin(e) de 2023. Et je suis assez d'accord avec toi quant au fait que la plus ou moins non-carrière solo de Jarvis Cocker y soit sans doute pour quelque chose. Il a choisi un autre chemin.
SupprimerJe partage ta lecture dans l'ensemble, mais je pense que tu devrais réécouter Freaks. Tu constateras que plus de dix ans avant This Is Hardcore, Pulp avait déjà publié un grand album malade. Il y avait déjà une profondeur et un mal être chez le groupe, moins visible puisque presque personne n'a entendu ces albums à l'époque, mais très prégnante.
RépondreSupprimerFreaks ? Tu parles de l'album où Jarvis Cocker passe les cinq premières chansons à se demander s'il préfère être Morrissey, Nick Cave ou Mark Hollis, avant de totalement jeter l'éponge et de chanter à peu près n'importe quoi de la manière la plus grandiloquente possible sur le reste du disque ? ^^
SupprimerMerci du conseil mais je n'ai pas besoin de réécouter Freaks pour savoir que c'est un album plus "malade" que "grand". J'ai plutôt de la sympathie pour les albums de Pulp chez Fire, je les trouve bien moins infâmes que ce que certains racontent parfois, mais je n'ai aucune difficulté à comprendre pourquoi le groupe n'a pas explosé à cette époque. Non seulement ça manque fortement de personnalité, non seulement la prod fait sonner tout ça comme des démos vaguement habillées, mais le mal être que tu évoques me semble plus affecté qu'autre chose (voire : carrément simulé). Freaks, pour moi, est principalement l'album d'un mec qui essaie de faire du dark rock comme il aurait essayé autre chose cinq minutes avant. Je le pensais déjà il y a vingt-cinq ans (parce qu'après la gifle que j'avais prise avec This Is Hardcore, autant te dire que j'ai acheté tous ceux d'avant le même jour ou presque), mais mon point de vue s'est encore affermi quand il a été réédité il y a une dizaine d'années et que tout le monde a pu s'apercevoir que Pulp faisait déjà des morceaux "à la Pulp" en 1987... sauf qu'il n'osait pas les sortir en Faces A.
J'adore cet album (c'est aisément mon album de Pulp préféré même si évidement j'écoute les plages impaires du précédent plus souvent), mais j'ai un petit souci avec [et pas impossible que tu le partages vu les titres que tu cites dans l'article: la face A est tellement parfaite et tellement puissante que je ne sais même plus si cet album aune face B. A la sortie de "This is Hardcore", je suis tellement émotionnellement lessivé que je remets généralement le reste à plus tard.
RépondreSupprimerAprès, on va pas réécrire l'histoire (même si les fans de Pulp adorent le faire), Pulp avant 1992 c'est quelques très bons titres, mais ça reste très dispensable.
(Il y a plein d'autres groupes qui ont fait des Peel sessions des leur début et dont on se branle)
Donc là en fait, tu m'expliques tranquillement que tu attends (et réclame) depuis plus de dix ans un article sur un disque dont tu n'écoutes jamais que les cinq premières chansons ? :-D
SupprimerPlaisanteries mises à part je suis relativement d'accord, si on part du principe qu'il fait deux faces de six titres, c'est évident que la première est assez nettement au-dessus (mais elle au-dessus de presque tout ce qui est sorti en 1998, ce qui n'est pas peu dire). Ma petite réserve sera sur "The Fear". Excellente intro mais si on s'amusait à classer les chansons de l'album (idée débile, soit), je placerais "I'm a Man" avant.
Je ne connais pas tant de fans de Pulp qui essaient de réécrire l'histoire... bon, en fait, je ne connais pas tant de fans que Pulp que ça - tout court. Mais j'ai tout de même l'impression qu'il est assez communément admis que les albums avant His'n'Hers ne sont que d'aimables curiosités. Jarvis Cocker lui-même ne semble avoir qu'une affection très modérée pour ceux-ci (d'ailleurs, la première fois que le groupe s'est reformé il y a une dizaine d'années, ils n'en jouaient quasiment jamais de titres sur scène...) A limite, si je devais en sauver un, ce serait It, qui a une certaine fraîcheur et est finalement assez original si on part du principe que certes, il sonne comme plein d'autres trucs, mais que ce sont des trucs quasi contemporains qu'il était peu probable que Cocker ait réellement entendu à l'époque (tu sais mon affection pour ce genre de hasard de l'histoire de la pop). Même Separations, je trouve plutôt sympa de l'intégrer dans les "vrais" albums de Pulp (c'est le cas en terme de line-up, mais ça se cherche encore énormément niveau écriture...)
