Clem Snide - Bird of Pray

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Alors que la terre entière s'excite à n'en plus finir sur la pop-neurasthénique d'Antony & The Johnsons, Eef Barzelay continue son chemin tranquillement, au rythme d'un album (presque toujours excellent) par an, ici sur la BO de Rocket Science, là en solo pour deux albums dont évidemment personne n'a parlé... et donc, en 2008, sur le sixième album de Clem Snide, ce groupe fabuleux, essentiel de la folk des années 2000, qui a bien failli disparaitre il y a deux ans dans une indifférence quasi générale. C'est que le groupe culte de l'antifolk new-yorkaise (même s'il n'en pratique plus depuis des lustres) n'est pas vraiment du genre à caresser l'auditeur dans le sens du poil, proposant chaque fois des albums bien plus complexes que leur aspect rugueux ne le laisse entendre de prime abord, bien moins naïfs que les titres des chansons le suggèrent... bref : avec eux le ver est toujours bien enfoncé dans le fruit et ne demande qu'à s'extirper pour prendre l'auditeur à revers.

Inenvisageable il y a six mois tant la situation au sein du groupe semblait mauvaise, Hungry Bird arrive donc aujourd'hui - et c'est comme si de rien n'était. Si les albums de crise sont souvent à l'image de l'ambiance au sein de l'équipe qui les a enregistrés, celui-ci déroge carrément à règle : c'est sans doute le disque le plus apaisé que Clem Snide ait jamais produit. Dès les premières notes de "Me No" on est bluffé par la sérénité qui s'en dégage, et l'impression persiste tout au long des neuf pistes suivantes. Barzelay y affiche avec insolence son aisance à trousser des instantanés folk-pop hypnotisant ("Burn the Light", "Our Time Will Come"), réitère son serment d'allégeance au Wilco de la grande époque ("The Endless Endings"), susurre le tout de sa voix plus poignante que jamais ("Pray", exercice risqué, s'avère bouleversante)... surtout, on est frappé par la cohérence de Hungry Bird, là où Clem Snide nous avait plutôt habitués à des albums éparses sautant sans vergogne d'un genre à l'autre, de la folk à la pop puis du rock à l'americana. Pas de ça ici : servi par une production léchée et des arrangements à l'élégance discrète, Hungry Bird est probablement le disque le plus dense que le groupe ait publié à ce jour, uniquement composé de mid-tempo mais pourtant jamais répétitif ni monotone.

On connait quelques neurasthéniques qui feraient bien d'en prendre de la graine...

👍👍 Hungry Bird 

Clem Snide | SLG, 2009