Le Nouveau Blondel a un petit goût de banane...

...

Tous les ans c'est couru d'avance. A un moment où un autre la semaine où débarque le Beaujolais nouveau, je tombe sur un blaireau qui me déclare, de cet air pénétré inhérent aux gens qui ne savent pas de quoi ils parlent : "mmm... je trouve que cette année il a un petit goût de banane". Remarque évidemment totalement débile, puisque le Beaujolais nouveau a toujours plus ou moins un petit goût de banane.

Pour le nouveau Blondel, qui revient lui aussi de manière annuelle, c'est un peu pareil : il a toujours un arrière goût de Blondel déterminant d'entrée si on va le finir ou non (selon que l'on adore ou que l'on est allergique). Notez que de même qu'il y a des gens qui achètent tous les ans du Beaujolpif alors que fondamentalement il n'aiment pas ça, il doit bien y en avoir qui lisent Blondel une fois par an tout en trouvant qu'il constitue au mieux un sympathique écrivain de table.

La métaphore étant difficile à filer plus longtemps, le vif du sujet s'impose. Un vif bien connu et presque banalisé tant Le Baby-sitter ressemble, jusque dans ses passages les plus anodins (les réflexions sur le frigo vide des deux premières pages, par exemple) à un best of déguisé. Pas étonnant : l'auteur de Passage du gué n'a finalement jamais fait que nous jouer chaque année la même partition en changeant ici le ton (This Is Not a Love Song), là l'orchestration (A Contretemps), c'est d'autant plus prononcé cette année que Le Baby-sitter présente énormément de similitudes avec son prédécesseur - à commencer bien sûr par le principe du jeune étudiant déraciné partant à la rencontre d'une bande d'adultes hauts en couleur qui ne tarderont pas à l'adopter.

La principale différence réside dans la tonalité, bien plus lumineuse que dans les deux derniers livres d'un J-PB qui avait décidé un beau matin de nous déballer son côté obscur. Dans Le Baby-sitter, on retrouve une forme de positivisme assez absente d'un A Contretemps - aussi apaisé que douloureux... quand ce nouveau roman fait (incroyable mais vrai) régulièrement sourire. Une forme d'humanisme, sans doute, jamais lisse ou niaiseuse, toujours subtile et esthétiquement irréprochable. Il est vrai que si ce livre fait parfois penser à des facettes blondéliennes que l'ont n'avait plus entrevues depuis quelques temps, la qualité d'écriture poursuit sa progression constante, discrètement inventive et sans aucun doute décisive - dans la mesure où sur le papier Le Baby-sitter me parle probablement moins qu'un This Is Not a Love Song. Les personnages secondaires en sont une bonne illustration, tous criant de vérité et admirablement caractérisés. Alors certes, l'intrigue est un brin convenue et certes aussi, il lui manque un petit quelque chose (disons le souffre - mais en fait c'est indicible...) pour le hisser à la hauteur des meilleurs livres de son auteurs.

Cela n'en est pas moins une réussite.


Le Baby-sitter, de Jean-Philippe Blondel (2010)

---

> Plus chez AMANDA, BLUEGREY, CUNE, TAMARA...
...