Je crois que Pulp est le groupe que j'ai le plus essayé d'aimer. J'ai commencé par His'n'Hers, mais je n'en ai pas le moindre souvenir. Pareil pour This is Hardcore je crois. Je ne savais pas qu'il avait une telle réputation, je l'ai réécouté après avoir lu l'article et je saisis un peu mieux, notamment en suivant les paroles, mais je crois que je ne serais jamais vraiment emballé. Quand je pense à Pulp, je vois comme une tendance à vouloir toujours écrire des hymnes épiques intemporels, comme si toutes les chansons voulaient être "Space Oddity", "Rock n' Roll Suicide" ou "Heroes". Ce que j'apprécie beaucoup sur le principe, mais qui me paraît un peu fatiguant à la longue puisqu'évidemment, la tentative est souvent un peu vaine. Sans grand originalité, Different Class est l'album où ça fonctionne le mieux je trouve, et le seul qu'il m'est arrivé de réécouter, plus par bribes qu'en intégralité cela dit. En tout cas ça change ma perception du groupe, et de la musique 90's même. Pas de là à devenir fan ni même à admettre que cet album est le meilleur de 1998, mais ça me fait réfléchir.
RépondreSupprimerQuand même, cet album n'est pas le meilleur de 1998 (mais faut dire que c'était une année chargée ^^)
SupprimerC'est vraiment marrant comme perception, j'ai le sentiment qu'on pourrait difficilement être plus loin de la réalité. Pour moi Pulp est au contraire un groupe qui n'était pas du tout programmé pour le succès, qui avait assez peu d'ambitions artistiques et qui s'est retrouvé du jour au lendemain avec un statut les dépassant complètement (et dont ils ne se sont jamais remis, en définitive). Presque l'inverse de tous les groupes britpop en fait, qui étaient beaucoup plus ambitieux, beaucoup plus pros, beaucoup plus encadrés... etc. Pulp étaient des gens plus âgés (Jarvis Cocker a dix ans de plus qu'un Liam Gallagher) et je crois qu'en fait, au moment de "Common People", ils avaient déjà un peu abdiqué l'idée de devenir des popstars et d'écrire quoi que ce soit qui marquerait l'histoire (raté).
A bien y réfléchir, c'est un reproche que je ferais à la plupart des albums britanniques des 90's, même Radiohead dans une certaine mesure. Ce n'est pas tellement une histoire de posture ou de discours, parce qu'effectivement Oasis est imbattable dans le genre prétentieux et ambitieux, et ni Blur ni Suede ne sont particulièrement plus humbles.
SupprimerC'est vraiment dans la construction des chansons que je vois ce trait récurrent. Commencer doucement, faire gonfler les arrangements, changer de registre de voix, trouver la suite d'accords la plus accrocheuse, étirer les codas un poil trop longtemps... C'est une écriture très caractéristique du rock britannique, et comme Pulp est nettement moins pop que ses contemporains, et plus mûr dans son approche des compositions, je trouve ça encore plus présent chez eux. A l'écoute des albums, il y a finalement une ambition artistique inversement proportionnelle à leur prétention chez eux par rapport à Oasis. Pas tellement pour une histoire d'ambition ou de succès médiatique donc, mais dans ce positionnement d'outsider, celui qui passe moins en radio mais dont les chansons sont incontournables chez les amateurs éclairés. Sur This is Hardcore, je pense à "The Fear", "Help the Aged", "Glory Days", "Like a Friend", et même pourquoi pas la chanson-titre. Et sur Different Class c'est un peu plus léger -plus pop en fait- à mon goût même si finalement plus fréquent ("Common People" et "Underwear" en premier lieu). En essayant de clarifier tout ça, je me rends compte qu'un paquet de chansons de Pulp pourraient concurrencer celles de mes chouchous de l'époque, mais bizarrement je ne les ai jamais vraiment en tête quand il s'agit d'albums.
Je commence à mieux voir ce que tu dis mais est-ce réellement spécifiquement britannique ? Cela me semble plus typique des années 90 en général. Un groupe comme Pearl Jam par exemple me semble bien coller à ce que tu décris.
Supprimer